Aux prises avec une série de plaintes, Twitter disparaît en tant qu’entreprise

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Economie 6 min
Aux prises avec une série de plaintes, Twitter disparaît en tant qu’entreprise
Crédits : Marisa Allegra Williams

Twitter a été fusionnée avec une nouvelle entité nommée X Corporation. Si une évolution de ce type semblait prévue depuis la préparation du rachat par Elon Musk, l'opération a été faite sous de nouvelles modalités qui posent question : serait-ce la première pierre de la création d'une application « universelle » ?

Twitter Inc. n’existe plus en tant qu’entreprise. C’est ce qu’a réalisé Slate en détaillant les documents administratifs que la société doit fournir au tribunal en attendant le règlement de la plainte qu’a déposé contre elle l’activiste d’extrême-droite Laura Loomer (plainte qui concerne un compte bloqué).

Parmi la documentation soumise le 4 avril, le média américain a découvert la mention « Twitter, Inc. a été fusionné avec X Corp. et n’existe plus ». C’est donc le successeur de Twitter Inc, X Holdings Corporation, qui se retrouve face à Laura Loomer en justice.

Disparition des entités créées pour racheter Twitter

En avril 2022, trois entreprises avaient été enregistrées par Elon Musk dans l’état du Delaware : X Holdings I, II et III. Les entités devaient faciliter le rachat de Twitter, transaction dont la documentation indique que Twitter devait être fusionné avec X Holdings II, mais garderait son nom et sa structure générale.

X Holdings I devait ensuite servir d’entité mère et X Holdings III absorber les 13 milliards de dollars de prêt fournis à Musk par un groupe de grands noms bancaires, sous réserve que celui-ci aide à payer les 44 milliards de dollars nécessaires à l’achat du réseau social. Sauf que les documents prévoyaient que X Holdings II cesserait d’exister une fois la fusion réalisée : à terme, X Holdings I devait détenir Twitter Inc., tandis qu’X Holdings III gèrerait l’argent.

La documentation transmise par l’entreprise au tribunal prouve que les choses ont changé. Non seulement Twitter Inc. n’existe plus en tant que tel dans l’état de Delaware, mais Elon Musk a créé deux autres sociétés, dans le Nevada cette fois-ci, sous les noms de X Holdings Corp. et X Corp. La première a absorbé X Holdings I et la seconde a absorbé X Holdings III, transférant les différentes entités sous la juridiction du Nevada.

Un pas vers le WeChat version Musk ?

Qu’est-ce que tout cela signifie ? Le X, d’abord, est un classique de l’univers Musk. Il a cofondé la banque X.com en 1999 avant que celle-ci ne soit rachetée par PayPal, puis lancé Space X, la model X chez Tesla, ou encore le « Projet X », nom sous lequel le prêt de 13 milliards de dollars nécessaire au rachat de Twitter était enregistré auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine.

À partir de là, Slate émet deux hypothèses : celle d’une application contenant « tout » (« everything app »). Ce projet de produit universel a été évoqué à plusieurs reprises par l’entrepreneur, celui-ci qualifiant même le rachat de Twitter comme d’un « accélérateur vers la création de X », une application qu'il rêve universelle.

En mars, il a déclaré vouloir faire de cette application, dont l’idée est clairement inspirée par le fonctionnement du WeChat de Tencent, « la plus grosse institution financière du monde ». Lancé comme une application de messagerie texte et vocale, WeChat est désormais une « application lifestyle » dans laquelle il est aussi bien possible de converser que d’acheter des vêtements, jouer à des jeux-vidéo, commander à manger ou préparer un voyage, transport, hébergements et activités compris.

Autre option, à laquelle Elon Musk avait répondu « bonne idée » lorsqu’elle avait été formulée par un twitto : celle de créer une entreprise unique pour réunir toutes les activités de l’entrepreneur, qui concernent aussi bien la construction automobile (Tesla) que le vol spatial (Space X), la construction de tunnels (the Boring Company), les neurotechnologies (Neuralink) ou, donc, la gestion d’un réseau social.

Twitter dans la tourmente judiciaire

Quoi qu'il en soit, outre un tweet cryptique, ces évolutions administratives n’ont pour le moment pas été annoncées publiquement – et n’ont pas même été répercutées, à l’heure de publier, dans les multiples affaires que doit gérer Twitter. Or le réseau social est en butte à une série d’affaires judiciaires.

Twitter est la cible de multiples plaintes, rappelle TechCrunch, que celles-ci aient été déposées par d’anciens employés ou freelances au motif de licenciement et de fins de contrats trop brutales pour être légales, ou de fournisseurs cherchant à récupérer des impayés.

L’ancien CEO de Twitter Parag Agrawal, l’ancien directeur juridique Vijaya Gadde et l’ancien directeur financier Ned Segal poursuivent Twitter en justice pour non-remboursement de frais judiciaires. Au total, la plainte (.pdf) chiffre à plus d’un million de dollars le montant que la société devrait leur verser pour rembourser les frais juridiques avancés dans de multiples affaires défendues au titre de leurs anciennes fonctions.

Twitter est aussi poursuivi par les autorités allemandes pour manque de modération des discours de haine – un problème qui pourrait coûter jusqu’à 50 millions d’euros d’amende à la société, selon la NetzDG (Netzwerkdurchsetzungsgesetz, loi sur la mise en application du réseau) locale. Quant à l’Inde, elle est, elle aussi, en procès avec l’entreprise pour cause de suspicions de censure.

La quête du bon modèle d’affaire

Handicapé, aussi, par des bugs techniques – dont certains ont par exemple mené à la publication d’éléments théoriquement réservés aux usagers des Twitter Circles aux yeux du grand public –, Twitter a perdu 50 % de sa valeur depuis le rachat.

Elon Musk reste donc à la recherche du modèle économique qui rendra l’application profitable, quête émaillée de passes d’armes plus ou moins importantes.

Le New-York Times a par exemple clairement déclaré qu’il ne paierait pas l’abonnement pour Twitter Blue que Musk envisageait de lancer. En représailles, celui-ci a fait enlever le coche jaune qui signifiait que le compte de l’institution médiatique était vérifié – une méthode, parmi d’autres, qui permet au public de repérer plus facilement les comptes légitimes des faux.

Elon Musk s’en est aussi pris à Substack, quelques jours après que le service d’hébergement et d’envoi de newsletter ait annoncé la création de Notes, un service qui ressemble beaucoup à Twitter. Les auteurs de newsletter ont ainsi découvert un matin qu’ils ne pouvaient plus poster de liens vers leurs articles sur le réseau à l'oiseau bleu – la fonctionnalité a été réactivée depuis.

Dans ce contexte, la perspective d’utiliser Twitter comme support à la création d’une application X, « universelle », semble cohérente avec la vision de Musk. En effet, celui-ci a déjà déclaré estimer qu’un tel projet pourrait faire grimper la valorisation de l’entreprise à 250 milliards de dollars (10 fois plus, donc, que son niveau actuel).

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