Alors que l’utilisation du libre au sein des écoles, collèges et lycées a agité les débats parlementaires au cours des derniers mois, le ministère de l’Éducation nationale vient de lever un voile - partiel - sur ses dépenses en logiciels propriétaires et libres, comme l’avait demandé la députée Isabelle Attard.
Progressivement, depuis plusieurs semaines, les différents membres du gouvernement dévoilent de manière plus ou moins détaillée quelles sont les dépenses logicielles de leurs ministères respectifs (voir notre récapitulatif en fin d’article). Cet exercice n’est cependant pas véritablement volontaire, puisqu’il correspond en fait à une demande formulée par la députée écologiste Isabelle Attard au mois de mai. Au travers d’une série de 37 questions écrites, l’élue avait effectivement invité chaque ministre à préciser de quelle manière il avait mis en œuvre la circulaire du Premier ministre relatif à l’usage du libre dans l’administration.
Aujourd’hui, une nouvelle réponse vient d’être publiée au Journal Officiel, et non pas des moindres, puisqu’il s’agit de celle du ministère de l’Éducation nationale. L’on apprend ainsi que suite à la circulaire signée par Jean-Marc Ayrault l’année dernière, la Rue de Grenelle a fixé des orientations de travail en trois temps : « redéfinir la politique du ministère face au logiciel libre, dresser un état des lieux des composants, licences, coûts et élaborer une cible et une trajectoire pour y parvenir ». Ce projet est inscrit dans une feuille de route qui s’étend sur la période 2013-2015.
L’Éducation nationale met en avant ses efforts en faveur du libre
Sans s’étendre davantage sur la suite des choses, le ministère de l’Éducation nationale regarde surtout dans le rétroviseur, mettant en avant ses efforts passés en la matière. « Avant même la publication de la circulaire précitée du Premier Ministre, des actions de migrations de logiciel propriétaire vers les outils du libre avaient été engagées dans les équipes en charge de l'ingénierie logicielle des produits nationaux (déployés dans tout le ministère, administration centrale, services déconcentrés, établissements publics et écoles) ». Vincent Peillon assure dans sa réponse que ces actions se poursuivent dans le cadre de la nouvelle feuille de route.
S’en suivent ensuite de nombreux exemples censés illustrer ces efforts :
- « Courant 2011, le ministère a lancé des expérimentations avec un outil du monde libre, la suite Squash (promue par la société Hénix), expérimentations qui se sont montrées concluantes. En janvier 2012, le comité de pilotage « qualification » a statué sur l'abandon progressif de l'outil HP au profit de la suite libre Squash. Deux marchés, formation et accompagnement des équipes, ont été lancés et notifiés début 2013 afin de mettre en oeuvre cette migration. »
- « La suite bureautique OpenOffice et maintenant la suite bureautique LibreOffice sont largement utilisées par le corps enseignant comme un outil de travail partagé avec les élèves. »
- « Dans le cadre de la promotion des outils du libre en académie, 23 000 serveurs EOLE ont d'ores et déjà été déployés au sein des établissements scolaires. EOLE est un projet collaboratif fondé sur la philosophie du logiciel libre « UBUNTU » permettant d'installer des serveurs dédiés (pare-feu, serveur de fichier administratif ou pédagogique, VPN, client-léger, etc). »
- « Les analystes ont été équipés fin 2008 de l'outil propriétaire d'IBM (RSA) ; le ministère a acquis 85 licences dans le cadre d'un contrat de 3 ans. Fin 2012, le ministère a fait le choix de migrer vers les solutions du libre et n'a pas renouvelé le marché de maintenance avec IBM. »
- « Depuis une dizaine d'année, le ministère de l'éducation nationale a choisi de déployer ses grands projets nationaux basés sur les briques logicielles du libre : plus de 4 000 serveurs basés sur le système d'exploitation « Red hat » (distribution de Linux) sont déjà déployés dans les rectorats et des composants techniques Open source sont utilisés pour les infrastructures du ministère de l'éducation nationale et des rectorats. »
- « La solution d'inventaire de parc « OCS Inventory » (Open computers ans Software Inventory Next Generation est un outil d'inventaire de parc informatique) et la solution de gestion de parc « GLPI » (logiciel libre de gestion de parc informatique) sont déployées dans la moitié des académies. La plate-forme de formation en ligne « Pairform@nce » est une plateforme qui est basée sur la solution libre Moodle et développée par la DGESCO. »
Fleur Pellerin et Vincent Peillon, en juin 2013. Crédits : Education nationale, via Dailymotion.
4,27 millions d’euros en 2012, dont 220 000 euros pour le libre
Enfin, la Rue de Grenelle donne quelques chiffres. Le ministère de l’Éducation nationale affirme effectivement avoir dépensé 4,27 millions d’euros en matière d’achat de logiciels en 2012, dont 220 000 euros en prestations de support aux logiciels libres. Il est toutefois précisé que ces montants constituent une partie des achats pris en charge par l'administration centrale du ministère de l’Éducation nationale dans le cadre de la mutualisation des achats.
Pour l’année 2013, 2,2 millions d'euros de dépenses ont été prévues, dont 350 000 euros pour les prestations de support aux logiciels libres. « À cela s'ajouteront les dépenses de prestations de support aux logiciels libres relatives au prochain marché subséquent (en cours d'élaboration) de l'accord-cadre interministériel du service des achats de l'État » ajoute Vincent Peillon. Le mouvement général semble donc à la baisse des dépenses, sauf s'agissant du libre. Il est quoi qu'il en soit dommage que le ministère de l’Éducation nationale n’ait pas détaillé ces montants sur la période 2008-2012, comme le réclamait Isabelle Attard.
Tableaux PC INpact - En euros.
En plus de ce récapitulatif par ministères (ci-dessus), voici une évaluation totale, tous ministères confondus, fournie par le ministère de la Réforme de l'Etat :
Egalement en euros.