La résiliation en trois clics en passe d'être revue et corrigée au Sénat

Quand la télé commande
Droit 6 min
La résiliation en trois clics en passe d'être revue et corrigée au Sénat

Après l’Assemblée nationale, le projet de loi sur le pouvoir d’achat poursuit sa route au Sénat. Plusieurs amendements ont aiguisé l’option de résiliation en trois clics, déjà adoptée par les députés. En commission, les sénateurs ont introduit un droit de résiliation « à tout moment des contrats de services de télévision et de vidéo à la demande ».

Le projet de loi prévoyait à l’origine un parallélisme des formes : un contrat conclu en ligne doit pouvoir être résolu en ligne.  Le texte est aiguisé pour répondre aux manœuvres de certains professionnels. Par exemple, ceux qui conditionnent la résiliation des contrats à la réception d’une lettre recommandée avec accusé de réception… Quoi de mieux pour transformer les clients en partance en clients captifs ?    

Les députés ont été nettement plus loin que le texte initial. Ils ont étendu la possibilité de résilier « par voie électronique » l’ensemble des contrats conclus par un consommateur. En somme, le bouton « résiliation » est étendu à tous les contrats, même ceux signés hors ligne. 

Sans surprise, au Sénat, la copie a été revue et corrigée, dès son examen en commission.

Modalités de résiliation des contrats conclus par voie électronique

En commission, deux amendements identiques ( et ) ont été adoptés pour rétablir le parallélisme des formes initial. Selon ces sénateurs, le « bouton résiliation » ne doit en effet être rendu obligatoire que lorsque le contrat a été conclu par voie électronique. « Dans ces cas de figure, en effet, il peut raisonnablement être attendu que [les entreprises] aient les moyens de prévoir une telle symétrie entre conclusion et résiliation ».

Par contre, imposer une telle fonctionnalité dans tous les autres cas est jugé « disproportionnée ». Cela « aurait fait peser de lourdes charges opérationnelles sur les petites entreprises », en particulier celles ne disposant pas de site Internet, explique la commission dans son rapport parlementaire

Quid des contrats conclus « au comptoir », par exemple dans les boutiques d’un opérateur téléphonique ? Juridiquement, ce dernier ne serait pas tenu de prévoir de bouton résiliation, cependant la rapporteure Frédérique Puissat (LR) considère qu’ «  il sera quasiment impossible pour les entreprises concernées d'en priver du bénéfice les consommateurs concluant un contrat selon cette modalité : le risque réputationnel serait élevé, et il est plus complexe pour un opérateur de prévoir l'affichage ou non du "bouton résiliation" selon le mode de conclusion du contrat choisi par le consommateur, que de prévoir sa mise en oeuvre pour tous ses clients ».

Alors que les députés avaient fait preuve d'une certaine mansuétude, repoussant la date de mise en œuvre au plus tard le 1er août 2023, les sénateurs ont adopté un amendement du groupe Socialiste pour revenir à la date du projet de loi initial, soit le 1er février 2023

Téléphonie et Internet : suppression de certains frais de résiliation

Dans le texte voté à l’Assemblée nationale, les députés ont fait sauter les frais de 25 % en cas de résiliation avant échéance des contrats avec engagement de plus d’un an.

Suite à un amendement d’Éric Bothorel, les offres groupées abonnement + terminal ont toutefois été exclues de ce périmètre.« En effet, explique le député de la majorité, ce type d’offres, assis sur une durée d’engagement de vingt-quatre mois, ne saurait rester équilibré sans la garantie d’une indemnité en cas de résiliation du contrat après les douze premiers mois ».

Au Sénat, autre salle, autre ambiance. Patrick Chaize a fait préciser que dans les cas des offres avec équipement terminal subventionné, les consommateurs auront toujours à s'acquitter des frais de résiliation, sous réserve que ce montant reste inférieur ou égal à 25 % de la somme encore due. Pas sûr que les professionnels décident de rogner ce plafond…

Résiliation à tout moment des contrats TV et VàD, après reconduction

Un nouvel article a fait son apparition dans le projet de loi, après l’adoption de cet amendement signé Catherine Procaccia (LR) 

Dans le Code de la consommation, lorsqu'un contrat de prestation de services est conclu pour une durée déterminée avec clause de reconduction tacite, le consommateur est informé par le professionnel au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme.

Cette fenêtre, et seulement elle, lui permet alors de s’opposer à la reconduction tacite. S’il la rate, le consommateur peut être réengagé pour une nouvelle période.

« Si la plupart des contrats des fournisseurs comme Netflix, Amazon TV, peuvent être résiliés à tout moment, certains limitent cette faculté au respect de la date anniversaire de souscription ». Les sénateurs ont donc tenu à préciser que pour les contrats TV et de vidéo à la demande, le consommateur pourra mettre un terme à l’abonnement à tout moment dès la première reconduction, et ce, gratuitement.

L’auteure de l’amendement cite l’une de ses cibles : « Les abonnés, parfois abonnés depuis des années, doivent alors encore payer pendant de long mois leur abonnement, afin de résilier à la date anniversaire exacte  même si celle-ci remonte à des années, sauf motifs légitimes souvent limités. Ainsi pour CANAL + en cas de déménagement, il faut parfois prouver que le logement ne permet pas de recevoir le service ».

Cette réforme en cours ne satisfait pas tout le monde. En préparation de l’examen en séance, Jean-Pierre Moga (UC) considère que le régime actuel est suffisamment protecteur. C’est tellement vrai que le modèle actuel de reconduction tacite, estime-t-il, permet aux entreprises concernées « de réaliser des investissements massifs mutualisés sur une base pluriannuelle et sur l’ensemble du parc d’abonnés, permettant d’offrir un service de qualité et à valeur ajoutée sur le territoire national ». Son amendement a été cloné par le sénateur Pierre-Jean Verzelen (Indépendants).

En guise de repli, Jean-Pierre Moga daignerait réserver la possibilité de résiliation au-delà de la première année à des « motifs légitimes » qui seraient précisés par décret.   

Trois sénateurs proposent de définir dès à présent ces motifs. Cela serait soit un changement de domicile soit lorsque le foyer fiscal évolue. Dans tous les autres cas, l’abonné resterait donc vissé à son contrat TV ou VàD. La question sera tranchée en séance. 

Haro sur les périodes d’essai

En préparation de cet examen, qui se tiendra du 28 au 30 juillet, des sénateurs LR ont aussi déposé un amendement précisant que « tout contrat conclu par voie électronique comprenant une offre d’essai gratuit faite au consommateur prend fin de plein droit au terme de cette période si, à cette date, le consommateur n’a pas expressément confirmé sa volonté d’en poursuivre l’exécution ».

En clair, si cette disposition est adoptée, une période d’essai ne pourra jamais être automatiquement transformée en abonnement payant. « La souscription ne doit pas être automatique. L’absence de réaction du consommateur ne vaut pas accord. Il faut ainsi un accord express et renouvelé du consommateur », insistent les sénateurs.

La sénatrice Nathalie Goulet entend porter cette logique aux contrats d’assurance vendus en complément d’un smartphone par exemple. Si l'élue UC obtient gain de cause, ces contrats ne pourront plus faire l’objet d'une tacite reconduction. L’assureur devra informer le consommateur du terme de l’échéance et à défaut de réponse du concerné, le contrat sera « réputé avoir été résilié. » 

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