Retraite pour InSight, la mission d'étude de la structure interne de Mars

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Retraite pour InSight, la mission d'étude de la structure interne de Mars
Crédits : NASA/JPL-Caltech

La NASA a mis fin mercredi à la mission martienne InSight arrivée en 2018, avec un sismomètre et une sonde pour étudier la chaleur provenant du cœur de la planète. Retour sur ces quatre années de mission, parsemées de difficultés et de découvertes.

Lundi, le compte Twitter de promotion de la mission expliquait déjà que les batteries du module d'InSight, qui s'est posé sur Mars en novembre 2018, étaient presque à plat. Mercredi, la NASA a annoncé officiellement la fin de la mission après avoir essayé de la joindre deux fois sans succès.

Plus tôt cette année, l'agence spatiale américaine avait déjà fait savoir que le module allait progressivement s'éteindre à cause de la poussière recouvrant ses panneaux solaires, ce qui réduisait la puissance récupérée – dix fois moins qu'à son arrivée sur la planète. Et, malheureusement, aucune tempête n'est venue souffler sur les panneaux du module.

Ces quatre ans d'activité sont quand même une réussite pour InSight dont la mission avait été prévue pour durer deux ans à l'origine.

Depuis son arrivée sur Mars, InSight a détecté plus de 1 300 événements sismiques (1 319 selon le communiqué de la NASA, 1 318 selon celui du CNRS) grâce au sismomètre SEIS (Seismic Experiment for Interior Structure), dont la supervision avait été confiée au CNES.

Un départ décalé de deux ans par une fuite dans SEIS

Choisi en 2012 par la NASA pour être la douzième mission du programme Discovery, le départ vers Mars d'InSight devait se dérouler en mars 2016. Mais une fuite dans l'un de ses instruments scientifiques principaux, le sismomètre SEIS, a obligé la NASA à retarder le décollage de deux ans.

Marc Pircher, à l'époque directeur du centre spatial de Toulouse, expliquait que « c’est la première fois qu’un instrument aussi sensible est réalisé. Nous étions très près du résultat, mais une anomalie s’est produite, nécessitant des investigations complémentaires. Nos équipes trouveront une solution, mais malheureusement pas à temps pour le vol de 2016 ».

Finalement, après un report de deux ans – les fenêtres de lancement vers la planète rouge s’ouvrent tous les deux ans –, qui a contraint la NASA à rajouter 153,8 millions de dollars au budget initial, le SEIS est prêt et la mission en a profité pour sécuriser l'ensemble des dispositifs embarqués. Insight a décollé en mai 2018 et s'est posé sur Mars en novembre.

InSight devait initialement durer deux ans, mais l'ingéniosité des équipes en charge du projet a permis de la prolonger de deux ans. Ils ont eu l'idée d'utiliser le bras et la petite pelle du module, prévus à l'origine pour poser des instruments scientifiques sur la surface de la planète, pour enlever la poussière des panneaux solaires d'InSight lorsque l'énergie commençait à diminuer.

Mars Insight

Caractérisation de la structure interne de Mars

Une fois posé et installé, SEIS, sorte de stéthoscope pour « écouter » l’activité de Mars, a pu s'atteler à la tâche de mesurer les soubresauts de la planète à l'aide de ses six sismomètres. La difficulté est plus grande que sur Terre, où l'on a les capacités d'en placer un peu partout sur la surface. SEIS, lui, est seul sur Mars à faire son travail.

Mais, selon Philippe Lognonné, principal responsable de l’instrument et géophysicien à l’Institut de physique du globe de Paris, SEIS est « la station sismique la moins bruitée du système solaire » et ses équipes « ont pu mesurer des signaux dix fois plus faibles qu’anticipés ».

Dès sa première année sur Mars, SEIS confirme un a priori : « l’activité sismique martienne se situe entre celle de la Terre et celle de la Lune ».

Mais surtout, le sismomètre a réussi en 2021 à détecter trois discontinuités dans la croûte martienne. La première a été observée à une dizaine de kilomètres de profondeur, la deuxième se trouve à 20 km et une troisième – moins marquée – est à 35 km sous la surface. « La croûte martienne sous InSight fait donc entre 20 et 35 kilomètres d’épaisseur », en conclut Philippe Lognonné.

Plus de 1 300 événements sismiques, dont un de magnitude 5

Au final, la mission aura détecté plus de 1 300 événements sismiques au cours de ses années sur Mars dont un particulièrement important.

Jeudi 5 mai 2022 à 4h environ heure locale (1h 27 heure française), SEIS a enregistré un séisme de magnitude 5 sur l’échelle de Richter. Et la chance a voulu qu'InSight se situe à une relativement proche distance de l'épicentre du séisme, 2 250 km « seulement ».

Pour Philippe Lognonné, « cette faible distance épicentrale et la très forte magnitude expliquent l’ampleur du signal, et le fait que les ondes de volume mais aussi celle de surface sont si claires. Ce séisme est d’une certaine façon une mine d’or pour non seulement confirmer nos modèles de structure interne mais aussi les améliorer ! ». Nous avons déjà expliqué ce que sont les ondes de volume P et S ainsi que les ondes de surface R.

La dernière nouvelle en date des découvertes de SEIS, publiée fin octobre dans la revue Science [PDF], est l'impact de deux météorites sur la surface de Mars à la fin de l'année 2021.

La taille de l'impact qui a eu lieu le 24 décembre 2021 et la nature de la surface sur laquelle il a eu lieu ont notamment permis de détecter des ondes de surface provenant de l'événement, ondes qui n'avaient jamais encore été observées sur la planète. « Ces ondes de surface aident à démêler la structure de la croûte martienne, qui comporte diverses quantités de roches volcaniques et sédimentaires, ainsi que de la glace en dessous de la surface, dans différentes régions de la planète », expliquaient les chercheurs dans le résumé de leur article.

Un sol très difficile à percer pour HP3

Si SEIS a bien réussi à analyser les secousses qui se produisent sur Mars, la mission de la sonde HP3 (Heat Flow and Physical Properties Package) – qui se trouve également sur InSight – a été beaucoup plus compliquée. Développée par le Centre allemand pour l'aéronautique et l'astronautique (en allemand, Deutsches Zentrum für Luft- und Raumfahrt , DLR), HP3 a rencontré un sol beaucoup plus résistant que ce que ses concepteurs prévoyaient.

Équipée d'un ruban sur lequel sont fixés des thermomètres, elle devait, à l'origine, s’enfoncer dans le sol jusqu’à 5 m de profondeur pour évaluer «  la vitesse de refroidissement de la planète afin de reconstituer son "histoire thermique" ».

Tombée sur un sol très dur dès les premiers centimètres de profondeur, l'équipe a dû se résoudre à arrêter la mission en janvier 2021.

SEIS HP3 InSight
Crédits : IPGP/Nicolas Sarter.

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