Le gouvernement prépare actuellement son « projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique ». Selon les informations de Next INpact, le gouvernement veut revoir totalement les règles et passer par un blocage sans juge. Ceci alors que la justice, saisie par l’Arcom, devrait rendre sa première décision de blocage le 7 juillet prochain.
Comme annoncé, le gouvernement va porter un projet de loi pour intégrer les obligations du DMA-DSA. Présenté début mai, il sera débattu au Parlement d'ici l'été. L’avant-projet du texte est actuellement soumis à différentes consultations obligatoires, et doit, notamment, passer par l’avis du Conseil d’État.
Vers une modification en profondeur d’une loi de 2020
Selon les informations de Next INpact, un des articles du projet devrait modifier totalement le dispositif qui vise à empêcher les mineurs d’accéder à des contenus pornographiques. Un dispositif pourtant récent, puisqu’il a été créé par la loi du 30 juillet 2020.
Actuellement, ce mécanisme nécessite une première mise en demeure de l’Arcom : l’autorité indépendante enjoint les éditeurs à muscler les conditions d’accès à leur site. Si, au bout de quinze jours, l’injonction est infructueuse, l’Arcom saisit le tribunal judiciaire de Paris qui, après une audience contradictoire, prononce le blocage ou le déréférencement du site.
Pleins pouvoirs à l’Arcom
Dans la nouvelle procédure, il n’y aurait plus de décision judiciaire : à la place, la décision de blocage et de déréférencement administratif serait décidée directement par l’Arcom. Sa décision interviendrait après une injonction de quinze jours. Des injonctions qui s’adresseraient tant aux sites pornos, qu’aux fournisseurs d’accès internet (pour le blocage) ou aux moteurs de recherche (pour le déréférencement). L’Arcom pourrait par ailleurs prononcer des amendes administratives, pouvant aller jusqu’à 500 000 euros ou 6 % du chiffre d’affaires mondial.
La décision d’un juge judiciaire ne sera plus un préalable aux blocages. Mais comme pour toute décision administrative, il restera possible de saisir le juge administratif une fois la décision prise. Les propriétaires des sites pornos mis en demeure, les FAI sollicités pour bloquer l’accès à ces sites, ainsi que les moteurs de recherche, pourront demander l’annulation de la décision de l’Arcom dans les cinq jours. Ce recours étant suspensif, le tribunal aurait ensuite deux semaines pour statuer, avec un délai d’appel de dix jours.
C’est une modification profonde du cadre légal, alors même que la procédure de 2020 par le tribunal judiciaire est actuellement mise en œuvre : saisie par trois associations, l’Arcom a demandé le blocage de « Pornhub », « Tukif », « Xhamster », « Xnxx » et « Xvideos ».
Elle a ensuite saisi la justice concernant l’éditeur de « RedTube ». De leur côté, les éditeurs se plaignent de l’absence de solutions techniques à leur disposition pour vérifier l’âge des internautes. Les expérimentations n’ont été lancées qu’en mars.
Une première étape ?
Par ailleurs, la vérification à l’entrée des sites pornos pourrait n’être qu’une première étape. Une fois les dispositifs techniques et juridiques solidement mis en place, ils devraient être progressivement étendus à d’autres types de contenus (réseaux sociaux, vente en ligne).
Une nouvelle modification de la loi, moins de trois ans après son vote, montre que sur ce sujet, les politiques veulent avancer vite. Quitte, parfois, à brûler les étapes.