Usages numériques en France : comment ont évolué les habitudes avec la fin de la crise sanitaire ?

Usages numériques en France : comment ont évolué les habitudes avec la fin de la crise sanitaire ?

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Vincent Hermann

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Société numérique

13/04/2023 10 minutes
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Usages numériques en France : comment ont évolué les habitudes avec la fin de la crise sanitaire ?

L'Arcep et l'Arcom ont publié leur troisième édition du rapport sur les usages du numérique en France. Des évolutions d'autant plus intéressantes qu'elles prennent place sur la période allant de fin 2021 à fin 2022, donc en sortie de crise sanitaire. Dans ce contexte, les changements ne sont pas toujours où l'on imagine.

 

La fibre désormais majoritaire sur le très haut débit

C’est l’une des conséquences du plan France THD. Les déploiements de fibre ont fortement progressé en un an, tout comme le nombre de foyers abonnés. Les abonnements très haut débit (au moins 30 Mb/s) ont ainsi gagné 9 points en un an pour s’établir à 20,7 millions, représentant 65 % du cumul haut + très haut débit (31, 9 millions).

Sur ce dernier, 17,1 millions d’abonnements en fibre optique, représentant 54 % du total. La fibre est ainsi majoritaire en France depuis le troisième trimestre 2022, les autres abonnements THD (satellite, 4G/5G fixe…) ne concernant que 3,6 millions de foyers.

Autre progression notable, le nombre de locaux éligibles au très haut débit sur les 43,1 millions que l’on compte en France métropolitaine. De 32 millions en 2021, on est passé à 35,9 millions. La part du FttH (Fiber to the Home) est passée de 28,3 à 33,1 millions, réduisant sensiblement l’écart.

Le rythme des nouveaux abonnements à la fibre a été élevé : 3,7 millions en plus en un, pour un total de 17,1 millions, soit une hausse équivalente à celle constatée entre 2020 et 2021. Dans le même temps, la part des autres technologies continue de diminuer, mais de manière beaucoup plus lente : de 2,9 à 2,6 millions pour le VDSL2, et de 1,2 à 0,9 million pour le câble (terminaisons coaxiales). La grande majorité des nouveaux abonnements fibres se fait donc en remplacement de technologies plus anciennes (essentiellement ADSL) et sur les logements neufs.

Une forte progression des déploiements 5G

Les ouvertures commerciales de sites 5G ont fait un grand bond entre 2021 et 2022 : 35 500 nouveaux sites, soit une augmentation conséquente de 60 % en un an.

Actuellement, le taux d’utilisateurs de 4G atteint 84 % en France, totalisant 70 millions de cartes SIM. Ce chiffre ne tient que des usages mobiles. Les utilisateurs 5G totalisent 7 % des cartes SIM.

Le rapport donne également les débits moyens en téléchargement constatés sur la dernière année, à savoir 63 Mb/s pour la 4G et 94 Mb/s pour la 5G, soit un débit amélioré de 50 % environ.

Arcep 4G 5G

La France largement équipée en téléviseurs connectés

En 2021, le chiffre avait stagné, restant à 82 % de foyers équipés d’au moins un téléviseur connecté, donc en capacité d’accéder à des services en ligne. En 2022, le chiffre a grimpé à 84 %. Il est complété par un autre : 30 % des foyers sont équipés d’un boitier OTT (de type Apple TV, Chromecast, Fire TV Stick…), soit une augmentation de 3 points en un an.

84 % des foyers se servent également du décodeur TV fourni avec leur box pour regarder les contenus télévisés, là encore en progression de 2 points.

Parmi les plus gros usages réalisés à partir d’une TV connectée, on retrouve la télévision linéaire (classique) à 93 %, la TV de rattrapage à 89 %, les autres contenus vidéo à 78 %. 58 % des personnes s’en servent aussi pour accéder à des contenus sur un support de stockage externe, ou encore 51 % pour naviguer sur le web.

En ce qui concerne la radio, la totalité des foyers français disposent depuis fin 2021 d’au moins un équipement permettant d’y accéder. 15 % des personnes âgées d’au moins 13 ans ont un équipement compatible DAB+. Selon l’Arcep et l’Arcom, ce taux est amené à progresser avec l’accélération des déploiements, « en plus du montage obligatoire dans les véhicules neufs ».

Ordinateurs, IoT, enceintes connectées : les montagnes russes

L’usage quotidien de l’ordinateur avait fait un énorme bond entre 2019 et 2020, lors de la première année de crise sanitaire. Le chiffre était passé de 47 à 66 %, pouvant s’expliquer en partie par l’obligation de télétravail dans de nombreux cas. Ce chiffre est redescendu depuis à 62 %, mais reste important.

Dans le même temps, l’usage quotidien du téléphone mobile avait décru de 82 à 78 %, pour se stabiliser aujourd’hui à 75 %. Il reste cependant l’équipement le plus utilisé pour se connecter à Internet : 47 %, contre 39 % pour l’ordinateur, les tablettes étant loin derrière avec 5 %.

La tablette, justement, était passée de 21 à 26 % en 2020. Elle se situe aujourd’hui à 23 % d’utilisation quotidienne.

Dans le domaine des objets connectés, tous les secteurs sont à la hausse. Le taux d’équipement est ainsi passé de 22 à 24 % en santé, de 15 à 19 % en électroménager, de 14 à 21 % en sécurité, et de 13 à 17 % en domotique. Les intentions d’achats sont en hausse également, avec en moyenne 2 points de plus qu’en 2020.

Arcep IoT

Enfin, les enceintes connectées sont en forte hausse, avec 27 % des foyers équipés, chiffre en hausse de 7 points par rapport à 2020. Il existe cependant de fortes disparités selon les tranches d’âges. Par exemple, le bond le plus spectaculaire est réalisé chez les 18-24 ans, le taux d’équipement passant de 26 à 41 %. Dans le même intervalle, celui des 60 ans et plus est passé de 11 à 13 % seulement.

La population française surfe intensément

Plus de 9 personnes sur 10 sont des internautes, selon le rapport (92 %, chiffre stable par rapport à 2021). Et pour 82 % de la population, l’utilisation d’internet est quotidienne. C’est 4 points de plus qu’en 2019, mais 1 point de moins qu’en 2020, signe d’un léger relâchement après la grande vague numérique des confinements.

En revanche, l’évolution du trafic entrant chez les fournisseurs d’accès continue de rester forte. Fin 2021, ce trafic représentait un total de 36,5 Tb/s, en augmentation de 25 % sur un an. Le Top 5 des sources de ce trafic n’est guère étonnant : Netflix (presque 20 % du trafic à lui seul), Google, Akamai, Facebook et Amazon.

Assez mathématiquement, tous les usages en ligne progressent. 84 % des internautes ont acheté en ligne, une progression de 2 points face à 2021. Rapporté à la population totale, le score est de 76 %, stable sur un an. On est loin de la hausse subite de 10 points entre 2019 et 2020, mais il n’y a pas eu de reflux après coup. Autre chiffre intéressant, quasiment la moitié des clients de commerces en ligne commandent une fois par mois au moins.

Arcep Arcom usages numériques

Sans grande surprise, les services de communication progressent encore. 79 % des 12 ans et plus se servent ainsi d’applications spécifiques pour échanger des messages, plutôt que de passer par le bon vieux SMS. 52 % d’entre eux s’en servent tous les jours, soit une hausse de 9 points en un an. Petite surprise au contraire sur les appels téléphoniques : 69 % des 12 ans et plus se servent d’une application tierce, soit 4 points de plus en un an. Les plus fortes progressions viennent des utilisateurs de… plus de 40 ans !

Empreinte carbone : un peu de bon, beaucoup de pas terrible

On ne reviendra pas sur la situation générale, largement décrite dans le récent rapport commun Arcep-ADEME, qui donnait pour la première fois plusieurs trajectoires possibles en fonction de la quantité d’efforts investie.

En revanche, on note que les émissions de gaz à effet de serre des quatre opérateurs français ont diminué entre 2019 et 2020, confirmant une tendance déjà amorcée l’année précédente. En 2018, ces émissions s’étaient élevées à 381 000 tonnes équivalent CO2, avant de passer à 378 000 en 2019 puis 362 000 en 2020, soit une accélération de la baisse.

Le chiffre est intéressant en ce qu’il montre des efforts portant leurs fruits alors que les usages augmentent. Il est toutefois à relativiser, car la consommation électrique des réseaux fixes et mobiles augmente pour ces quatre opérateurs : 3 390 GWh en 2018, 3 573 en 2019 et 3 803 en 2020.

La situation du reconditionné sur les téléphones mobiles n’est pas brillante. Sur les 21,4 millions de téléphones vendus en France en 2020, seuls 2,8 millions étaient des reconditionnés, soit 13 % du total. Le reconditionné ne concerne que 2 % des ventes chez les opérateurs, mais 19 % chez les autres distributeurs.

Côté téléviseurs, ce n’est guère mieux. Le rapport pointe que 45 % des détenteurs gardent leur équipement moins de 4 ans, parmi lesquels 20 % le gardent moins de 2 ans. 47 % des personnes interrogées en ont changé quand l’ancien était encore utilisable. Un tiers l'a fait pour bénéficier d’une promotion, et un tiers pour monter en gamme. Le remplacement des téléviseurs a toujours de l’avenir, puisque l’on retrouve souvent la taille de la dalle et une meilleure qualité d’image comme moteurs.

Arcep téléviseurs conservation

En revanche, la situation évolue. 10 % des individus ont déclaré utiliser un téléviseur de seconde main en équipement principal. Les téléviseurs remplacés fonctionnant encore sont gardés dans 40 % des cas, donnés ou revendus à un particulier dans 36 % des cas, mais restent jetés à la déchetterie dans 7 % des cas, et même dans une poubelle classique dans 1 %.

VàDA : Netflix poursuit sa domination

Le nombre moyen d’utilisateurs quotidiens des services de vidéo à la demande par abonnement (VàDA) a repris sa croissance au deuxième semestre 2022, après avoir diminué au cours des 12 mois précédents. Le taux de pénétration est actuellement de 17,5 % chez les 15 ans et plus.

La domination de Netflix reste très forte, avec 59 % de parts de marché sur les VàDA au second semestre 2022 chez les 35-49 ans. Les suivants sont loin derrière : 16 % pour Prime, 11 % pour Disney+, 9 % pour les bouquets Canal+ et 6 % d’autres services. Chez les 15-24 ans, cette part grimpe même à 68 %, tandis que celle des bouquets Canal+ n’est plus que de 3 %.

Arcom streaming france

Selon l’Arcep et l’Arcom, les plus abonnés à ces services sont les moins de 40 ans et les CSP+, même si 51 % de l’ensemble des internautes consomment régulièrement ces contenus, qu’ils soient abonnés ou non. Il n’y a aucune différence marquée de consommation entre les hommes et les femmes, ou encore la région parisienne et la province. Dans le même temps, toutes les formes de piratage sont en baisse.

Dans ce domaine, c’est bien sûr l’Arcom qui communique, signalant par exemple que 40 % des personnes consommant illégalement des contenus sportifs ont été confrontés à un blocage au cours du premier semestre 2022. 27 % ont également déclaré avoir au moins une personne dans leur entourage ayant fait face à ce type de blocage.

Musique en ligne : le sacre de la formule par abonnement

En matière de streaming audio, l’abonnement reste roi. Il génère à lui seul 52 % du chiffre d’affaires des ventes et écoutes de musique enregistrée. On compte actuellement en France 10 millions d’abonnements payants, soit 1,3 million de plus qu’en 2020. En comptant les comptes familles et autres formules, ce chiffre grimpe à 14,2 millions d’utilisateurs premium, soit 2,2 millions de plus qu’en 2020. Aujourd’hui, l’Arcom estime que plus d’un Français sur trois pratique le streaming audio.

Arcom streaming france

Au risque de surprendre, ce sont bien les titres en langue française qui sont les plus écoutés, et de loin, toutes plateformes confondues. Les chiffres donnés sont un peu anciens (période 2017 à 2020), mais il est peu probable que la situation ait évolué significativement.

Point intéressant, 45 % des personnes interrogées ont déjà consommé de la musique sous forme de livestream. La gratuité de ces évènements est perçue comme un gros avantage par 34 % des personnes, même si c’est la simplicité qui l’emporte pour beaucoup, dont la capacité à pouvoir regarder l’évènement au moment où on le souhaite, et celle d’éviter les mesures sanitaires.

Écrit par Vincent Hermann

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Sommaire de l'article

Introduction

La fibre désormais majoritaire sur le très haut débit

Une forte progression des déploiements 5G

La France largement équipée en téléviseurs connectés

Ordinateurs, IoT, enceintes connectées : les montagnes russes

La population française surfe intensément

Empreinte carbone : un peu de bon, beaucoup de pas terrible

VàDA : Netflix poursuit sa domination

Musique en ligne : le sacre de la formule par abonnement

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Commentaires (5)


“Au risque de surprendre, ce sont bien les titres en langue française qui sont les plus écoutés, et de loin, toutes plateformes confondues. Les chiffres donnés sont un peu anciens (période 2017 à 2020)”



En effet, ça surprend.



Paupiette5000 a dit:



En effet, ça surprend.




Pas forcément. Le type de musique n’est pas précisé ici, mais il me semble que le grand gagnant des styles musicaux les plus streamé est le rap. Et comme la scène française est plutôt fournie, et que l’un des intérêts est de comprendre les paroles…
En y ajoutant les autres styles francophones qui marchent pas mal non plus, ça doit faire le compte.



Le Top 5 des sources de ce trafic n’est guère étonnant : Netflix (presque 20 % du trafic à lui seul), Google, Akamai, Facebook et Amazon.




Ben ??? Il n’y a plus Pornhub ??? :mdr2:



Plus sérieusement je suis un peu étonné que Netflix soit devant Akamai. Ça voudrait dire que Netflix possède sa propre infrastructure de CDN (Content Delivery Network, des serveurs répartis à proximité des grosses zones de consommation)?


Si j’ai bien tout compris, Netflix propose d’installer ses serveurs de cache aux opérateurs partenaires. En France, il y a Orange, Bouygues et SFR.



Ceci doit expliquer le chiffre de Netflix.



Je l’ai fait de mémoire. J’ai trouvé ce lien pour valider ce que j’avais retenu mais je ne sais pas trop ce que vaut ce forum
https://lafibre.info/orange-les-news/cache-netflix-en-regions-chez-orange/24/



Le Top 5 des sources de ce trafic n’est guère étonnant : Netflix (presque 20 % du trafic à lui seul), Google, Akamai, Facebook et Amazon.




Et pour Amazon, c’est tout trafic confondu entre la place de marché, Prime Vidéo et les services cloud AWS ? (c’est vrai qu’en s’additionnant ça doit commencer à faire beaucoup…)