STMicroelectronics et GlobalFoundries viennent d’annoncer la création d’une nouvelle usine en France (à Crolles, du côté de Grenoble). Elle s’inscrit dans le cadre de l’European Chips Act et bénéficie d’un investissement de 5,7 milliards d’euros, comprenant « un soutien financier important de l'État français ».
Les deux entreprises viennent d’annoncer « la signature d’un protocole d’accord (Memorandum of Understanding) portant sur la création d’une nouvelle unité de fabrication de semiconducteurs en 300 mm ». Elle sera exploitée conjointement par les deux partenaires et se situera à proximité de l’usine existante STMicroelectronics (ST) à Crolles, du côté de Grenoble.
Selon le communiqué, « cette nouvelle unité devrait atteindre sa pleine capacité d’ici 2026 pour produire jusqu’à 620 000 plaques 300 mm par an (~42 % pour ST et ~58 % pour GF) ». Les produits seront disponibles pour les clients en Europe évidemment, mais aussi partout dans le monde.
« Cette nouvelle installation prendra en charge plusieurs technologies, en particulier les technologies basées sur le FD-SOI », c’est-à-dire le Fully Depleted Silicon On Insulator.
FD-SOI et (22)FDX, késako ?
Le CEA rappelle que cette technologie – « née il y a quarante ans au cœur des Alpes françaises, à Grenoble, dans les laboratoires du CEA-Leti » –, « repose sur l’ajout d’une fine couche d’oxyde de silicium isolant à l’architecture classique des transistors. Cette innovation confère aux transistors un fonctionnement performant et économe en énergie tout en poursuivant le défi de la miniaturisation ».
Les avantages seraient nombreux, selon le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives. Il en cite quelques exemples : « 25 % plus rapide [et] 30 à 40 % moins énergivore que des transistors équivalents sur silicium massif », tension de 0,4 V seulement, grande fiabilité avec un taux d’erreur de 100 à 1 000 fois moins élevé.
Il est aussi question de la technologie FDX (ou 22FDX dans le cas d’une gravure en 22 nm) de GlobalFoundries (GF), déjà utilisée par ST depuis des années pour « proposer des produits de haute performance et économes en énergie adaptés aux applications industrielles et grand public de nouvelle génération ». Ce protocole d’accord inclut « la gamme complète de technologies sur la feuille de route de ST jusqu’au nœud 18 nm ». Durant les prochaines décennies, la demande autour de ces technologies devrait être forte dans les secteurs de l’automobile, de l’IoT et des communications mobiles.
Avec un « soutien financier important de l'État français »
Sur le plan financier, ST et GF indiquent qu’elles « recevront un soutien financier important de l'État français pour la nouvelle installation », sans plus de détails. Cette nouvelle installation « contribuera fortement aux objectifs de l’European Chips Act, y compris celui d’atteindre 20 % de la production mondiale de semi-conducteurs d'ici 2030 ».
Pour rappel, le Vieux continent ne représente actuellement que 10 %. Pour passer à 20 %, cela nécessite de quadrupler la cadence, puisque la production mondiale devrait elle aussi doubler d’ici à 2030. Ce plan est doté de 43 milliards d’euros, dont 11 milliards de fonds publics.
Cette nouvelle usine devrait créer jusqu’à environ 1 000 emplois sur le site de ST à Crolles, mais devrait aussi rayonner chez les partenaires et fournisseurs. ST n’oublie pas sa double nationalité franco-italienne et précise qu’elle continuera « d’investir dans [sa] nouvelle usine sur wafers de 300 mm à Agrate, près de Milan (Italie), qui va monter en puissance au premier semestre 2023 et devrait atteindre la pleine saturation d’ici fin 2025, ainsi que dans [sa] fabrication intégrée de produits à base de carbure de silicium et de nitrure de gallium ».
Ce dernier est notamment utilisé pour développer des chargeurs relativement compacts avec des puissances importantes, Razer propose par exemple jusqu’à 130 watts. Wikipédia ajoute qu’il s’agit aussi d’un « matériau approprié pour les panneaux solaires des satellites ».
Comme toujours, ce projet est soumis à diverses autorisations réglementaires, « notamment de la part de la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne, ainsi qu’à la finalisation de la consultation du Comité Social et Économique Central (CSEC) France de ST », précise le communiqué.
Une annonce à l’occasion du sommet « Choose France »
L’annonce de ce partenariat ce lundi 11 juillet ne doit rien au hasard, elle se fait pour l’ouverture de la cinquième édition du sommet « Choose France ». Le gouvernement en profite pour donner un chiffre que n’avaient pas précisé les deux partenaires : ce projet de « mega-fab » représente « plus de 5,7 milliards d’euros d’investissement », sans préciser néanmoins la part que représente le « soutien financier important » de l’État.
« Si cette capacité bénéficiera à toute l’industrie européenne, les porteurs s’engagent spécifiquement à travers le projet à mieux approvisionner les clients européens de faibles volumes, notamment les start-up, PME ou ETI qui ont été les entreprises les plus touchées dans la crise actuelle », ajoute l’Élysée.
De son côté, Thomas Caulfield (CEO de GlobalFoundries) indique que cette « nouvelle unité de production comprendra une capacité de fonderie GF dédié pour [ses] clients qui disposeront ainsi des innovations uniques de GF et elle sera gérée par l’équipe de GF présente sur le site ».
Le communiqué du gouvernement précise enfin que « les 14 annonces de cette 5e édition du sommet « Choose France » représentent des investissements de 6,7 milliards d’euros et la création de 4 000 emplois pérennes ». Heureusement que ST et GF sont de la partie, faute de quoi le total d’investissement serait seulement aux alentours du milliard d’euros.