Alors que la police française mène depuis plus de deux semaines une enquête portant sur des tweets jugés homophobes, l'avocate du Comité IDAHO France - qui a porté plainte contre plusieurs des auteurs de ces messages - considère aujourd'hui que ces investigations pourraient permettre à terme de mettre en cause un plus grand nombre de twittos. Explications.
C’est donc le 14 août dernier que le Parquet de Paris a décidé de confier à la Brigade de répression de la délinquance aux personnes (BRDP) le soin de mener une enquête préliminaire, suite à la plainte déposée deux jours plus tôt par le comité IDAHO France (pour International day against homophobia and transphobia). Pour rappel, l’organisation s’élevait contre Twitter et plusieurs centaines de ses utilisateurs après que des messages manifestement homophobes ont été publiés sur le célèbre réseau social au détour des hashtags « #BrûlonsLesGaysSurDu » et « #LesGaysDoiventDisparaîtreCar ».
Plus de moyens pour davantage d’auteurs de tweets
« La plainte a été déposée auprès du Parquet du Paris. Ce dernier a initié une enquête, qui a été confiée à une brigade spécialisée » résume Maître Caroline Mécary, avocate du comité IDAHO, jointe par PC INpact. Mais si les auteurs de cette plainte apportaient des captures d’écran au travers desquelles différents auteurs de tweets étaient visés, la liste des accusés pourrait s’allonger dans les jours et semaines à venir. « Dans le cadre de l’enquête, les policiers vont pouvoir faire la liste de tous les messages qui sont susceptibles d’encourir la qualification pénale que nous avons invoquée [provocation à la haine en raison de l’orientation sexuelle, ndlr]. Si aujourd’hui on en est peut-être à une trentaine de messages, en réalité, il y en a beaucoup plus : des centaines, des milliers... On a donc la possibilité d’agir contre chacun des auteurs ! » prévient ainsi l’avocate.
« On aurait très bien pu choisir de faire une citation directe, mais on aurait été très limités. Alors qu’en saisissant le Parquet, qui défend les intérêts de la société et qui, lui, a des moyens d’investigation que n’ont pas les personnes physiques ou morales, la poursuite peut être très large » poursuit Maître Mécary. En clair, le comité IDAHO voit en cette enquête préliminaire un tremplin permettant de traîner davantage d’auteurs de tweets jugés illicites devant les tribunaux.
Le comité IDAHO veut responsabiliser Twitter
« Ce que nous souhaitons, c’est que Twitter prenne conscience de la gravité de la diffusion sur son réseau de hashtags homophobes, racistes, sexistes, antisémites... et que Twitter prenne la responsabilité de supprimer lesdits messages quand ceux-ci surgissent sur son réseau. C’est ça en fait l’enjeu ! » ajoute l’avocate. « Le processus judiciaire n’est qu’un outil par rapport à cette prise de conscience ». Car si les utilisateurs du réseau social sont d'un côté pointés du doigt pour leurs propos, l'entreprise américaine est elle aussi mise en cause en raison de son prétendu manque de modération des hashtags « #BrûlonsLesGaysSurDu » et « #LesGaysDoiventDisparaîtreCar », qui ont caracolé en tête de ses « top tendances » au début du mois.
Caroline Mécary n’entend d'ailleurs pas lâcher le morceau. Et ce quand bien même Twitter a longtemps traîné des pieds avant de céder les informations d’identification relatives à ses utilisateurs dans le cadre de l’affaire « #UnBonJuif » : « Que ça prenne trois mois, six mois, un an... Ce n’est pas un problème en soi ! Peut-être qu’il faudra cinquante combats contre Twitter pour que Twitter se responsabilise par rapport à la diffusion des messages qui sont racistes, antisémites, homophobes, sexistes... mais, au final, c’est nous qui gagnerons » promet-elle.
Si l’intéressée n’a pas été en mesure de nous donner de chiffre précis quant au nombre de twittos dont il était question dans la plainte du comité IDAHO, soulignons que le président de l’organisation nous confiait il y a plus de deux semaines avoir près de 900 tweets dans le collimateur. Sur l’ensemble de ces messages, il affirmait qu’il ne laisserait pas passer ceux dont les auteurs appelaient sans détour à la mort des homosexuels. En l’occurrence, cela concernait selon ses dires au moins 90 utilisateurs du réseau social. Rappelons enfin que l’incitation à la haine ou à la violence en raison de l’orientation sexuelle est un délit passible d’une peine maximale d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende.