Dans la dernière ligne droite de 2022, l’Agence nationale des fréquences a mis en ligne son observatoire des contrôles de DAS effectués en 2021. Dans sa synthèse, l’ANFR fait le compte : « 141 téléphones de 31 marques différentes » passés au crible de son protocole, dont 42 % avec de la 5G.
Avant d’entrer dans les détails des mesures, une précision importante : il s’agit des « téléphones prélevés en 2021 et qui se sont révélés conformes et d’autre part les téléphones non conformes dont la fin de procédure est intervenue en 2021 », mais qui ont donc pu être prélevés les années précédentes.
Des téléphones ont aussi pu être testés en 2021, mais la procédure ne s’est terminée qu’en 2022 où elle est encore en cours, ils ne sont alors pas comptabilisés dans ce bilan. C’est par exemple le cas du Samsung Galaxy Z Flip contrôle en 2021, mais mis en conformité en 2022 seulement.
L’ANFR ne communique pour rappel qu’une fois la procédure terminée, généralement avec une mise à jour et plus rarement un retrait.
141 téléphones testés, 3 non-conformités
Dans tous les cas, 141 smartphones contrôlés est une belle augmentation par rapport à 2020 où le DAS de 95 smartphones avaient été vérifiés. Et c’est encore plus si on compare aux années précédentes : 74 en 2019, 68 en 2018, 69 en 2017. On est donc quasiment à fois deux par rapport à 2019.
Pour rappel, le gouvernement publiait fin 2019 quatre actions afin de « limiter l’exposition aux émissions de certains téléphones mobiles et mieux informer le public ». L’une d’elles concernait directement l’ANFR avec une intensification de 30 % des contrôles attendue pour 2020. Cette hausse de 30 % a bien eu lieu en 2020 (74 à 95 téléphones), mais surtout le rythme s’est même accéléré en 2021 avec une nouvelle augmentation des contrôles de près de 50 %.
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Les téléphones, choisis par l’ANFR suivant ses propres critères, comprennent à la fois des terminaux de nouveaux acteurs et de fabricants occupant d’importantes parts de marché. Pour chaque appareil, trois types de DAS peuvent être vérifiés par l’ANFR, avec un protocole de mesure et des valeurs limites bien précises suivant les cas.
Trois téléphones ont été épinglés pour dépassement de DAS en 2021. Les fabricants ont déployé une mise à jour, dont l’efficacité a été testée par l’Agence nationale des fréquences :
- EssentielB HeYou 60 de Boulanger (2,86 W/kg pour le DAS tronc et de 5,26 W/kg pour le DAS membre)
- EssentielB HeYou 90 de Boulanger (2,54 W/kg pour le DAS tronc et de 4,02 W/kg pour le DAS membre)
- Realme 7i (RMX2193) (4,91 W/kg pour le DAS membre)
DAS tête : circulez, il n’y a rien à voir
Commençons par le DAS tête dont l’objectif est de « refléter l’usage du téléphone à l’oreille, en conversation vocale ». La position du téléphone au contact de l’oreille à droite puis à gauche est décrite dans la norme NF EN 50360. Le maximum légal est de 2 W/kg.
L’ANFR n’a rien trouvé à redire : « Toutes les mesures de DAS tête ont montré des niveaux conformes pour les téléphones testés ». De plus, « depuis 2014, la médiane des valeurs de DAS tête tend à stagner autour de 0,3 W/kg ». Elle était de 0,4 W/kg en 2021, avec un maximum de 0,93 W/kg, largement inférieur à la limite dans tous les cas.
Pour l’Agence nationale des fréquences, « cette tendance peut s’expliquer principalement par l’augmentation de la taille des terminaux, éloignant ainsi les antennes de la tête de l’utilisateur ». Lors d’un appel, les antennes « actives pendant une conversation sont souvent situées à l’autre extrémité » que celle collée à l’oreille. Il est aussi question d’une « intelligence embarquée désormais par les téléphones permettant une sélection dynamique de l’antenne d’émission en fonction de l’usage du téléphone ».

Deux dépassements du DAS tronc
Passons maintenant au DAS tronc, c’est-à-dire lorsque le « téléphone est porté près du tronc, par exemple dans une poche de veste ou dans un sac ». Depuis avril 2016, la distance est fixée à 5 mm. Fin 2019, le gouvernement demandait à la Commission européenne de passer à 0 mm, mais force est de constater que rien n’a bougé sur ce sujet pour le moment. Certaines associations demandent aussi depuis longtemps de passer au contact. Quoi qu’il en soit, la limite actuelle est donc de 5 mm, avec un DAS de 2 W/kg.
Alors que la médiane était à plus de 1 W/kg depuis 2017, elle est repassée dessous avec 0,89 W/kg en 2021. « Deux téléphones [EssentielB HeYou 40 et 60 de Boulanger, ndlr], soit environ 1,5 % des terminaux vérifiés, ont dépassé la limite de 2 W/kg », précise l’ANFR. Le maximum était de 2,86 W/kg.

Trois dépassements du DAS membre
Terminons enfin avec le DAS membre. Il « correspond à l’usage du téléphone plaqué contre un membre, par exemple tenu à la main, porté dans un brassard ou dans une poche de pantalon ». La mesure se fait avec une distance de 0 mm, avec une limite réglementaire à 4 W/kg.
L’ANFR peut vérifier et mettre en demeure les fabricants pour non-respect de ce niveau de DAS depuis l’été 2020. L’Agence explique que, l’année dernière, elle « a considérablement renforcé les contrôles du DAS membre en testant 132 téléphones ». Le résultat des mesures oscillait entre 1,13 et 5,26 W/kg, avec une médiane à 2,19 W/kg.
« Trois téléphones, soit environ 2,5 % des terminaux vérifiés, ont dépassé la limite de 4 W/kg ». Des mises à jour ont été déployées afin de corriger le tir et, comme toujours, l’ANFR a vérifié que c’était le cas. Si le DAS tronc passe à 0 mm avec une limite à 2 W/kg, le DAS membre n’aura probablement plus grand intérêt.

La 5G contribue peu au DAS global pour le moment
Dans la dernière partie de son bilan, l’ANFR revient sur le cas de la 5G. 59 téléphones (soit 42 % de l’échantillon) étaient 5G. L’Agence explique que ses procédures ont évoluées l’année dernière « pour prendre en compte la nouvelle bande 5G N78 à 3,5 GHz ».
Avant de continuer, quelques rappels techniques importants : « contrairement aux réseaux 4G, 3G et 2G (où le téléphone n’utilise qu’une seule technologie à chaque instant), la 5G actuelle impose au téléphone d’utiliser simultanément la 4G et la 5G. Ce mode, dit "Non-Standalone" (NSA), était en 2021 indispensable sur toutes les bandes 5G déployées en France ».
De plus, les smartphones utilisant « plusieurs antennes réparties à l’intérieur du téléphone, il se peut que l’antenne 5G ne soit pas la même que l’antenne 4G et en soit séparée de plusieurs centimètres ». Enfin, la 4G et la 5G fonctionnent sur deux modes différents. FDD pour la 4G, cela veut dire que l‘émission et la réception des données se font en même temps sur deux bandes différentes. En 5G on est en TDD, avec un découpage dans le temps sur les mêmes fréquences (chacun son tour).
Conséquence directe : « l’antenne 4G émet en permanence (FDD) et l’antenne 5G par intermittence (TDD) », le niveau de DAS provient donc principalement de la 4G. Lorsque l’antenne 5G se trouve au même endroit dans le téléphone que celles de la 4G, les effets peuvent se combiner et ainsi faire augmenter le DAS.
Pas d’inquiétude selon l’ANFR : « Les résultats des contrôles effectués par l’ANFR montrent que, dans ce cas, cette augmentation reste faible, du fait que le téléphone n’émet pas plus de 20 % du temps en TDD dans la bande 3,5 GHz ». Le gros du trafic est en effet en téléchargement, or le DAS est maximal pendant lorsque le smartphone envoie des données aux antennes relais.
Voici le bilan des mesures : « Sur les 59 téléphones 5G testés, le DAS membre maximal du téléphone a été mesuré dans 56 % des cas en 5G contre 39 % pour le DAS tronc. La contribution de la seule 5G sur le DAS membre varie entre 0,04 % et 8,16 % avec une valeur médiane de 2,63 %. Pour le DAS tronc, la contribution de la seule 5G varie entre 0,11 % et 5,18 % avec une valeur médiane de 0,96 % ».
Aucune non-conformité sur les smartphones 5G
La recherche d’une potentielle non-conformité « est réalisée selon les normes européennes harmonisées de mesure du DAS. Dans un premier temps, chacune des contributions DAS 4G et 5G est ajoutée, pour chaque face du téléphone ».
« Cette addition, qui correspond aux deux antennes 4G et 5G co-localisées, permet ainsi d’obtenir un majorant », qui représente une limite théorique maximale ; le DAS dans la pratique ne pourra pas être supérieur. Si le majorant est inférieur au DAS limite de la réglementation pas la peine d’aller plus loin. Par contre, s’il est au-dessus, « une mesure par balayage volumétrique plus précise, prenant en compte la position réelle des antennes, est alors effectuée pour confirmer ou non la non-conformité ».
« En 2021, aucun téléphone 5G n’a fait l’objet d’une non-conformité », conclut l’ANFR.