Lors d'une entrevue accordée à plusieurs journalistes européens sélectionnés, dont nos confrères britanniques du Guardian, Stephen Elop, le patron de Nokia, a concédé que le choix d'Android a été rapidement balayé de la main pour plusieurs raisons. Celle de voir un certain acteur écraser le marché, prévision qui s'est effectivement réalisée, était l'une des raisons principales du choix d'éviter Android.
Le futur Lumia 1020.
Un choix rapide à faire
Arrivé en septembre 2010 chez Nokia, l'ex-président Business de Microsoft a rapidement su s'imposer au sein de l'entreprise finlandaise. Dès le mois de février 2011, le nouveau PDG tira la sonnette d'alarme dans une lettre adressée à tous ses employés, notamment du côté des smartphones : « Nos concurrents ne sont pas en train de prendre nos parts de marché avec des appareils, ils prennent nos parts de marché avec tout un écosystème. Cela signifie que nous allons devoir décider comment nous allons soit construire, soit catalyser ou rejoindre un écosystème. »
Cette partie fut primordiale pour l'avenir de Nokia. Ici, il était donc question de revoir la politique de la firme européenne au niveau du système d'exploitation notamment. Fallait-il revoir Symbian, exploiter MeeGo ou utiliser un OS mobile concurrent ? Si iOS et BlackBerry OS n'étaient pas envisageables, il restait comme solution Android ou Windows Phone. Si le système de Google à l'époque montrait déjà des signes de montée en puissance évidente, celui de Microsoft, lui, venait de renaître des cendres de Windows Mobile.
Lancé fin 2010, Windows Phone 7 était exploité par un nombre limité de partenaires (Dell, HTC, LG et Samsung principalement) et était loin d'être aussi concurrentiel qu'Android. Quelques jours à peine après son mémo envoyé aux employés, Stephen Elop officialisa d'ailleurs son partenariat avec Microsoft, preuve que la réflexion était déjà dans les principales têtes de Nokia depuis un long moment déjà.
Le problème Samsung
Mais si Stephen Elop a semé un certain doute en janvier dernier, Nokia compte bien rester exclusivement sous Windows Phone pour le moment. Ses récents propos confiés à certains journalistes vont d'ailleurs dans ce sens lorsqu'il explique précisément pourquoi sa société a fait le choix de l'OS de Microsoft, ceci au dépend d'Android par exemple :
« Ce dont nous étions inquiets il y a quelques années était le risque très élevé qu'un fabricant de matériel puisse dominer Android. Nous nous doutions déjà de qui il pouvait s'agir, en raison de ses ressources disponibles, de son intégration verticale, et nous acceptions le fait que nous étions très en retard dans la prise de cette décision (NDLR : de choisir Android). Maintenant, si l'on revient à aujourd'hui et examinons l'écosystème Android, il y a beaucoup de bons appareils fabriqués par de nombreuses et différentes entreprises, mais une seule société est essentiellement devenue le principal acteur. »
Cet acteur, c'est bien évidemment Samsung. Il y a deux ou trois ans, alors que le poids écrasant du Sud-Coréen était bien moins flagrant (le Galaxy S est sorti en juin 2010, et le S2 en mai/juin 2011), Nokia pressentait donc déjà la main-mise de Samsung sur le marché Android. Si l'importance de la firme asiatique a profité à Android dans son ensemble, lui permettant de capter entre 60 et 90 % du marché des smartphones selon les pays, pour la concurrence, la situation est difficile, tant l'ombre de Samsung est gigantesque. Et si l'on comprend bien les propos de Stefen Elop : être dans l'ombre du Sud-Coréen n'intéressait en aucun cas Nokia.
En prenant en compte une telle situation si prévisible (à en croire Elop), investir dans Windows Phone était donc la solution la plus sensée sur le moment. Pour le moment, il est encore difficile de savoir si Nokia a fait le bon choix. D'un côté, le constructeur domine largement les ventes de Windows Phone, et ces dernières ont surpassé celles des BlackBerry, lui permettant de devenir le challenger numéro un d'Android et iOS. Et dans certains pays, Windows Phone occuperait des parts de marché non négligeables. Mais ces points positifs doivent aussi être atténués par des ventes globales encore confidentielles par rapport aux iPhone et aux Androphones. Demain, Nokia livrera les résultats de son deuxième trimestre 2013. De quoi nous permettre de savoir si la société a fait le bon choix.