There And Back Again : Rocket Lab récupère sa fusée avec un hélicoptère… mais la relâche presque aussitôt

There And Back Again : Rocket Lab récupère sa fusée avec un hélicoptère… mais la relâche presque aussitôt

Touché coulé

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Sébastien Gavois

Publié dans

Sciences et espace

06/05/2022 7 minutes
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There And Back Again : Rocket Lab récupère sa fusée avec un hélicoptère… mais la relâche presque aussitôt

Rocket Lab n’est pas passé loin de récupérer en plein vol avec l’aide d’un hélicoptère le premier étage de sa fusée Electron. Elle a même réalisé cette opération, mais les pilotes ont rapidement relâché leur prise. « Ce n'est pas grave », affirme le patron de l’entreprise, qui préfère voir le verre à moitié plein. Ce n’est dans tous les cas que partie remise.

Rocket Lab est une société fondée en 2006. Elle effectue sa première mission commerciale en novembre 2018 – nom de code « It's Business Time » – après des tests en mai 2017 (un échec) et janvier 2018 (un succès). Elle enchaine depuis les lancements avec pas moins de 24 missions commerciales à son actif, dont deux échecs : « Pics or it didn't happen » en juillet 2020 et « Running out of toes » en mai 2021. Elle a donc 22 succès à son actif.

Première tentative de récupération avec un hélicoptère

En ce début mai, une nouvelle fusée Electron a décollé pour le compte de la mission « There and back again ». À son bord, 34 satellites tous parfaitement déployés sur leur orbite (voir le replay). La société revendique au total pas moins de 146 mises en orbite par ses soins. 

Si l’objectif principal de la mission s’est déroulé sans anicroche, la société tentait pour la première fois une récupération de son premier étage avant qu’il ne tombe dans l’océan (d’où le nom de la mission). Cette tentative, qui met en scène un hélicoptère Sikorsky S-92, est la conclusion de plusieurs essais réalisés auparavant. Rocket Lab n’est pas passé loin du sans-faute cette fois-ci. 

Une méthode bien différente de SpaceX et Blue Origin

SpaceX récupère depuis des années maintenant le premier étage de ses fusées Falcon 9, une opération devenue une routine alors qu’elle était quasiment dans le domaine de la science-fiction auparavant. La société d’Elon Musk n’est pas la seule à réaliser ce genre d’opération : Blue Origin de Jeff Bezos effectue des allers-retours dans l’espace avec New Shepard, avec de riches touristes de l’espace à bord qui peuvent ainsi profiter du paysage pendant quelques minutes.

Dans les deux cas, le premier étage revient se poser en douceur sur Terre à l’aide de ses moteurs pour réduire la vitesse et ajuster la position lors de la descente. Après un cycle de vérification et de remise en état, les fusées sont réutilisées pour limiter les coûts de lancement. Une fusée de SpaceX a ainsi déjà effectué plus d’une dizaine de lancements. 

De son côté, Rocket Lab a une approche différente : une fois que le premier étage a effectué sa mission, il déploie un parachute lors de sa chute pour limiter la vitesse de descente. Un hélicoptère tente de le harponner en plein vol avant qu’il ne tombe dans l’océan. Le premier étage est alors déposé en douceur sur la terre ferme. Cette opération ne nécessite pas de rallumer les moteurs (et donc de garder du carburant) ni de développer un système de guidage permettant de venir poser le premier étage sur une plateforme. 

Après des essais sur les parachutes et sur la récupération en plein vol en avril 2020 (la fusée était alors larguée depuis un autre hélicoptère), Rocket Lab a tenté en ce début mai un déroulement complet des opérations de récupération lors de sa mission « There And Back Again ». 

L’hélicoptère accroche la fusée… puis la relâche rapidement

Le début se déroule sans problème : décollage, largage du premier étage, ouverture du parachute et descente en douceur en attendant la récupération. L’hélicoptère parvient à accrocher le filin du parachute, mais c’est à ce moment-là que les choses se gâtent. Les pilotes remarquent en effet des « caractéristiques de charge différentes » que celles rencontrées durant les essais. Par sécurité, ils ont alors décidé de relâcher le premier étage qui est donc tombé en mer. 

Peter Beck (CEO de Rocket Lab) parle d’une « prise incroyable par l'équipe de récupération » : « je ne peux pas commencer à expliquer à quel point c’était difficile […] Les pilotes l'ont relâché après l'accrochage car ils n'étaient pas satisfaits de la façon dont ils volaient, mais ce n'est pas grave. La fusée est tombée en toute sécurité dans la mer et le navire est en train de la récupérer ». 

Le premier étage a en effet été récupéré par le bateau Seaworker de Rocket Lab (qui avait déjà récupéré des premiers étages auparavant) pour ensuite être transporté dans les entrepôts de la société. « Le premier étage est en très bon état, et nous sommes impatients de l’étudier en détail quand il sera de retour dans notre usine », indique Murielle Baker (responsable des communications pour Rocket Lab).

Rocket Lab reste confiant, des moteurs pourraient resservir

« Ramener une fusée permet de gagner énormément de temps sans avoir à en construire une nouvelle à partir de zéro […] Nous aurons alors évidemment de bonnes économies sur les coûts, mais je pense que la chose la plus importante pour nous en ce moment est simplement de remettre les fusées dans la chaîne de production », explique Peter Beck  à The Verge

Sur Twitter, ce dernier partage plusieurs photos du bateau récupérant le premier étage. Il précise que le bouclier thermique a bien fait son travail et espère que certains des moteurs récupérés pourraient être réutilisés dans le cadre d’une future mission. Le but de récupérer la fusée en l’air est pour rappel d’éviter qu’elle ne rentre en contact avec l’eau de mer salée.

Quoi qu’il en soit, la société va désormais « passer les prochaines semaines à travailler sur toutes les données de ce lancement afin de s’affiner pour ses futures missions de récupération en vol ». 

Helicoptère Rocket Lab
Crédits : Rocket Lab

L’Europe en retard sur le réutilisable (et Ariane 6)

Pour rappel, l’Europe est également en train d’avancer sur son projet de fusée réutilisable, avec le démonstrateur Themis et le moteur Prometheus. La route est encore longue : le premier vol est prévu pour 2022, mais seulement avec des petits « hops ». Le premier test complet est programmé pour 2025, les lancements commerciaux pour 2030.

En attendant, Vega-C se prépare pour son vol inaugural en juin et Ariane 6 se fait toujours attendre… une situation d’autant plus problématique avec le retrait du lanceur russe Soyouz.

Écrit par Sébastien Gavois

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Sommaire de l'article

Introduction

Première tentative de récupération avec un hélicoptère

Une méthode bien différente de SpaceX et Blue Origin

L’hélicoptère accroche la fusée… puis la relâche rapidement

Rocket Lab reste confiant, des moteurs pourraient resservir

L’Europe en retard sur le réutilisable (et Ariane 6)

Le brief de ce matin n'est pas encore là

Partez acheter vos croissants
Et faites chauffer votre bouilloire,
Le brief arrive dans un instant,
Tout frais du matin, gardez espoir.

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Commentaires (3)


L’hélicoptère accroche la fusée… puis la relâche rapidement
Ils nous refons le sketch du Train pour Pau ou bien ?
ils vont avoir des problèmes… :transpi:


C’est dommage, mais c’est comme ça qu’on apprend. La méthode SpaceX, on tire on casse on corrige.



Faut juste arriver à l’objectif, sinon adieu le réutilisable.



Le dernier paragraphe remue le sabre dans la plaie béante de l’aérospatial européen…



linkin623 a dit:


C’est dommage, mais c’est comme ça qu’on apprend. La méthode SpaceX, on tire on casse on corrige.
[…]




Comme avec le premier vol d’Ariane V en 1996, mais sans la crise de nerf des décideurs, journalistes et autres commentateurs “avisés”, donc. Autre pays, autre mentalité.