Distributeurs et importateurs se déchirent sur le décret Copie privée

Distributeurs et importateurs se déchirent sur le décret Copie privée

Pour le plus grand bien des ayants droit

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Marc Rees

Publié dans

Droit

26/09/2013 7 minutes
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Distributeurs et importateurs se déchirent sur le décret Copie privée

« Bruxelles n’a soulevé aucun problème. Il faudra donc publier ce décret puisqu’il n’y a plus aucun obstacle de fond ». Pascal Rogard (SACD), un des ayants droit qui perçoit la redevance pour copie privée, nous a indiqué que le décret « Notice affichage et facturation » serait bien publié le 1er janvier 2014 confirmant une information révélée dans nos colonnes en mars 2013.

ministère de la culture

 

La loi du 20 décembre 2011 bouleverse quelque peu les lignes en matière de copie privée. Elle oblige théoriquement l’information du consommateur sur le niveau de copie privée prélevée sur les produits qu’il compte acheter. La même loi organise le principe d’un remboursement des acheteurs « professionnels » (comprendre « non particuliers »). Une notice doit également accompagner cette vente pour expliquer aux pros cette faculté de remboursement et aux consommateurs les finalités de la ponction : compenser la possibilité pour le particulier de faire une copie privée et expliquer le financement de l’action culturelle puisque 25 % des sommes prélevées sont conservées à cette fin par les sociétés de collecte et de répartition.

 

En même temps qu’était publiée au journal officiel la loi du 20 décembre 211 sur la copie privée, le ministère de la Culture et Bercy officialisaient le même jour un texte d’application pour le moins contrariant. Il conditionne le remboursement des pros à la fourniture d’une facture mentionnant le montant de la copie privée. Mais Aurélie Filippetti s’est bien gardée d’imposer cette obligation de facturation voilà pourquoi si peu de sommes ont été restituées aux pros (voir notre test).

 

Un projet de décret en ce sens a toutefois été notifié à Bruxelles début 2013 comme le veut une directive dès lors qu’un texte touche à la « société de l’information ». Dans la version révélée par PC INpact, ce deuxième texte veut obliger les détaillants à informer le consommateur sur le montant de la copie privée affiché par famille à proximité des supports concernés. Lorsque l’affichage ne sera pas possible ou que le revendeur utilise un site, le décret se contentera d’une information « par tout moyen approprié ». La notice explicative pourra être diffusée sur un site géré par le ministère de la Culture. Enfin, le niveau de copie privée sera affiché sur les factures afin que les pros puissent obtenir le remboursement de ce qu’ils n’avaient pas à payer.

Les remboursements des pro effectifs dès le 1er janvier 2014, sauf que...

Si on résume, la loi prévoit le principe du remboursement des pros. Le ministère de la Culture le conditionne à la fourniture d’une facture mentionnant le niveau de prélèvement. Et un projet de décret veut obliger cette obligation de facturation seulement à partir du 1er janvier 2014.

 

Nous avons eu plusieurs échos ces derniers jours laissant entendre que ce projet de décret resterait dans les tiroirs. Du côté de la Fédération des ventes à distance, les derniers échanges avec Bercy datent de début juillet quand le décret partait en Conseil d’État. Là, elle a évidemment soulevé les difficultés de mise en œuvre de ces futures obligations. Mais du côté des ayants droit, ce texte doit être publié puisque Bruxelles n’a émis aucune critique sur le dispositif. « C’est une mesure de transparence, en quoi la distribution peut-elle s’y opposer ? Il y a eu un consensus général » nous assure Pascal Rogard.

 

La loi du 20 décembre 2011 avait entretenu le flou sur la prise en charge de ce dispositif. Est-il normal que les détaillants supportent finalement ces frais d’étiquetage ou de facturation ? Pascal Rogard botte en touche par une autre question : « est-ce qu’on les aides quand ils étiquettent des produits ou indiquent que tel yaourt a tant de glucide ? ». Réponse de la FEVAD : « Ces indications sont liées à des impératifs de santé, la copie privée est conçue pour que les ayants droit touchent de l’argent ». Nuance.

 

Pour les boutiques en dur, l’idée serait que les magasins puissent afficher la copie privée en tête de gondole, non sur les étiquettes de prix déjà bien occupées par l’éco-participation. « Sur internet, nous avons un peu moins de souci d’espace ou de facturation » admet la FEVAD, avant de tempérer : « rajouter des lignes c’est toujours compliqué, d’autant que les barèmes sont modifiés suivant les décisions de la commission copie privée ou les décisions d’annulations du Conseil d’État alors que nous révisons les catalogues B2C généralement tous les 6 mois. Nous avons demandé du coup un renvoi vers les barèmes affichés sur le site de la Commission afin d’être sûr d’avoir les bonnes informations en permanence. »

 

La Fédération ajoute qu’« il faudra attendre la publication de l’arrêté détaillant le décret. Nous avons en tout cas demandé un délai entre la publication du décret et sa mise en œuvre effective. »

Les solutions préconisées par le rapport Castex sur la copie privée

La socialiste Françoise Castex est depuis intervenue dans ce débat épineux. Dans un projet de résolution, elle demande à ce que la copie privée soit récoltée non dans l’Etat du consommateur mais dans celui où le produit a été placé pour la première fois sur le marché européen. L’eurodéputée préconise d’interdire par la suite les perceptions dans les autres États pour éviter le risque de cumul de redevance. Contrairement à la Commission européenne, qui se montre favorable à un assujettissement chez le détaillant – afin de ne facturer la RCP qu’au consommateur final – l’eurodéputée estime que la ponction pourrait être affichée dès l’importation, ce qui soulagerait la charge des distributeurs.

 

Mais l’idée est rejetée en bloc par le Simavelec, syndicat de l’industrie de l’électronique. « Tout arrive à Amsterdam, il n’y a pas de stock qui vise directement la France. Sticker ensuite chaque produit, c’est un peu compliqué ! » D’autant qu’il existe des pays sans RCP ou avec des niveaux totalement différents. Il faudrait donc deviner dès Taiwan ou à l’entrée à la frontière si tel colis va en France, en Belgique ou en Allemagne.

Pour l'harmonisation

Pour Marine Pouyat, responsable juridique à la FEVAD, malgré tout, « ce choix favoriserait l’harmonisation tout en évacuant le casse-tête des distributeurs ». Harmonisation ? « Lorsque nous demandons aux consommateurs pourquoi ils achètent à l’étranger, la première raison invoquée est celle du prix. C’est une étude Médiamétrie sur les usages des internautes qui le dit. Entre 2011 et 2012, les achats vers les sites étrangers ont pris trois points de plus. Or, on n’achète pas un réfrigérateur ou une télé à l’étranger du fait des frais de livraisons. L’intérêt se concentre donc sur les petits produits qui ne pèsent pas lourd comme les disques durs externes, les tablettes, les smartphone », tous soumis à copie privée.

 

Laissant s’envenimer la mêlée entre distributeurs et importateurs, les ayants droit savent qu’ils ne pourront être accusés d’avoir bloqués ce dispositif si celui-ci coince chez les détaillants. Ceux-ci porteront donc le chapeau et les bénéficiaires de ces 180 millions d’euros collectés chaque année n’auront qu’à se contenter de percevoir sans avoir à rembourser les pros.

Écrit par Marc Rees

Tiens, en parlant de ça :

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Introduction

Les remboursements des pro effectifs dès le 1er janvier 2014, sauf que...

Les solutions préconisées par le rapport Castex sur la copie privée

Pour l'harmonisation

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Commentaires (22)


En gros ce serait encore le prélèvement par défaut, et après un hypothétique remboursement ?








Etre_Libre a écrit :



En gros ce serait encore le prélèvement par défaut, et après un hypothétique remboursement ?







Exact.

Je doute pour l’effectivité du remboursement, en espérant que la CJUE ne regarde pas trop le cas français.



En tant que pro on essayé l’exonération, vu que l’intégralité des disques qu’on vend servent a des sauvegarde de serveurs.

Reponse : c’est au client de demander et chaque demande sera étudié au cas par cas.



En gros : - laissez tombé ca sera trop compliqué.



En attendant sur chaque serveur vendu il doit y avoir ~100€ de copie privé …


Je pensais pas dire du bien des ayant droit un jour, mais là c’est juste :



« C’est une mesure de transparence, en quoi la distribution peut-elle s’y opposer ? Il y a eu un consensus général » nous assure Pascal Rogard.



ENFIN !


Si j’ai bien compris, pour les pros, on voudrait faire comme pour la TVA et permettre aux professionnels de la récupérer. Dans ce cas la, cela serait au vendeur de rajouter une ligne dans chaque facture indiquant exactement la taxe pour copie privée…



Pourquoi ce décret ne peut-il pas sortir ? Car effectivement c’est aux ayant droits de supporter la charge de la mise en place du système non ?








carbier a écrit :



Pourquoi ce décret ne peut-il pas sortir ? Car effectivement c’est aux ayant droits de supporter la charge de la mise en place du système non ?







car tu dois mettre à jour tous les systèmes de facturation français (sous la menace d’une sanction pénale).

Les distributeurs sont peu chauds à l’idée d’avoir à supporter cette charge qui va rien leur rapporter.



Pourquoi vouloir ajouter ça sur la facture ? Ils n’ont pas un moyen au niveau national de ressortir le montant de RCP en fonction de la date d’achat, du type de produit et de son espace de stockage ?



Ça ne doit pourtant pas être compliqué (à moins qu’il ne conservent pas l’historique des barèmes <img data-src=" />) et ça permettrai de rembourser les sommes dû depuis des années aux pros <img data-src=" />.








fanf73 a écrit :



… et ça permettrai de rembourser les sommes dû depuis des années aux pros <img data-src=" />.





Malheureux, ça va pas la tête ?



De toute façon ils ont bloqués les remboursement antérieurs par décret donc pas trop de risque pour eux…








carbier a écrit :



Car effectivement c’est aux ayant droits de supporter la charge de la mise en place du système non ?





j’ai bien ri









vince120 a écrit :



j’ai bien ri





Effectivement j’aurai du mettre “question naïve” en préambule <img data-src=" />









MarcRees a écrit :



car tu dois mettre à jour tous les systèmes de facturation français (sous la menace d’une sanction pénale).

Les distributeurs sont peu chauds à l’idée d’avoir à supporter cette charge qui va rien leur rapporter.





Il y a un truc qui me dépasse (je ne suis pas dans le commerce) mais à aucun moment dans leur comptabilité, les distributeurs n’ont une trace de la taxe copie privée ?



Après quant à la charge, ils ne peuvent pas ponctionner un petit pourcentage de cette taxe à la base (pourcentage fixé dans le décret d’application) ?



Oui je sais, c’est une succession de questions naïves, mais bon tout cela me parait tellement aberrant <img data-src=" />









CR_B7 a écrit :



En tant que pro on essayé l’exonération, vu que l’intégralité des disques qu’on vend servent a des sauvegarde de serveurs.

Reponse : c’est au client de demander et chaque demande sera étudié au cas par cas.



En gros : - laissez tombé ca sera trop compliqué.



En attendant sur chaque serveur vendu il doit y avoir ~100€ de copie privé …







Vous n’avez pas essayer de scripter les demandes pour chaque client avec un template. Si les demandes sont identiques pour chaque client, vous êtes dans votre droit, c’est à eux le problème de gérer 1 courriers par jour au lieu de faire 1 par mois.









cyrano2 a écrit :



Vous n’avez pas essayer de scripter les demandes pour chaque client avec un template. Si les demandes sont identiques pour chaque client, vous êtes dans votre droit, c’est à eux le problème de gérer 1 courriers par jour au lieu de faire 1 par mois.





De leur côté ils ont un script aussi.



Si demande de remboursement



 Alors à la corbeille   



Suivant









Inny a écrit :



De leur côté ils ont un script aussi.



Si demande de remboursement



 Alors à la corbeille   



Suivant







Là, il peuvent écrire un template de lettre d’avocat. 100€ par machine vendu, cela devient vite rentable de filer 2000€ à un avocat.









cyrano2 a écrit :



Vous n’avez pas essayer de scripter les demandes pour chaque client avec un template. Si les demandes sont identiques pour chaque client, vous êtes dans votre droit, c’est à eux le problème de gérer 1 courriers par jour au lieu de faire 1 par mois.





et simplement indiquer 50% du prix facturé en tant que rcp (valeur estimée), ca marche pas ?

en plus vos clients vont être content :)



ça devrait juste être dans le code de la consommation en général que tout le détail des taxes, redevances et cie doivent être toujours indiquées.

C’est complètement scandaleux de devoir faire un truc à chaque nouvelle taxe








Winderly a écrit :



Je pensais pas dire du bien des ayant droit un jour, mais là c’est juste :



ENFIN !





“Enfin”? Je ne sais pas si tu t’en rends bien compte, mais le seul “consensus” qui existe est dans sa tete. Ou entre gens du meme bord. Les ayants-droits, les fabricants, les importateurs, les distributeurs et les consommateurs, sans parler du gouvernement… autant de partis en presence, certains superbement ignores, d’autres bien “eduques” par des lobbies bien connectes (politiquement, pas electroniquement), et chacun a son mot a dire au sujet de la Copie Privee, ses interets a defendre.

Aucun debat reel n’a ete mene, et la Comission Copie Privee est une instance arbitraire, dont les nombreuses decisions annulees devraient serieusement faire douter de la legitimite.



Mais a part ces “menus details”, tout va bien Madame la Marquise, il y a consensus.



Par la présente je requiert que les sommes prélevées au titre de la taxe pour copie privée soient employées à la mise en place de la fibre optique sur le territoire.



Pour une fois cela servira à quelque chose d’utile …








wormidable a écrit :



“Enfin”? Je ne sais pas si tu t’en rends bien compte, mais le seul “consensus” qui existe est dans sa tete. Ou entre gens du meme bord. Les ayants-droits, les fabricants, les importateurs, les distributeurs et les consommateurs, sans parler du gouvernement… autant de partis en presence, certains superbement ignores, d’autres bien “eduques” par des lobbies bien connectes (politiquement, pas electroniquement), et chacun a son mot a dire au sujet de la Copie Privee, ses interets a defendre.

Aucun debat reel n’a ete mene, et la Comission Copie Privee est une instance arbitraire, dont les nombreuses decisions annulees devraient serieusement faire douter de la legitimite.



Mais a part ces “menus details”, tout va bien Madame la Marquise, il y a consensus.





C’est pas une raison pour rejeter ce détail, afficher la proportion reversée à la copie privée est à mon avis positif.

Mais évidemment, + 1 pour tous les problèmes que tu as résumés.









Winderly a écrit :



C’est pas une raison pour rejeter ce détail, afficher la proportion reversée à la copie privée est à mon avis positif.

Mais évidemment, + 1 pour tous les problèmes que tu as résumés.





Je ne dis pas que c’est une raison de rejeter ce point. Au contraire, il serait positif pour pas mal de monde (nous inclus) que les fabricants, importateurs et distributeurs fassent front commun contre les ayants-droits. Qu’ils evitent de se chamailler sur des points de detail: ca donne plus de prise a l’adversaire.



Je pointais simplement l’hypocrisie de M. Rogard et de son “consensus”.



Il suffirait pourtant de renverser le processus.



Pas de RCP par défaut et une déclaration pour ceux qui achètent à remplir avec le versement de la RCP calculé par Copie-France (qui ont les barèmes à jour eux).



Autre version:

En magasin des produits avec et des produit sans, par exemple:

CD/DVD pour musique et films

CD/DVD pour données neutres



Franchement se serai tellement plus simple. <img data-src=" />