Twitter vient finalement de céder aux demandes de différentes associations, dont l’Union des étudiants juifs de France, qui réclamaient d’une part des données d’identification de certains de ses utilisateurs, et d’autre part d’une mise à jour de son système de signalement des tweets considérés comme illicites. L’entreprise américaine l’a en effet affirmé par communiqué. Ces engagements ont ensuite été confirmés à PC INpact par l’UEJF.
Ce qui s’annonçait comme un très long feuilleton judiciaire vient finalement de se terminer aujourd’hui. Twitter a en effet annoncé ce matin par voix de communiqué qu’il allait transmettre, comme lui l’avait ordonné la justice française en janvier dernier, « les données susceptibles de permettre l’identification de certains [de ses] utilisateurs ». Ces derniers sont accusés par plusieurs associations d’avoir tenu l’année dernière des propos racistes et antisémites sur le célèbre réseau social, notamment au détour des hashtags #UnBonJuif et #UnJuifMort. Les données en question seront transmises au Parquet du tribunal de grande instance de Paris, précise Twitter dans son communiqué.
Un nouveau dispositif de signalement mis en place « très prochainement »
Autre point sur lequel le site de micro-blogging s’est résolu à lâcher du lest : son dispositif de signalement des tweets considérés comme illicites. La justice l’avait ici aussi enjoint à mettre en place « un dispositif facilement accessible et visible permettant à toute personne de porter à sa connaissance des contenus illicites, tombant notamment sous le coup de l’apologie des crimes contre l’humanité et de l’incitation à la haine raciale ». Twitter affirme ainsi dans un second temps avoir convenu, en accord avec l’UEJF, de continuer à lutter activement contre le racisme et l’antisémitisme, « par exemple en prenant des mesures améliorant l’accessibilité du dispositif de signalement des tweets illicites ».
Jonathan Hayoun, président de l’UEJF, a donné plus de détails à PC INpact s’agissant des évolutions à attendre à propos de cet outil de notification. « C’est un dispositif de signalement général qui va être mis en place très prochainement, un peu sur le mode de Facebook, où l’on va prendre en compte les propos racistes, antisémites, homophobes... » explique-t-il. L’intéressé insiste au passage sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un outil propre à son association. « Ce n’est pas un statut d’observateur privilégié comme ça a été le cas avec des associations telles que SOS Homophobie. C’est destiné à l’ensemble des utilisateurs » précise-t-il. L’idée est de respecter la LCEN, pour ne pas avoir un système de signalement à deux vitesses comme ça peut être le cas aujourd’hui, avec les résultats que nous décrivions il y a peu.
Fin des poursuites pénales engagées en parallèle par l'UEJF
« Pour nous c’est une belle victoire » affirme aujourd’hui Jonathan Hayoun. Il faut dire que la partie n’était pas gagnée d’avance. En dépit de l’ordonnance de référé prise en janvier dernier par la vice-présidente du tribunal de grande instance de Paris, Twitter s’était lancé dans une stratégie visant à jouer la montre. L’UEJF avait cependant obtenu la radiation de l’appel interjeté par le réseau social, en raison de la non-exécution de la décision contestée.
Entre-temps, l’UEJF avait dégainé une nouvelle arme pour contraindre Twitter à respecter l’ordonnance de référé de janvier 2013. En mars, elle portait plainte au pénal contre l’entreprise américaine et son président, Dick Costolo, pour non-respect d’une décision de justice. L’association réclamait au passage 38,5 millions d'euros, qu'elle s'engageait à reverser au Mémorial de la Shoah. Aujourd’hui, l’ensemble de ces fronts judiciaires est éteint suite à l’entente trouvée entre l’UEJF et le site de micro-blogging. « On renonce à toutes nos poursuites » nous a ainsi confirmé Jonathan Hayoun.
La prochaine étape, les poursuites individuelles ?
L’affaire n’est cependant pas complètement terminée. À partir des adresses IP fournies par Twitter, les associations pourront lancer une procédure auprès des FAI, afin d’obtenir les coordonnées personnelles des auteurs des messages litigieux. Il s’agit d’une étape nécessaire vers l’ouverture de nouvelles poursuites, cette fois en direction de chacun des utilisateurs visés.
« Internet n'est pas une zone de non-droit »
En attendant, du côté du gouvernement, on ne cache pas sa satisfaction. « Twitter se conforme enfin à la décision de la Justice. Internet n'est pas une zone de non-droit » a par exemple réagi Najat Vallaud-Belkacem, à l’origine des discussions ayant conduit certaines associations à avoir un compte de signalement prioritaire. « Twitter coopère avec la Justice. Fin de l'impunité pour les auteurs de messages racistes et antisémites, sans remise en cause de l'anonymat » déclare de son côté Fleur Pellerin, ministre déléguée à l’Économie numérique, également sur Twitter. La nouvelle a d’ailleurs dû très probablement faire plaisir au plus haut sommet de l’État, François Hollande ayant affirmé en mars dernier qu’il voulait « contraindre » les réseaux sociaux « à fournir ces noms pour qu’il y ait dissuasion et répression ». Le président de la République l’avait ainsi affirmé : « L’espace de liberté qu’est Internet ne doit en aucun cas être utilisé à des fins de propagande de haine. »