Le renseignement US nommera lui-même les experts qui l'examineront

Une certaine idée de l'indépendance

En dépit des vœux de Barack Obama de réformer le Patriot Act et de voir la NSA nommer un responsable de la vie privée, il n’est pas certain que le paysage américain de la surveillance change radicalement. Ainsi, l’homme chargé de conduire un examen des agences de renseignement n’est autre que le directeur national du renseignement lui-même, James Clapper.

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Crédits : Tim Cummins, licence Creative Commons

Crise de confiance 

Vendredi dernier, Barack Obama a donné une conférence de presse pour aborder le terrain glissant de la surveillance. Depuis le début du scandale Prism, dont l’existence a été révélée par le lanceur d’alertes Edward Snowden, la NSA a fort à faire sur le plan de la communication pour justifier de l’efficacité de son travail. L’agence et le président américain sont décidés à calmer le jeu et plusieurs éléments ont été annoncés : un appel à la révision du Patriot Act, la nomination par la NSA d’un responsable de la vie privée, ainsi que la mise en place d’une équipe pour examiner le fonctionnement des agences de renseignement.

 

Dans la pratique, ces promesses - qui nous semblaient « molles », sont déjà encrassées par plusieurs constats. Ainsi, l’appel à la révision du Patriot Act ne signifie pas que cette loi sera bel et bien révisée. En outre, quand bien même la loi serait révisée, il faudrait encore examiner les apports dans le domaine de la vie privée. D’autre part, la nomination d’un responsable de la vie privée devra prouver son efficacité. Un défi d’autant plus important que l’on sait désormais que la Section 702 de la loi FAA (FISA Amendment Act) a été modifiée pour permettre les requêtes dans les données des citoyens américains, sur le sol des États-Unis. Enfin, la constitution d’un panel d’experts pour réviser le fonctionnement des agences de renseignement aura très probablement peu d’impact réel sur la manière de procéder.

Changement de discours 

Le gouvernement américain a publié hier sur le site de la Maison Blanche un mémorandum sur la mission de ce groupe particulier. Problème : la description qui en est faite est en plusieurs points différente de celle faite par Barack Obama vendredi dernier. Par exemple, le président soulignait la semaine dernière qu’il était nécessaire d’obtenir des points de vue d’experts extérieurs et surtout indépendants. Cette partie n’existe plus dans le mémorandum.

 

Plus significatif encore, le périmètre de la mission semble différent. Obama abordait ainsi vendredi la nécessité pour le gouvernement et le monde du renseignement de garder la confiance du peuple américain, et surtout de vérifier qu’aucun abus n’était commis dans le domaine de la vie privée. Dans le mémorandum, il n’est surtout question que d’aspects techniques : « à la lumière des avancés dans les technologies des télécommunications », le groupe devra déterminer si l’utilisation des capacités de collecte de données est « optimale ». À la fin d’une première période de soixante jours, les experts devront rendre un rapport préliminaire. Il est toujours précisé que d’autres éléments seront à prendre en considération, tels que le risque de fuites accidentelles ainsi que la confiance du public, qui paraît dès lors secondaire.

James Clapper, qui avait ouvertement menti au Congrès, dirigera le groupe 

Mais qui choisira les fameux experts ? À qui devront-ils rendre des comptes ? La réponse à ces deux questions est la même : James Clapper. Il s’agit ni plus ni plus que du directeur national du renseignement. Autrement dit, c’est le monde du renseignement qui va directement choisir les experts qui vont en examiner le fonctionnement. Les rapports seront à remis à Clapper, qui lui-même ne rend compte qu’au président américain.

 

Mais, comme le pointe le Washington Post, cette manière de procéder entache sérieusement la crédibilité d’autocritique qui semblait avoir été promise par Barack Obama. Dans la ligne de mire du journal américain, la nomination de James Clapper lui-même. Le directeur, face au Congrès américain, avait été interrogé sur la collecte de données des citoyens américains par la NSA. Il avait certifié que tel n’était pas le cas, mais avait dû plus tard admettre que sa réponse était erronée quand d’autres révélations étaient parues.

 

Il n’est donc clairement pas certain que Barack Obama puisse réussir dans sa dernière mission : restaurer la confiance du peuple américain. Et si cette dernière est sérieusement ébranlée, la situation internationale n’est pas non plus au beau fixe. Les relations sont tendues avec la Russie depuis que l'ex-URSS a accordé un asile politique temporaire d'un an à Edward Snowden. Celles avec l’Europe sont floues et ambiguës, en pleines négociations sur l’accord de libre-échange et alors que Der Spiegel a récemment révélé que certaines activités de l’UE étaient espionnées par la NSA.

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