Framasoft lance Frama.space, des instances Nextcloud dédiées aux associations et collectifs

Vers le fini et pas au-delà
Internet 6 min
Framasoft lance Frama.space, des instances Nextcloud dédiées aux associations et collectifs
Crédits : David Revoy (CC-By 4.0)

Framasoft vient de lancer Frama.space, à destination des petites associations et des collectifs. Objectif, fournir un espace Nextcloud adapté à leurs besoins. L’association française souhaite, par cette initiative, redonner du pouvoir aux collectifs, malmenés selon elle depuis plusieurs années par les pouvoirs publics. Nous nous sommes entretenus avec Pierre-Yves Gosset, son délégué général.

L’idée est de donner des espaces clé en main, basés sur Nextcloud et intégrant toutes les bases organisationnelles que l’on peut en attendre : stockage de fichiers et partage, synchronisation des agendas et contacts, albums photos, gestion de projet, création d’une documentation, organisation de visioconférences ou encore édition collaborative de documents.

Comme Framasoft nous l’avait indiqué le mois dernier, ces espaces seront de 40 Go, ce qui représentera un coût non négligeable pour l’association. Framasoft va donc limiter le nombre d’inscriptions, même si elle se laisse de la marge : elle pourrait accepter jusqu’à 10 000 demandes. Ces espaces s’ouvriront cependant de manière très graduelle : 200 à 300 espaces d’ici décembre, passage à 1 000 durant le premier semestre 2023, 2 500 pendant le deuxième semestre, 5 000 durant 2024 puis 10 000 en 2025.

Il y aura d’ailleurs un creux entre les deux premières phases, d’environ trois mois. Framasoft profitera de cette période pour faire le point et collecter des retours. Car oui, les associations et autres collectifs seront invités à répondre à des sondages et autres petits questionnaires pour obtenir des retours d’expérience.

Toutes les associations, fondations, syndicats, clubs, collectifs francophones sont éligibles, à la condition que les besoins n’excèdent pas les 40 Go et plus de 50 comptes. Tout le reste – écoles, administrations, individus, familles, collectivités, services publics, etc. – sera refusé. Seule exception, au cas par cas, les entreprises, puisque les coopératives (SCOP, SCIC…) pourront être acceptées. Les autres, comme le fait remarquer Framasoft, peuvent sans doute se payer une instance Nextcloud.

Les objectifs de Frama.space

L’association ne le cache pas : l’objectif de Frama.space est avant tout politique. « Les gouvernements et les institutions n'apprécient que moyennement de voir des militants associatifs leur réclamer des comptes, les bousculer pour lever le voile et élever la voix sur les indignités et injustices. Qu'il s'agisse d'environnement, de logement, de santé publique, etc., les associations sont, depuis la loi de 1901, l'un des fers de lance des luttes sociales », nous indique Pierre-Yves Gosset.

Cela passe par une offre de service ne comprenant que des logiciels libres, pensées pour les collectifs et loin des outils habituels, jugés « toxiques » : Google Workspace, Microsoft 365, Zoom, etc. « Les associations sont souvent consommatrices d'un numérique pensé par des acteurs qui veulent créer un monde dont les associations ne veulent pas », précise Gosset.

Frama.space

Framasoft évoque un projet en quatre étapes : rendre visibles les alternatives, faciliter leur accès, aider à faire émerger des communautés et leur donner du pouvoir, de la confiance. Pas très différent en somme de tous les projets de Framasoft depuis 20 ans.

Ce n’est toutefois pas le seul. L’association fait ainsi remarquer que même si Nextcloud est relativement connu et utilisé en France, il n’y a pas vraiment de communauté, autre que technique pour les personnes créant les instances. Elle veut donc aider à faire connaître Nextcloud, lui donner de la visibilité et en faciliter l’accès.

Elle souhaite faire émerger une communauté Nextcloud française, car le logiciel peut se révéler complexe, notamment par sa richesse. La documentation n’est pas toujours simple d’accès, Framasoft faisant valoir que beaucoup de personnes sont plus à l’aise avec des formations ou des contenus vidéo.

Que contient une instance Frama.space ?

Comme dit, chaque instance sera fournie avec 40 Go d’espace de stockage, configurable pour un maximum de 50 comptes. Le collectif bénéficiaire peut en faire ce qu’il veut, notamment répartir librement l’espace entre les comptes. Rien n’empêche d’affecter par exemple 30 Go à un compte si besoin.

Pour le reste, il s’agit d’une instance Nextcloud plus ou moins classique, dont la boutique d’applications a été retirée. Pierre-Yves Gosset nous a confirmé que Frama.space était proposé avec un cadre spécifique et que l’association préférait que cela reste ainsi.

Toutes les fonctions de base sont présentes : stockage, gestion et partage de fichiers, éditeur de texte compatible Markdown, suite bureautique en ligne (Collabora par défaut, peut être remplacée par OnlyOffice), un agenda et des contacts synchronisés, de la visioconférence (via Talk), l’application Photos, ainsi que des outils plus spécifiques comme Collectifs – création et organisation de documents thématiques et Deck, dédié à la gestion de projets par la méthode Kanban.

Absent notable de Frama.space : le courriel. Pour le délégué général de Framasoft, c’est un choix assumé : « L’email, c’est le bazar. Il y a toujours quelque chose qui ne fonctionne pas. On a déjà le problème chez nous. Un jour on va être bloqué par La Poste, le lendemain par SFR, et ainsi de suite. Il faut à chaque fois contacter les bonnes personnes et leur expliquer que nous ne sommes pas des dangers. C’est une perte de temps. Quand on ne fait pas partie des quelques gros acteurs qui se font confiance entre eux, c’est vite compliqué ».

Nextcloud oblige, l’ensemble des données seront synchronisées sur les plateformes mobiles, via l’application du même nom. Frama.space est donc bien présenté comme un outil organisationnel, utilisable à peu près n’importe où.

Les demandes de retours d’expériences feront certainement évoluer le service. Framasoft nous l’avait indiqué le mois dernier et Pierre-Yves Gosset nous l’a réaffirmé. Frama.space changera en fonction des demandes, qui pourront aussi bien concerner des aspects jugés trop complexes que des applications absentes. Mais l’association ne pourra pas répondre aux demandes individuelles. Une FAQ complète a été mise en ligne et détaille notamment les capacités de Frama.space.

Point important, les instances Frama.space seront munies d’un outil de migration. Les données pourront donc être exportées vers un autre Nextcloud, par exemple hébergé chez un CHATON. De même, l’opération inverse sera possible. Il faudra simplement s’assurer que les applications installées sont les mêmes entre les instances de départ et d’arrivée.

Les délicates questions des finances et des sélections

Nous avons posé la question à Pierre-Yves Gosset : ces instances sont-elles là pour durer ? Après tout, il sera délicat de demander aux associations de plier bagage rapidement, après leur avoir fait découvrir qu’il existait un autre monde après les GAFAM, avec des outils respectueux de leurs données.

« Au grand minimum trois ans », nous a répondu Gosset, « le temps que l’on ouvre l’infrastructure jusqu’aux 10 000 instances courant 2025 ». « Mais oui, ces instances sont là pour durer, tant que nous aurons les moyens de les entretenir, car c’est une dépense loin d’être négligeable », ajoute-t-il. Le délégué précise d’ailleurs que cette infrastructure est prévue actuellement pour 5 000 instances, mais qu’elle sera étendue facilement par la suite.

Ces 10 000 instances auront un impact financier certain pour l’association, qui assume son choix. Le nombre peut paraître élevé, mais ne représente qu’une broutille dans le paysage français : pour les seules associations, il y a 800 000 structures actives dans l’Hexagone, sans parler de toutes celles en dormance. Et puisque Frama.space est ouvert à l’ensemble des francophones dans le monde – et uniquement francophones, car le support ne sera qu’en français –, le chiffre sera rapidement atteint.

Ce qui entrainera probablement des problèmes, comme le confirme Pierre-Yves Gosset : « Il est certain que nous allons devoir calmer des incendies, car beaucoup risquent de râler sur le refus d’ouverture d’un Frama.space, en arguant que le voisin a pu l’avoir ».

C’est d’ailleurs pour ça que le formulaire disponible depuis ce matin est une pré-inscription. Contrairement à tous les services lancés par l’association au cours des dernières années, ce ne sera pas au « premier arrivé, premier servi ». Framasoft prendra le temps d’examiner les candidatures, les motivations et l’ensemble des détails donnés par les participants.

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