Jean-Marc Ayrault signe une circulaire pour le libre dans les administrations

Et pendant ce temps en Europe...

Une première ! Le premier ministre a publié au journal officiel une circulaire définissant les orientations pour l’usage du logiciel libre dans l’administration. Un poids politique fort applaudit par plusieurs groupements favorables au secteur, qui militent cependant pour une démarche encore plus ambitieuse.

 

circulaire logiciel libre

 

La circulaire annonce que désormais, au regard du contexte, « le logiciel libre doit être considéré à « égalité avec les autres solutions. C’est dans cette évolution que s’inscrit l’usage du logiciel libre dans l’administration ». Selon le document, « de nombreux logiciels sont maintenant des « utilités » avec une valeur d’innovation limitée, et les clients acceptent de moins en moins de payer un prix élevé pour des produits jugés communs et rentabilisés, et d’être liés à un fournisseur ». Bref, le moment est venu pour accompagner ce mouvement.

 

Le document se veut pédagogique puisqu’il décrit tout d’abord les différentes libertés associées au logiciel libre (liberté d’exécuter, d’étudier le fonctionner, d’améliorer le programme, etc.). La circulaire applaudit le libre en qu’il tend à s’auto-entretenir, pour les besoins de l’utilisateur, sous le contrôle de la communauté, tout en créant l’émulation nécessaire à la créativité. Et elle affirme ce que répètent depuis des lustres les partisans du secteur : les solutions libres sont souvent moins chères, pilotées par les besoins, non par le superflu, et qui facilitent les adaptations, tout en garantissant un support à long terme et une mutualisation.

Quand le leader du marché élimine la concurrence

Au fil des pages, le document vante aussi les mérites concrets du secteur citant des cas où les coûts de fonctionnement des applicatifs ont été divisés par dix. La circulaire assène même quelques coups à un éditeur basé à Redmond : « certains produits d’éditeur ont de moins en moins d’alternatives commerciales crédibles, le leader du marché ayant éliminé la concurrence. Le logiciel libre apporte alors des possibilités alternatives ».  Le texte administratif n’évoque pas cependant les autres problèmes que peuvent générer les solutions propriétaires, à savoir la dépendance technologique ou les questions d’intelligences économiques du fait d’un code fermé.

 

Tout n’est cependant pas rose : la circulaire reconnaît que quand il n’a pas de prix, « le logiciel libre (…) est parfois jugé sans valeur » du côté de l’utilisateur influencé par l’effet marketing. S’adonner au libre conduit aussi pour une administration à suivre une communauté d’acteurs « pour s’assurer de la pérennité et du sérieux de la solution », le tout sous un cadre juridique spéfique, davantage tourné vers la propagation des connaissances que leur monopole. De même, l’utilisateur surtout professionnel « ne peut se limiter à profiter du système ; il doit entretenir le modèle par réinjection d’une part de ses gains sous une forme ou une autre. »

Mutualiser les efforts, réinvestir les dépenses évitées

Sur ce terrain, la circulaire Ayrault demande que les administrations mutualisent leurs efforts afin de gagner en efficacité, notamment sur la correction de bug. Le document rappelle qu’un « cadre de convergence des souches à privilégier dans le développement des systèmes d’information de l’État » a été défini cette année. Il est « désormais maintenu en concertation interministérielle ».  Le texte veut ainsi que « chaque ministère doit participer au maintien à jour de ce cadre et à son renforcement progressif. En particulier il déclarera régulièrement l’usage fait des souches du cadre et les usages hors du cadre, pour permettre le suivi de sa prise en compte et la gestion de son évolution ». Une mise à jour trimestrielle est du coup prévue, aidée d'un réseau d’experts.

 

Cette notion de mutualisation a un versant économique concret, mais non obligatoire : la circulaire propose que les administrations réinjectent 5 à 10% des coûts de licences évités dans l’enrichissement de certaines souches. Avec une certaine prudence, le document demande aussi que l’État développe la culture d’usage des licences libres dans le développement de systèmes d’informations publics. Comment ? Par exemple en préparant ou faisant usage de licences libres, tout en veillant « à faire prévaloir cette liberté vis-à-vis de ses prestataires dans tout contexte pouvant amener à réutilisation, sauf si un surcoût explicite est induit ».

 

La circulaire intervient dans un contexte où les administrations notamment indépendantes n’ont souvent d’yeux que pour les solutions propriétaires. Cet été, la Hadopi a ainsi publié un appel d’offres sous forme d’accord-cadre où elle cite notamment Microsoft Office 2010 Pro, Office 2013, Visio 2010, Project 2010, Exchange, Forefront TMG 2010 ou Sharepoint, sans oublier Windows 7, Windows 8, Windows Server…

Une prise de position claire, engagée

Le Conseil National du Logiciel Libre (CNLL) applaudit l’initiative et spécialement le groupe de travail de la DISIC, auteur du texte. « C’est un peu un coming-out du gouvernement sur le logiciel libre ! Depuis longtemps, le logiciel libre tient une place de choix dans les services informatiques de l’État, mais les prises de position officielles avaient rarement été aussi claires et engagées, accompagnées de résolutions concrètes » affirme Patrice Bertrand, président du CNLL. « Elles se limitent à ce stade au périmètre des systèmes d’information de l’État, et nous espérons que d’autres mesures confirmeront cette orientation au plan de la politique industrielle de la France ». Le CNCLL ajoute que l’État doit continuer l’effort et soutenir l'innovation et la formation, en militant pour les standards ouverts tout en refusant les brevets logiciels.

D'autres chantiers : les brevets logiciels, l'éducation, les appels d'offre

Du côté de l’April, on se « réjouit » tout autant du document. L’association pour la promotion du libre applaudit « la circulaire présente le Logiciel Libre comme un « choix raisonné » qu’il faut diffuser dans tous les ministères. Elle montre que, par les libertés qu'il donne à ses utilisateurs et son mode de fonctionnement, il offre des solutions extrêmement intéressantes pour l'administration tant au niveau de la gestion des coûts que de l'indépendance technologique des différentes administrations.  De plus, cette circulaire valide et renforce le travail effectué depuis plusieurs années par les agents publics dans les groupes thématiques de mutualisation ». 

 

Lionel Allorge, président de l'April : « Après la circulaire Fillon sur la généralisation de l'usage des formats ouverts, cette décision du premier ministre est une bonne nouvelle pour l'administration française. Nous espérons que le gouvernement Ayrault saura également faire profiter les citoyens français de sa bonne volonté en ce qui concerne le Logiciel Libre afin que cessent les inégalités dont ils sont victimes, par exemple en matière de DRM ou de vente liée. ». Mais plus qu’un aboutissement, l’association y voir surtout le premier pas d’une démarche qui reste à accomplir, notamment en matière d’éducation ou, là encore, contre les brevets logiciels.

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