Après Pornhub, Xnxx, Xvidéos, Tukif et xHamster, puis RedTube et Youporn, autour de Jacquie et Michel d’être mis en demeure par le président de l'Arcom d’installer un système de contrôle d’âge. Aux yeux de Roch Olivier Maistre, le choix d’un contrôle par carte bancaire, actuellement en vigueur, est insuffisamment fiable.
Un nouveau pas vers l’extension du blocage d’accès aux sites pornographiques est franchi ce jour. L’Arcom met en demeure ARES, l’éditeur des sites jacquieetmicheltv.net et jacquieetmicheltv2.net, et Detchema, celui de jacquieetmichel.net, d’installer un vrai contrôle d’âge à la porte de leurs sites.
- La mise en demeure visant jacquieetmicheltv.net
- La mise en demeure visant jacquieetmichel.net
- La mise en demeure visant jacquieetmicheltv2.net
L’un et l’autre se voient reprocher des indélicatesses avec le droit pénal. L’article 227-24 interdit en effet de rendre accessible aux mineurs un contenu pornographique, sachant que depuis une loi du 30 juillet 2020, il est impossible de se contenter d’une simple déclaration de majorité pour attester de cette majorité. Le législateur exige une solution nettement plus robuste, tout en se gardant bien de donner plus d’éclairage ou quelques pistes.
Fin 2020, Jacquie et Michel avait déjà été mis à l’index par plusieurs associations de protection de l’enfance lors d’une première saisine du CSA (ancien nom de l’Arcom avant le 1er janvier 2020). Le site avait toutefois échappé aux procédures de blocage initiées depuis lors à l’encontre d’autres sites X.
Et pour cause, J&M fut le seul à avoir fait le choix d’une solution de contrôle d’âge, baptisée My18Pass, et que ses éditeurs pensaient suffisamment robuste. L’analyse n’a pas vraiment été partagée par le président de l’Arcom, désigné par la loi gendarme de la porte d’accès aux sites pornographiques.
My18Pass jugé non fiable pour contrôler l'âge
La création d’un compte My18Pass « comporte une étape de vérification de majorité de l’utilisateur notamment par la saisie des informations relatives à une carte bancaire dont il est titulaire » écrit l’autorité dans ses mises en demeure.
Or, ce procédé n’a pas été jugé suffisamment « fiable », et pour cause : « l’utilisation d’informations relatives à une carte bancaire dont le titulaire est mineur permet la création d’un compte "My18Pass" et l’accès aux contenus pornographiques mis à disposition sur le service Jacquie et Michel TV ».
En clair ? Selon l’autorité, un mineur détenteur d’une carte bancaire pourrait se créer un compte My18Pass et accéder aux contenus X des deux éditeurs. Selon une analyse de lecture très rigoriste, les contenus pornographiques restent donc « accessibles » à ces mineurs, en contrariété avec la loi pénale.
15 jours pour trouver une autre solution
Les deux éditeurs de Jacquie et Michel disposent désormais de 15 jours pour trouver une autre solution. Sinon ? Le président de l’Arcom pourra saisir la justice afin de réclamer le blocage d’accès. C’est un nouveau nuage pour le site, alors qu’en juin dernier, Michel Piron, son fondateur, a été mis en examen « pour complicité de viol à la suite d'une enquête tentaculaire lancée en juin 2020 », rappelle notamment Marianne.
Que peuvent faire dorénavant les éditeurs ? Dans une délibération, du 3 juin 2021, la CNIL a réduit le champ du possible en refusant par exemple la collecte de pièces d’identité, ou encore la vérification de l’historique de navigation. Elle a jugé de même inconcevable d’analyser biométriquement le visage de l’internaute pour deviner sa majorité.
Les règles du RGPD sont en effet plus aiguisées alors que depuis les catégories visitées sur un site X, il est possible d'en déduire par exemple l’orientation sexuelle d’une personne, soit une donnée classée comme sensible par le règlement européen.
Il y a moins d’un mois, le Laboratoire d’Innovation Numérique de la CNIL (LINC) a toutefois mis en ligne un démonstrateur du mécanisme de vérification de l’âge, calibré pour être respectueux de la vie privée.
Une solution coécrite avec Olivier Blazy, professeur de l’École polytechnique et chercheur en cryptographie, et le Pôle d’Expertise de la Régulation Numérique (PEReN). Encore au stade préparatoire, elle repose sur un tiers de confiance certifié pour valider la majorité d'un internaute et un système de « signature de groupe » afin de protéger l'usage de cette validation sur un site X.
Seulement ce démonstrateur n'est qu'un... démonstrateur. En attendant, le 6 septembre, la justice examinera une première salve de procédures visant PornHub, TuKif, xHamster, xnxx et xVideos. Selon nos informations, PornHub réclame la transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité. D’après nos sources toujours, une question préjudicielle devrait être déposée pour en appeler cette fois à la Cour de justice de l’Union européenne.
« Une forme d'abolition déguisée »
« Alors que l’Arcom semblait "ok" avec la carte bancaire pour lutter contre l’exposition des mineurs à la pornographie, changement de ton: La CB n’est finalement pas suffisante. La CNIL refuse les documents d’identité même en passant par un tiers comme Yoti. Quelle solution ? », a twitté le compte @JacquieMichelX.
Contacté, l’éditeur nous rappelle que My18PAss est utilisé depuis deux ans et demi. « On est les seuls à avoir installé une solution et pourtant l’Arcom revient vers nous alors qu’on fait office de bon élève ! ». Pour J&M, « c’est une forme d’abolition déguisée ! »