Patrick Bloche : régulons Internet sans autorité de régulation

Comme pour la presse, et contrairement à l'audiovisuel

Après Christian Paul, c’est Patrick Bloche qui réagit dans nos colonnes au possible transfert en douce des pouvoirs de la Hadopi au CSA. Le député de Paris, président de la Commission des affaires culturelles nous donne son sentiment sur cette initiative qui pourrait venir d’un amendement sénatorial lors du projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel.

 Patrick Bloche Patrick Bloche devant la mission Lescure en janvier 2013

 

« À l’Assemblée nationale, en première lecture, commente Bloche, nous n’avons pas été confrontés à cette question. Personne n’a inscrit dans ce projet de loi le transfert des responsabilités de la Hadopi vers le CSA. De plus, le CSA qui avait fait un certain nombre de demandes en termes de régulation de l’audiovisuel n’a pas montré un empressement particulier à reprendre ces compétences ».

 

Le député se souvient aussi des propos du président du CSA : « Olivier Shrameck avait lui-même déclaré qu’il ne voulait pas mettre un képi ou devenir gendarme, des propos qui m’avaient profondément réjoui ». On sait cependant que Shrameck s’est depuis montré très intéressé par un transfert pur et simple des pouvoirs de la rue de Texel où la sanction est en définitive infligée par le juge.

Risque de cavalier législatif et pas d'arbitrage gouvernemental

Patrick Bloche est en tout cas en pleine harmonie avec son collègue socialiste Christian Paul pour dénoncer la tentation d'un transfert en douce de ces pouvoirs lors des débats au Sénat. « C’est un projet de loi qui vise à rétablir l’indépendance de l’audiovisuel public. Je suis attaché à ce que l’on reste sur ce sujet, ne serait-ce que pour prendre le maximum de protection et éviter tout risque d’anticonstitutionnallité ».

 

Transférer les pouvoirs de Hadopi au CSA ne contribue en rien à l’indépendance de l’audiovisuel. Du coup, l’utilisation de ce véhicule législatif pourrait subir la censure du Conseil constitutionnel. « Une jurisprudence du Conseil constitutionnel censure les dispositions qui n’ont pas un rapport direct avec l’objet du projet de loi. »

 

Surtout, pour le président de la commission des affaires culturelles, rien n’est encore acquis pour l’avenir de la Hadopi. « J’ai organisé un débat avec Pierre Lescure pour qu’il puisse présenter son rapport et sauf si cela m’a échappé, le gouvernement n’a pas encore rendu formellement d’arbitrage. Il y a bien eu des expressions, mais à ma connaissance je n’ai pas connu d’arbitrage notamment sur le devenir de la Hadopi : doit-elle disparaître totalement ou partie ? Faut-il transférer ses pouvoirs au CSA ? ».

Réguler Internet comme la presse écrite ?

L’idée retenue pourrait finalement être celle d’un projet de loi spécifique. Quid du contenu de ce futur texte? L’analyse du député laisse présager un joli bras de fer avec la Rue de Valois. « J’ai toujours été réservé à l’idée de créer une autorité de régulation, c’est l’une des raisons de mon opposition à Hadopi. Je considère qu’internet doit être régulé comme la presse écrite. Dans la presse écrite, il n’existe pas d’autorité de régulation en tant que telle. La presse, la liberté de la presse, les abus éventuellement de cette liberté sont dans un texte fondateur, la grande loi de 1881. La loi doit permettre la liberté de communication garantie par la Constitution et apporter les adaptations nécessaires au droit commun. Ce droit commun s’applique d’ailleurs déjà à internet. En l’occurrence il n’y a jamais eu d’espace de non-droit sur Internet. »

Réponse graduée vs légalisation des échanges non marchands

Patrick Bloche nous assure par la même occasion que ses propos tenus en janvier 2013 devant la mission Lescure « n’ont pas changé ». Il dénonçait alors « les dispositions pénales votées dans Hadopi 2 que ce soit la procédure des ordonnances pénales ou cette contravention - que j’ai toujours trouvé tellement délirante - de négligence caractérisée qui amène à ce que soit sanctionné non pas celui qui a procédé à un téléchargement illégal, mais l’abonné de la connexion sur lequel a eu lieu ce téléchargement illégal. » Il fustigeait les fondements mêmes de cette incrimination, considérant « qu’on doit être sanctionné pour les fautes qu’on a commises - si tant est qu’un téléchargement illégal soit une faute au sens où on l’entend habituellement - plutôt que pour les fautes que d’autres ont commises. »

 

Huit mois plus tard, il relance les sujets trop vite évacués en 2009 ou lors du débat DADVSI : « à partir du moment où on essaye d’élever intelligemment les débats, réfléchissons à la non-pénalisation voire à la légalisation du téléchargement en lui donnant un statut sécurisant, réfléchissons à trouver de nouveaux modes de rémunération de la création, d’une manière consensuelle sans qu’on se retrouve avec les débats d’affrontement qu’on a connu lors de la loi Hadopi. Que chacun puisse trouver son compte : des créateurs rémunérés et une sécurisation des échanges non marchands pour permettre aux internautes de communiquer librement. »

Bloche présidera l'éventuelle CMP

Aux sénateurs qui s’apprêtent à examiner dans quelques jours le projet de loi sur l’audiovisuel, il adresse ce message : « je serai intéressé et s’il le faut vigilant aux initiatives qui seraient prises en première lecture au Sénat et a fortiori quand on sera éventuellement au sein d’une commission mixte paritaire ». D’ailleurs, si cette CMP devait se réunir à l’issue du vote au Sénat, ce qui sera le cas si des dispositions nouvelles y sont amendées, « je souhaite la présider. C’est dans mes fonctions de président de la commission des affaires culturelles. »

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