Quelles sont les performances « pures » des navigateurs aujourd'hui ? Nous avons passé sept navigateurs à la moulinette de plusieurs benchmarks synthétiques. Il y a parfois d'évidents gagnants et perdants, mais ces résultats n'ont plus l'importance d'autrefois.
Il a existé une époque où l’on comparait les performances des navigateurs à tout bout de champ, presque à chaque nouvelle version de l’un ou l'autre. Cette guerre intense entre les concurrents ne s’est pas arrêtée, au contraire. Elle s’est lentement déplacée vers d’autres domaines, mais elle n’est pour autant pas à écarter. Alors y a-t-il vraiment des navigateurs plus rapides que d’autres ?
Nous avons voulu le savoir, au moins sous Windows et macOS (la situation sous Linux fera l’objet d’un article à part).
Navigateurs à la loupe, benchmarks et configurations
Commençons par les navigateurs que nous allons tester : Brave, Chrome, Edge, Firefox, Opera et Vivaldi. Sur Mac, Safari rejoint le banc d’essai. Il s’agit des navigateurs les plus utilisés et l’immense majorité des internautes y trouvera ses repères.
Pour en examiner les performances, nous avons sélectionné cinq benchmarks : ARES-6, JetStream 2, MotionMark 1.2, Speedometer 2.0 et Web Basemark 3.0. Tous s’attardent intensément sur les opérations JavaScript, tandis qu’en fonction des cas, on va trouver un accent particulier sur les animations ou encore le machine learning. Ces tests sont plus ou moins complets, mais comme tous les benchmarks synthétiques, ils ne font que donner un indicateur général, dans des conditions particulières.
Parlons justement de ces conditions. Chaque navigateur a été utilisé dans sa dernière révision stable. Sur PC, on retrouve Windows 11 (stable) avec toutes ses mises à jour, ainsi que les derniers pilotes. Sur Mac, même chose (sauf pour les pilotes). Dans tous les cas, il s’agissait d’une session vierge, sans aucune autre application active, ni plus généralement de processus autres que ceux du système. Les navigateurs ont été utilisés dans leur configuration par défaut, avec un seul onglet.
Concernant le matériel, le PC était basé sur un Ryzen 5 5600X, épaulé par 32 Go de mémoire DDR4 3200 MHz et une GeForce RTX 3070 Ti. Le Mac était un MacBook Pro M1 contenant 8 Go de mémoire. Il s’agit de la même machine utilisée dans notre article sur le retour d’expérience.
Chaque benchmark a été exécuté trois fois, pour ne garder que le meilleur score. S’il vous prend l’envie de vous lancer dans un tel comparatif, sachez que cela prend du temps : entre 25 et 30 min par navigateur et par plateforme.
Les résultats des tests
Avant de voir les résultats, précisons qu’à l’exception d’ARES-6, le plus gros score est le meilleur. Pour chaque test, nous avons indiqué en vert le gagnant et en orange le moins rapide.
Voici d’abord les résultats pour Windows :

On remarque que Firefox est le moins rapide dans quatre des cinq tests, le plus souvent d’une marge significative.
Autre constat, indéniable : même si Edge et Brave remportent chacun deux tests, tous les navigateurs basés sur Chromium (et son moteur Blink) sont très proches dans les résultats, au point que l’on peut parler de mouchoir de poche.
Voici maintenant les résultats sur le Mac :

L’entrée de Safari bouleverse quelque peu le classement, le navigateur d’Apple se montrant presque digne de la publicité qu’en fait son éditeur, qui vante sans cesse ses performances. Cette fois, on a des écarts parfois impressionnants, comme dans MotionMark entre Edge et Safari : on passe du simple au triple. Un MotionMark où Safari toise d’ailleurs tous ses concurrents, car les autres ont beau faire un peu mieux qu’Edge, ils restent sur le carreau.
Firefox est une nouvelle fois à la traine et se retrouve dernier dans trois des cinq tests. Quant aux dérivés de Chromium, ils sont encore une fois très proches les uns des autres, comme sous Windows.
Il est aussi intéressant de constater que, Basemark Web 3.0 mis à part, les résultats obtenus sur le MacBook Pro M1 et le Ryzen 5 5600X sont très proches, mais à l’avantage du Mac.
Qu’est-ce que ça signifie ?
Comment interpréter dès lors ces résultats ? Cela signifie-t-il qu’il faut foncer vers le navigateur affichant les meilleures performances ? Notre réponse est claire : non.
Actuellement, les écarts de performances, même s’ils peuvent paraître importants quand on regarde la grille des résultats, ne justifient pas en eux-mêmes de passer à la concurrence.
Tous les navigateurs sont rapides, et c’est surtout la quantité de mémoire qui peut faire la différence. La guerre qui a fait tomber Internet Explorer, lancée par Firefox et depuis remportée par Chrome, a abouti à un monde dans lequel les performances pures et la prise en charge des standards ne sont plus des batailles de premier plan. Ce sont désormais des « bases ». Pour continuer à exister dans ce secteur ultra concurrentiel, il en faut plus.
Aujourd’hui, l’appréciation d’un navigateur est en quelque sorte une moyenne pondérée de plusieurs critères, dont les performances ne sont qu’un point parmi d’autres. En face, on trouve les fonctions, et si votre navigateur vous satisfait par ce qu’il propose – vous êtes peut-être même allé(e) le chercher pour cette raison –, ce ne sont pas quelques points en moins sur un benchmark qui changeront la donne.
Alors oui, on peut dire que Firefox est un peu à la traîne, que Chrome et Edge arrivent en tête sous Windows, ou encore que Safari tient ses promesses sur un Mac, mais ce n’est pas assez pour justifier une bascule vers un autre navigateur. Certains navigateurs sont meilleurs que d’autres sur des benchmarks, mais cela ne se voit pas. En fait, à moins d’exécuter de nombreuses fois le même test, on ne peut voir aucun écart significatif. Même dans le cas de Firefox, en dépit des différences parfois importantes, ce n’est pas si simple à observer.
Performances pures contre réalité
D’autant qu’il faut tenir compte des conditions de tests : aucun autre onglet ouvert, aucune autre application, une session « vierge » sur le système d’exploitation. On mesure donc des performances pures… qui n’ont pas grand rapport avec la réalité. C’est la grande limite de ce type de test. Rien n’empêche cependant de télécharger un autre navigateur et de comparer le ressenti vis-à-vis de l’utilisation que l’on fait de sa machine. Ce « ressenti » est encore le meilleur guide dans le choix d’un navigateur.
On se dirige aujourd’hui plus volontiers vers un navigateur pour ce qu’il a à offrir de plus que le navigateur intégré au système d’exploitation. Firefox continuera par exemple d’être privilégié par une partie des internautes pour sa philosophie open source et l’accent prononcé sur la vie privée, tout comme Brave.
Certains, comme Vivaldi, ont compris depuis longtemps que l’espace fonctionnel est le seul pouvant faire la différence, en choisissant une approche centrée sur les « power users ». Quant à Chrome, il est bon partout et permet l’intégration aux services de Google, appréciés de beaucoup.
La conclusion est donc assez amusante : si votre navigateur vous plaît, vous n’avez aucune raison d’en changer, à moins que vous soyez à la recherche d’une fonction particulière – mais n’est-elle pas disponible sous forme d’extension ? – ou d’une approche de la navigation plus en phase avec certaines valeurs.