Les rapports sur la copie privée encore et toujours inaccessibles

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Le ministère de la Culture ne nous a toujours pas permis d’accéder aux rapports décrivant les projets financés par les 25 % de la copie privée. Un petit bilan d’étapes sur fond d'open data contrarié.

En mai 2013, nous avons sollicité du ministère de la Culture l’accès à des rapports décrivant l’affectation des 25 % de la copie privée. Chaque année, sur les quelque 200 millions d’euros collectés, 50 millions sont conservés par les sociétés de gestion collective. Sous l’aval de la loi, ces sociétés de perception et de répartition des droits (SPRD) peuvent avec cette caisse financer l’action culturelle, ou notamment des actions de défense comme des procès en contrefaçon. Ce 11 juillet, la Cour de Justice de l’Union Européenne a pleinement validé ce dispositif, à condition cependant qu’il n’entraîne pas de discrimination par exemple entre les auteurs nationaux et les auteurs étrangers.

 

Pour rendre des comptes à l'État, les sociétés de gestion comme la SACEM, remettent un rapport annuel au ministère de la Culture. Il détaille l’affectation de ces 50 millions d’euros butinés sur les supports vierges (téléphone, clef USB, disque dur externe, tablette, box, DVD vierges, etc.). Tant de dizaines de milliers d’euros ici, tant d’autres là, etc. Problème, ces rapports sont introuvables sur le site du ministère, ou celui de la Commission des affaires culturelles au Sénat ou à l’Assemblée nationale. Et pour cause : ils ne sont pas publiés.

 

Pas publié, mais pas secret

Après une vaine demande de communication auprès de la Rue de Valois, nous avons finalement obtenu gain de cause devant la Commission d’accès aux documents administratifs : bien que non publiés, ces rapports ne sont pas secrets. Ce sont « des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande » dans le jargon.

 

 

CADA copie privée ministère de la Culture

 

Le 25 juin 2012, le ministère de la Culture nous a finalement accordé un feu vert pâle. Ces documents sont bien accessibles, concèdent les services d’Aurélie Filippetti… mais seulement sur place. Pourquoi ? Tout simplement « en raison de leur volume » regrette la Rue de Valois qui ne reçoit donc que des versions papier des SPRD. Sauf s’ils sont rédigés au stylo et à la règle, les fichiers de ces rapports existent pourtant, mais ils sont retenus miraculeusement en amont. On voudrait organiser l’opacité, qu’on ne s’y prendrait pas autrement, diront les mauvaises langues.

 

copie privée

 

Suite à notre demande, « plusieurs créneaux » devraient nous être proposés pour consulter ces pièces, dans des « horaires raisonnables ». C’est ce que nous a encore précisé le ministère début juillet, prétextant que ces données doivent être « compilées », ces pièces étant enfouies quelque part « aux archives ». Sans doute dans les mains d'un stagiaire léthargique. Car depuis, aucune nouvelle.

La prise de photo peut être interdite

Si le ministère nous ouvre un jour ses portes, une des solutions serait évidemment de prendre des photos compulsives de ces pages incopiables. Mais rien n’est bien sûr ! Sur le site de la CADA, on apprend en effet qu’« une telle faculté n’est ni prévue, ni exclue par la loi du 17 juillet 1978 » sur l’accès aux documents administratifs. Du coup, « l’administration n’est donc pas tenue d’y faire droit. »

 

Il existe cependant une autre voie que nous allons explorer. Selon l’article 4 de la loi du 17 juillet 1978, l’accès aux documents peut se faire au choix du demandeur  

- par consultation gratuite sur place,

- par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique,

- ou par remise ou envoi de copies soit sur papier, soit sur support informatique identique à celui utilisé par l’administration ou compatible avec celui-ci, aux frais du demandeur, sans que ces frais puissent excéder le coût de cette reproduction.

Des frais encadrés, le libre choix du citoyen

Cet accès se fait en principe au choix du demandeur, non du ministère. La CADA concède que « lorsque la demande porte sur un nombre de documents particulièrement important, l’administration est en droit de proposer une consultation sur place suivie de la délivrance de photocopies des éléments qui auront été sélectionnés à cette occasion », cependant, « les précautions prises par l’administration ne doivent pas entraver la liberté d’accès. ». Nous allons donc poursuivre notre procédure et solliciter officiellement une copie par mail ou par reproduction des documents sur un CD-ROM, tout comme un devis pour les reproductions papier.

 

Un dernier détail : un arrêté du 2 octobre 2001 a fixé dans le marbre ces coûts. Outre les frais postaux, le tarif ne peut dépasser 0,18 euro par page de format A 4 en impression noir et blanc, 1,83 euro pour une disquette et 2,75 euros pour un cédérom. Un décret spécifie par ailleurs qu’on ne peut mettre à la charge du citoyen, « les frais de personnel résultant du temps consacré à la recherche, à la reproduction et à l'envoi du document. »

Open data, open dada

En 2013, il reste pour le moins étrange qu’un citoyen n’a pas un accès naturel à ces pièces qui décrivent pourtant l’affectation de dizaines de millions d’euros chaque année. Sur le site du ministère de la Culture, on vante malgré tout la «stratégie numérique de diffusion et de réutilisation des données publiques numériques du secteur culturel ». 

 

On y trouve même un joli guide en PDF sur l’ouverture des données publiques issues du secteur culturel, noircit de belles phrases accessibles par simple clic : « il est impératif que l'ensemble des établissements, organismes ou services culturels inscrivent leur action dans une démarche analytique de clarification des différentes données qu'ils détiennent et/ou produisent afin de permettre de créer un véritable mouvement d'open data culturel. »  Voilà 84 jours que nous attendons que ce mouvement se mette en place pour les rapports sur la copie privée.

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