136 ans de prison : voilà la peine maximale que pourrait avoir à purger Bradley Manning, le soldat américain ayant permis à WikiLeaks de révéler plusieurs milliers de câbles diplomatiques confidentiels en 2010. C'est en effet ce qui ressort du verdict rendu hier outre-Atlantique, l'homme ayant été reconnu coupable de 20 chefs d'accusation différents.
Crédits : Savebradley CC BY 2.0 - Flickr
Hier, au terme de près de deux mois d’audiences, la cour martiale de Fort George G. Meade a reconnu le soldat Bradley Manning coupable de 20 chefs d’inculpation, sur les 22 qui pesaient à son encontre, comme l’indique un compte-rendu (PDF) établi par la Freedom of the Press Foundation. Parmi toutes les accusations portées à l’égard de ce jeune homme - qui fêtera ses 26 ans en décembre prochain, deux n’ont donc pas été retenues : celle de « collusion avec l’ennemi », pour laquelle il risquait la prison à perpétuité, et celle d’ « espionnage », mais uniquement s’agissant d’une vidéo relative à une attaque militaire par avion en Afghanistan (il encourait ici 10 années de prison).
Bradley Manning reconnu coupable de 20 chefs d’accusation
La juge militaire Denise Lind a ainsi estimé que le prévenu avait commis différentes violations de la législation américaine relative à l'espionnage militaire et au vol de documents, notamment pour avoir dérobé puis transmis à WikiLeaks plusieurs centaines de milliers de documents classifiés. S’il ne risque plus la prison à vie, Bradley Manning pourrait quoi qu’il en soit rester derrière les barreaux jusqu’à la fin de ses jours, puisqu’il encourt désormais une peine maximale de 136 ans d’emprisonnement, comme le souligne ArsTechnica (voir le tableau ci-dessous).
Tableau via Alexa O'Brien.
Le procès du soldat Manning va aujourd’hui entrer dans une seconde phase, à l’issue de laquelle sera décidée la peine infligée à l’encontre du coupable. De nouvelles audiences débuteront effectivement dès ce matin aux États-Unis, et devraient se poursuivre durant tout le mois d’août. L’on connaîtra alors le sort qui sera réservé au garçon.
Projecteurs sur la protection des lanceurs d’alertes
Suivi de près quelques semaines après qu’Edward Snowden ait permis différentes révélations liées notamment au programme de surveillance Prism, le procès de Bradley Manning a d’ores et déjà suscité de nombreuses réactions. Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, s’est ainsi élevé contre ce « dangereux précédent » illustrant selon lui l’extrémisme des États-Unis en matière de sécurité nationale. « L’administration [Obama] tente de dissuader et de réduire au silence les lanceurs d’alertes, mais aussi de réduire la liberté de la presse » a-t-il ainsi déclaré. Un son de cloche similaire a également été donné du côté de l’association américaine pour les libertés civiles (ACLU), pour qui il est clair que le gouvernement américain cherche avec ce procès à « intimider n’importe qui pourrait révéler des informations importantes ».
Pour Reporters Sans Frontières, il s’agit là d’un verdict « dangereux », mais aussi « redoutable pour le journalisme d’investigation et ses sources ». L’association ajoute qu’Edward Snowden aurait par conséquent « toutes les raisons de craindre des mesures de persécution, au sens donné à ce terme par la Convention de Genève, en cas de retour aux États-Unis ».