Le transfert clef en main des pouvoirs de la Hadopi au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) suscite des critiques de plus en plus frontales. En témoigne cette tribune de Laure de La Raudière, où la députée UMP dénonce une « mascarade. »
Après avoir annoncé la mort de la Hadopi puis supprimé dans un texte réglementaire la suspension de l’accès à Internet, Aurélie Filippetti glissait ce 9 juillet que « la réponse graduée, sous sa forme aménagée résultant du nouveau décret, sera transférée au CSA et l’Hadopi sera supprimée. » Un joli enfumage, commentions-nous. Changer l’habit du moine n’a aucune importance poursuit aujourd’hui en substance Laure de La Raudière.
Dans une tribune au Plus du Nouvel Obs, la députée esquisse ce sombre avenir : « si le gouvernement persiste dans la proposition phare du rapport Lescure, il conservera finalement le pire d’Hadopi, la riposte graduée, même débarrassée de sa peine symbolique de la coupure d’accès. En parfaite contradiction avec ses positions de l’époque. Le volet répressif de la loi Hadopi, honni hier, est adulé aujourd’hui. Belle constance de convictions ! »
En décembre 2012, dans une interview dans nos colonnes, la même députée réclamait elle aussi la suppression de la suspension d’accès. Elle demandait en outre à ce que cette mission Lescure fasse preuve « de véritable indépendance », sachant que dans ce domaine « il y a des a priori et des lobbys extrêmement puissants, qui empêchent en fait la prise en compte des réformes nécessaires par rapport aux changements qu’entrainent Internet et le numérique. » Elle craignait par-dessus tout un retour de la mission Olivennes, celle qui enfanta de Hadopi. « Si c’est pour nous ressortir les propositions que nous avait fait Denis Olivennes, même un petit peu modernisé, ça ne vaut pas le coup. »
Une escroquerie intellectuelle, dangeureuse pour la création
Dans sa tribune, l'élue fustige par dessus tout la volonté de faire du CSA le gendarme de l'internet. « Transférer la Hadopi au CSA n’est pas l’acte II de l’exception culturelle, c’est une escroquerie intellectuelle, dangereuse pour la création à l’heure d’internet » estime-t-elle. La parlementaire promet du coup de se battre « bec et ongles » contre le projet de faire de l'institution le futur régulateur du Net.
Elle réclame aussi que soit stoppée « cette inflation législative sur des tentatives de contrôle de l’internet, qui ne produit que des résultats destructeurs pour l’économie numérique et dénués de toute vision d’avenir » et que soit remis enfin en question « l’élargissement permanent des compétences de ces autorités indépendantes qui y gagnent, par-là même, leur survie » puisque l’audiovisuel est désormais noyé dans le numérique. « Le CSA a suffisamment de travail avec ses actuelles compétences sur l’audiovisuel, qu’il propose donc au gouvernement et au parlement de simplifier l’encadrement réglementaire de sa clientèle traditionnelle pour que celle-ci puisse affronter les nouveaux enjeux numériques au lieu de caresser l’illusion dangereuse d’une régulation étatique de l’internet ! »