Où en est ce fameux article 4 de la LOPPSI, celui qui permet à une autorité administrative de bloquer un site sans passer par l'intervention du juge ? À l'occasion d'une question parlementaire, Manuel Valls vient de faire le point sur ce texte unique qui avait été voté à l'initiative de Nicolas Sarkozy, malgré un vote contre du PS.
L'an passé, à l'instar des députés Laure de la Raudière et Lionel Tardy, le sénateur PS Luc Carvounas questionnait Fleur Pellerin sur l'avenir du l’article 4 de la loi LOPPSI. Cet article, unique dans notre législation, arme l’autorité administrative de la capacité de bloquer l’accès à des sites comportant des images pédopornographiques. Sur le papier, l’enfance en danger s’associe mal avec les tracasseries juridictionnelles et exige au contraire une réponse immédiate, effective et efficace (voir la décision du Conseil constitutionnel).
Programmé « sans délai » dès 2008, voté sous l’aiguillon de l’urgence en…2011, l’article 4 demeure encore lettre morte en juin 2013. Et pour cause : il renvoie à un décret le soin de régler les nombreux détails de sa mise en œuvre, décret qui rampe dans les couloirs du ministère.
Des réunions avec les FAI depuis 2011
La réponse de Fleur Pellerin était attendue d'autant que la ministre déléguée au numérique avait très tôt annoncé la mort de ce texte ! Finalement, Manuel Valls a répondu au sénateur que ce décret serait bien publié... Depuis le second semestre 2011, selon le ministre, est organisée « une importante concertation avec l'ensemble des acteurs concernés (fédération française des télécoms, association française des fournisseurs d'accès, les sociétés Orange, SFR et Free) ». L’enjeu est d'après la Place Beauvau « de convenir des modalités techniques et financières les mieux à même de répondre à l'objectif fixé par la loi, à savoir la protection de l'internaute contre les images pédopornographiques. »
Modalités techniques ? Annoncer un blocage administratif est une chose, programmer son effectivité et déterminer les responsabilités en cas de surblocage en est une autre. N’oublions pas davantage la question de l’indemnisation des fournisseurs d’accès, qui doivent percevoir une juste rémunération pour ce travail d’auxiliaire de police.
Des réunions qui n'ont toujours pas abouti
Valls promet que « la publication de ce décret s'inscrira (…) dans la politique du gouvernement de lutte contre la cybercriminalité ». Quand ? Aucune date n’a été donnée, mais pourquoi pas ces 8 et 9 juillet prochains à Lyon. La ville accueillera en effet un imposant forum sur la cybercriminalité (le Tac, Technology Against Crime) où se rendra le ministre.
En attendant, si on en croit la place Beauvau, les discussions avec les FAI n’ont pas bien abouties. « Le décret d'application suppose de régler très précisément les modalités techniques avec les fournisseurs d'accès à internet et de finaliser les arbitrages interministériels » avance-t-il timidement dans sa réponse. Contacté, un des FAI concernés nous indique cependant que « les dernières discussions avec le ministère se situent dans le meilleur des cas entre la période Sarkozy et celle de Hollande. Depuis l’été 2012, il n’y a plus rien. »