Les voitures électriques moins polluantes ? Ça dépend selon l’ADEME…

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Mobilité 9 min
Les voitures électriques moins polluantes ? Ça dépend selon l’ADEME…
Crédits : wakila/iStock

L'Ademe a rendu, la semaine dernière, son avis sur les voitures électriques et les bornes de recharges. Si l'agence de la transition écologique explique qu'une voiture électrique peut avoir un impact carbone 2 à 3 fois inférieur à celui d'un modèle similaire thermique, ce n'est pas le cas pour tous les modèles. 

Dans son rapport (PDF), l'agence considère l’électrification du parc automobile français comme « l’un des leviers incontournables pour atteindre la neutralité carbone en 2050 » et affirme que les véhicules électriques peuvent émettre jusqu'à 2 à 3 fois moins de carbone si on compare leur cycle de vie complet… mais cela dépend de plusieurs facteurs. 

Les SUV écartés avec une grosse batterie

En effet, pour l'Ademe, « l’impact carbone d’un véhicule électrique augmente quasiment proportionnellement à son poids ». Les SUV et les voitures lourdes ne rentrent donc pas dans les véhicules électriques conseillés par l'agence. Elle précise les conditions sur les batteries pour arriver à cette réduction de 2 à 3 fois des émissions de CO₂.

Celles-ci devraient être « de taille raisonnable », c'est-à-dire pas au-delà de 60 KWh, comme celle d'une berline de type Megane e-tech dont l'autonomie est de 470 km WLTP. Selon le rapport, une voiture « avec une batterie de taille supérieure, l’intérêt environnemental comparé à un véhicule thermique comparable n’est pas garanti et beaucoup plus tardif ».

ADEME voiture électrique

Dans le graphique ci-dessus, il est indiqué qu’il faut parcourir au moins 15 000 à 20 000 km avec une voiture électrique citadine (batterie de 22 kWh) pour que les émissions de carbone soient inférieures à celles d’une compacte diesel ; un palier que l’on peut facilement et « rapidement » atteindre. On passe à 70 000 km environ si la batterie affiche 60 kWh et enfin 100 000 km avec un véhicule électrique SUV compact de 100 kWh. 

Difficile de faire de ce constat une généralité pour autant, comme le reconnait le rapport : « la consommation électrique peut varier selon la taille et le poids des véhicules dans un facteur de 1 à 2,5 ».

Le « coût complet » d'un véhicule électrique

Après l’impact écologique, passons à l’impact économique : « le coût complet d'un véhicule électrique rechargé à domicile est équivalent, voire inférieur à celui d'un véhicule thermique dès aujourd'hui », affirme l’ADEME. Selon les calculs de l’Agence, sur 15 ans, le coût complet d’un véhicule électrique compact avec une batterie de 40 kWh « est de 8 000 euros plus faible que son homologue essence ».

Le coût est par contre supérieur avec une batterie de 80 kWh ou avec une voiture hybride. Il n’est pas précisé si les calculs prennent en compte le bonus écologique de 6 000 euros (7 000 euros prochainement pour les ménages modestes), de la prime à la conversion pouvant atteindre 5 000 euros de plus et les éventuelles aides supplémentaires suivant les régions et les profils de chacun.

Là encore, impossible de tirer des conclusions à grande échelle. De plus, comme nous allons le voir juste après, la notion de voiture « rechargée à domicile » est très importante et peut influencer le coût complet du véhicule de manière non négligeable. 

ADEME voiture électrique

Domicile-travail sur batterie, quid des longs trajets ?

Partant du constat que plus la batterie est petite plus les émissions de carbone sont faibles, l'Ademe conseille de choisir une batterie « juste adaptée à l’usage majoritaire du véhicule (typiquement le domicile-travail quotidien) ».

Reste le problème des voyages plus longs, notamment pendant les vacances, avec des risques de saturation de certaines bornes de recharge, prises d’assaut par des véhicules avec une autonomie réduite devant multiplier les arrêts pour « faire le plein ».

Pour l’ADEME, il faudrait à moyen terme « engager une réflexion plus large sur le lissage de la demande de mobilité longue distance ». Des solutions « pourraient être rapidement étudiées : recourir au train, (dont il est nécessaire de renforcer l’offre et développer les services), ou organiser un service de véhicules adaptés sur les lieux touristiques, ou encore construire des alternatives occasionnelles aux grosses batteries installées dans les voitures (de type « range extender » / prolongateur d’autonomie) ».

Le rapport signale à juste titre que les solutions ne seront pas les mêmes pour une personne célibataire que pour une famille avec trois enfants lors d’un départ en vacances. C’est l’occasion de placer un mot sur les véhicules hybrides : « en attendant le déploiement d’offres de mobilité à grande distance telles qu’évoquées plus haut, la technologie des hybrides rechargeables peut être pertinente en matière de transition écologique ». 

Une condition est rapidement ajoutée par l’ADEME : que tous les trajets inférieurs à l’autonomie en mode électrique soient effectivement réalisés sur les batteries exclusivement, ce qui implique de bien penser à recharger sa voiture régulièrement. 

On pourra enfin remarquer que, si ces observations s'appliquent à la France dont l'énergie est très nucléarisée, elles ne peuvent être généralisées à n'importe quel pays.

Tout n’est pas rose dans l’électrique

L’empreinte environnementale d’un véhicule électrique ne comprend pas que le coût environnemental de sa conception. Si, « par définition, aucun polluant d’échappement (dont les oxydes d’azote NOx qui sont encore problématiques dans plusieurs métropoles Françaises) » n’est rejeté par les voitures électriques, d’autres sources de pollution existent.

Tous les véhicules émettent des particules (hors échappement) « résultant de l’usure des pneus, des plaquettes de frein et du revêtement routier ». Si le freinage régénératif (sur le principe de la dynamo) permet de « réduire sensiblement l’usure des plaquettes de frein », ce système est « généralement plus lourd que son équivalent thermique, ce qui augmente l’abrasion des pneus ». Cette dernière serait d’ailleurs « responsable, tout véhicule confondu, de 28 % des microparticules déversées dans l’océan chaque année (IUCN 2017) ».

Bref, l’ADEME rappelle que « l’électrification des automobiles n’en supprime donc pas toutes les nuisances ». Pour l’Agence, il est donc « crucial d’interroger la pertinence du recours à l’automobile même lorsqu'elle est électrique : le vélo ou les transports collectifs offrent aussi de nombreux avantages en terme sanitaires et environnemental, en centre-ville notamment ».

Sécuriser les approvisionnements en matières premières

Sur la conception des batteries, l'Ademe pousse à « la sécurisation des approvisionnements » du lithium, cobalt, nickel et du graphite nécessaires à leur fabrication et à une concertation au niveau européen sur le sujet. Vu la croissance du marché, si l'augmentation des performances des usines de recyclage est important, elles ne pourront pas être suffisantes.

Une batterie de voiture est considérée comme étant en « fin de vie mobilité » lorsque sa capacité de stockage initiale est diminuée de 20 à 30 %. Dans le cas des Zoe avec location de la batterie, cette dernière est changée lorsqu’elle passe sous les 75 % par exemple.

Ces batteries « en fin de vie » pour les voitures peuvent toujours être réutilisées « pour des usages moins exigeants en termes de densité d’énergie, par exemple en stockage stationnaire, sous réserve que ce réemploi ne nécessite pas d’opération trop coûteuse qui la rendrait économiquement non compétitive ».

Si elle est hors service, « la batterie est traitée dans la filière industrielle de recyclage, soumise à la Directive Européenne 2006/66/CE “Piles et Accumulateurs”, qui exige au moins 50 % de rendement de recyclage pour les batteries Lithium ». Selon l’ADEME, le taux moyen est actuellement de l’ordre de 60 %, mais la quantité à recycler reste assez faible pour le moment, et « les quantités de matières recyclées sont marginales en regard des besoins de la filière de fabrication de batteries ».

Cette directive européenne est en cours de révision. L’objectif de rendement pourrait ainsi passer à 70 %, mais surtout ajouter un « ambitieux de taux de récupération de 4 métaux d’ici au 1er janvier 2026 : 90 % pour le nickel, le cobalt et le cuivre et 35 % pour le lithium ».

L’ADEME précise que « ces chiffres font encore l’objet de discussions, compte tenu des verrous technologiques qui sont à lever pour garantir leur atteinte ». Une autre manière de dire que ce n’est pas pour tout de suite… L’objectif est à la fois de réduire le besoin de matières premières primaires et de mettre en place une fabrication « en boucle fermée » de nouvelles batteries avec des matériaux issus du recyclage d’anciennes batteries. 

Plus de 69 000 bornes en métropole

Au 1er septembre 2022, on compte selon l'agence 69 428 points de recharge ouverts au public sur le territoire métropolitain, soit une moyenne d'un point de charge pour 14 véhicules.  « Même si ce réseau présente un taux de croissance important (+49 % en un an), le manque "perçu" de bornes de recharge sur le territoire reste un frein majeur au déploiement de l’électromobilité », explique le rapport. 91 % de ces points de charge sont de puissance inférieure à 22 kW.

Il faut dire que le nombre de véhicules légers 100 % électriques augmente aussi : de 28 300 en 2016 à plus de 174 000  en 2021. En juillet de cette année, la France compte selon l’ADEME 620 000 véhicules électriques, « soit à peine 1,5 % du parc roulant ». Et il faut encore ajouter les voitures hybrides qui, elles aussi, peuvent avoir besoin de se recharger sur des bornes. 

L'agence fait aussi remarquer que « les prix de vente au kWh sur bornes de recharge ultra rapides sont de 3 à 4 fois plus élevés qu’à son domicile ». Le rapport donne quelques chiffres : « le prix de revient en électricité pour réaliser 300 km est à l’heure actuelle d’environ 10 euros en charge normale (à domicile) et de 40 euros en charge rapide (pour 30 euros environ en mode thermique) ».

Il existe pour rappel des points de charge gratuits, notamment près de certains enseignes ou des hôtels qui espèrent ainsi attirer des clients. Ils proposent parfois la charge rapide. Il faut également que la place soit disponible.

Travailler sur d'autres axes

Si l'Ademe affirme qu'électrifier le parc des véhicules est nécessaire pour atteindre la neutralité carbone en 2050, elle insiste que ça ne sera pas suffisant. Trois autres axes de travail sont mis en avant :

  • les changements de comportements (promotion du tourisme local, télétravail...)
  • le report modal vers d’autres moyens de mobilité moins impactants que l’automobile particulière (vélo, marche, transport en commun, covoiturage, autopartage, véhicules intermédiaires)
  • l’amélioration des technologies. À la fois la chaine de traction électrique, mais aussi la base roulante du véhicule : masse, dimensions, pour réduire son besoin en énergie.

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