Consoles portables rétro, un néo marché en expansion

Tous les chemins mènent à ROM
Consoles portables rétro, un néo marché en expansion
Crédits : robtek/iStock

Malgré les pénuries dues au covid et aux problèmes d’approvisionnement en tout genre, le marché émergent des consoles portables fait bouillonner le cœur des adeptes de retrogaming. De plus en plus puissantes, elles s’ouvrent à des consoles plus « modernes », mais aussi au streaming et au cloud gaming.

Il fut un temps où des consoles estampillées rétro, chemisées d’un plastique mal moulé et tirées à bout de bras par un processeur toussotant, arrivaient uniquement dans les mains du petit dernier de la famille avant de prendre la poussière dans un placard.

Puis les puces mobiles se sont invitées dans des machines un peu plus chères, mais mieux finies, avec davantage de puissance et des écrans plus fins. Animées par des versions modifiées de Linux et Android, elles accueillent quantité d’émulateurs et reçoivent des ROM par le biais d’une connexion à un PC ou une carte SD. La communauté retrogaming s’est rapidement intéressée à ces petits périphériques à prix accessible.

Frontend, ROM, de quoi parle-t-on ?

Avant de continuer sur l’histoire récente des consoles rétro, ouvrons une parenthèse lexicale. Si vous n’avez jamais succombé au plaisir de relancer Super Mario World, Chrono Trigger, Aladdin (version Megadrive, évidemment) ou Streets of rage sur une console moderne, sachez que les ROM sont les jeux que l’on retrouve sur des sites peu recommandables (nous viendrons plus tard sur la partie légale).

Les frontends sont une architecture conçue par des développeurs afin d’améliorer l’ergonomie logicielle d’une machine. Ils cachent les émulateurs, soit les programmes capables de lancer les jeux, derrière une présentation digne de n’importe quelle console moderne.

Après cette petite mise au point, revenons à ce marché encore balbutiant en 2017. Le Chinois Anbernic repère le filon et connait un vif succès avec notamment la RG 351 tournant sous un Linux modifié. Elle accueille les émulateurs d’un bon nombre de consoles de salon et portables (Game Boy, Super Nes, Megadrive ou la dispendieuse Neo Geo…) d’avant le milieu des années 90, ainsi que des centaines de jeux d’arcade.

Anbernic 351
Anbernic RG 351

Parmi les concurrentes, toujours aux alentours de 100 euros, la Retroid Pocket animée par Android arbore des coques dont les codes couleur piochent allégrement et sans vergogne chez Nintendo. Un peu plus véloce que l’Anbernic, son processeur reste limité pour garder un prix contenu et l’écran ne dépasse pas les 4 pouces.

L’Odroid Go advance marque aussi les esprits par son côté Do It Yourself, car la console est envoyée en kit ; le montage est simple, mais gratifiant. L’Odroid Go Super, sa grande sœur, abandonne ce concept, mais propose enfin un dalle LCD de 5 pouces, pour un produit montant cette fois à un peu plus de 120 euros. Un cap de prix est franchi, mais le public répond présent.  

Odroid Go Advance
Odroid Go Advance 

Les chiffres de ventes de ces consoles ne sont jamais officiellement révélés, et la communication à leur sujet reste limitée. Il ne faut toutefois pas sortir de Saint-Cyr pour comprendre que le marché intéresse une communauté de plus en plus large. En témoigne le nombre de modèles et de clones se multipliant sur les sites de revendeurs et les problèmes de stock qui apparaissaient déjà avant la pandémie.

Le succès de ces machines tient aussi aux frontends de mieux en mieux conçus et permettant de se constituer une ludothèque agréable à parcourir. Parmi eux, le Français Recalbox convainc par sa facilité d’utilisation et le pont qu’il crée entre logiciel et matériel. Sa solution, taillée pour les Raspberry, s’installe avec la même facilité sur une mini console de salon qui coutait à peine plus de 60 euros coque comprise avant le temps béni des pénuries, que sur le GPI Case de Retroflag, une portable reprenant le design (préférez le terme form factor si vous voulez briller en société) de la Game Boy.  

La crise du Covid et le cortège de problèmes logistiques qui l’accompagne donnent un coup de frein passager à ce marché. Nous avons quand même vu émerger quantité de modèles bien plus puissants sur lesquels nous allons revenir, mais entre-temps, deux éléments importants sont venus s’ajouter à la fête.   

Le streaming et Valve s’en mêlent

Les consoles nomades sous Android sont amenées à sortir du pré carré du retrogaming. Déjà, nous allons le voir, leurs puces de plus en plus puissantes poussent le curseur du retro au point de faire tourner des consoles bien plus récentes. Surtout, elles peuvent accueillir n’importe quelle application, et notamment celles de streaming.

Compatibles Wi-Fi, elles utilisent le Steamlink de Valve pour lancer la ludothèque PC présente sur votre ordinateur. Elles se connectent aussi au Xbox Game Pass pour accéder au catalogue du service de Microsoft. Sur le papier, ce sont des avantages intéressants, mais les limites des anciennes générations de console (comprenez par-là d’avant 2020) en termes d’écran et de vélocité de processeur peinent à convaincre de craquer pour ces usages. Une montée en gamme est inévitable. Un autre acteur s’est, entre temps, invité à la fête.

En sortant son Steamdeck, Valve focalise les utilisateurs sur ce type de console nomade grand format ; un marché que l’on croyait réservé à la Switch de Nintendo. Il ne s’agit pas d’une console rétro, mais la communauté fan des vieux hits a immédiatement testé les aptitudes de cette nomade sur des consoles de moins en moins anciennes. Le résultat est à la hauteur des espérances.

Steamdeck Valve
Steamdeck de Valve

Les consoles « retrogaming only » à suivre

L’Anbernic RG 503. Animée par une puce Rockchip RK3566 à 1,8 GHz, un processeur graphique Mali G52, mais seulement 1 Go de RAM, cette console n’est pas assez pourvue en mémoire pour accueillir Android. Elle propose un écran OLED (sa plus grande force) de 4,95 pouces en 960 x 544 pixels pour un prix inférieur à 150 dollars.

On reste sur un produit intéressant pour redécouvrir les vieux hits des portables, consoles de salon et machines d’arcade jusqu’au milieu des années 90. Oubliez la Nintendo 64, la Saturn et tout ce qui suit. La sortie HDMI et la connexion Bluetooth autorisent le jeu sur téléviseur avec des manettes. La concurrence, nous allons le voir, risque d’être cruelle avec ce type de machine.   

Anbernic RG503
Anbernic RG503 

Retroid pocket 2+. Avec son processeur Tiger T310 à 2,0 GHz, un GPU power VR GE8300 et 2 Go de RAM cette mini console tournant sous Android 9.0 offre un peu plus de vélocité que l’Anbernic RG 503 pour un prix inférieur (99 dollars). En revanche, il faudra composer avec un écran de plus petite taille (3.5 pouces en 640 x 480 pixels).

Ce regain de puissance permet d’ajouter au catalogue la PSP, la Nintendo 64, la Nintendo DS ou la Dreamcast selon les titres. L’environnement de Google ouvre l’accès au Steamlink, voire au Xbox Game Pass, mais sur une dalle de cette taille, l’intérêt reste limité. La machine reste impressionnante au regard de son prix.

Retroid Pocket 2+
Retroid Pocket 2+ 

GPI Case 2. Nous venons d’évoquer deux consoles qui s’inscrivent dans une progression logique de ce type de machine ; plus de puissance, meilleure résolution, etc. Passons à un peu d’innovation. Ce GPI case 2 a non seulement repris le design de la Game Boy (ou du Game Boy, on vous laisse relancer le débat en commentaire), mais a eu la bonne idée d’y ajouter un dock façon Switch.

L’écran IPS de 3 pouces en 640 x 480 pixels sera donc parfait pour émuler les consoles nomades, et une fois revenu à la maison, le dock doté de deux prises USB 2.0 accueillera n’importe quel type de manette moderne. Ce sera ainsi l’occasion de retrouver les sticks manquant au boitier afin de faire tourner les jeux PlayStation, Nintendo 64 ou même Dreamcast, puisque la carte Compute Module 4 de Raspberry à monter dans cette console en est capable.

Surtout, ce modèle est équipé d’une batterie rechargeable contrairement au précédent nécessitant des piles. Disponible à moins de 90 euros, auxquels il faut ajouter la carte CM4, ce Case 2 sera une excellente solution lorsque la pénurie aura pris fin chez Raspberry (dernier trimestre 2022 a priori)

GPI Case 2
GPI Case 2

Odin Lite/Base/Pro. Nous arrivons à la montée en gamme tout à fait prévisible de ce type de produit. Les consoles d’Odin se déclinent en trois modèles disponibles sur le site de financement indiegogo. L’Odin lite, à 184 euros, dispose d’une puce Mediatek grimpant jusqu’à 2,4 GHz, un GPU Mali G68, 4 Go de RAM, un écran 5,98 pouces IPS LCD en 1080p, Wi-Fi 6, Bluetooth 5.2, le tout tournant sur Android 11.

Des versions plus musclées, la Base (226 euros) et la Pro (272 euros) accueillent un Snapdragon 845 atteignant les 2,8 GHz, un GPU Adreno 630, 4 ou 8 Go de RAM et 64 ou 128 Go d’espace de Stockage selon les modèles. Un dock disponible à 47 euros enrichit la bête de cinq ports USB 3.0, une sortie HDMI, un port Gigabit Ethernet, un disque SATA 2.5 pour compléter votre ludothèque et des connectiques pour manettes Nintendo 64 et Gamecube.

L’offre légale du streaming de jeux PC et Android y côtoie l’émulation des consoles jusqu’à la PlayStation 2, Dreamcast, Nintendo 64 et toutes leurs glorieuses ainées ; de quoi mettre sur la touche l’Anbernic RG 503, voire le GPI Case 2 qui, pour quelques petites dizaines d’euros de moins, n’offre pas tant de services.

Odin

Les consoles portables puissantes, chères et retro

Steamdeck. la console mobile de Valve n’est évidemment pas dédiée au retrogaming. Avec son APU spécialement conçu par AMD capable de monter jusqu’à 3,5 GHz, un GPU RDNA 2, 16 Go de RAM et un écran 7 pouces 60 Hz de 1280 x 800 pixels, elle fait tourner les jeux modernes compatibles avec sa plateforme.

Certes elle déçoit sur l’autonomie, l’écran manquant de couleurs et la soufflerie se déclenchant sur les jeux gourmands, mais elle a immédiatement fait briller le regard des retrogamers. Que ce soit en repassant par Windows ou dans le SteamOS, cette communauté crée ou améliore des outils existants, notamment EmuDeck, pour émuler toutes les anciennes consoles d’avant 2000 auxquelles vous pouvez ajouter la PlayStation 2, PlayStation 3, la Wii, la WiiU et même la Switch, ce qui ne manquera pas de ravir Nintendo.

Pour les consoles plus récentes, le résultat dépend des jeux, la compatibilité n’est pas assurée à 100 %, mais ce versant rétro est la cerise sur le gâteau d’une machine capable de faire tourner une offre légale conséquente ainsi que le Xbox Game Pass. Cette polyvalence rend le prix, de 419 à 679 euros selon les modèles, bien plus digeste.  

Ayaneo Next et Air. Tout marché qui s’installe durablement auprès des utilisateurs voit un jour arriver la crème de la crème, le produit pour ceux qui ne regardent pas à la dépense. Aujourd’hui, il se trouve du côté de l’Ayaneo Next, financée sur Indiegogo. Équipée d’un Ryzen 7 5825U, capable de monter à 4,5 GHz, un processeur graphique Vega 8, 16 Go de RAM, de 1 à 2 To d’espace de stockage selon les modèles, et d’un écran LCP IPS de 7 pouces en 1200 X 800, cette machine fait tourner les jeux actuels à la manière d’un Steam Deck.

Seulement, le constructeur n’allait pas se passer de la manne potentielle des fans de l’émulation et le montre ostensiblement sur sa page Indiegogo avec des tests de jeux issus de la Xbox 360, PS2, PS3 et de la Switch, rien que ça ! Le prix est évidemment à la hauteur de cette puissance : 1 335 dollars pour la version Next et 1535 dollars pour la pro.

Le fabricant va annoncer cette nuit une nouvelle console : l’Ayaneo Air. Tout juste savons-nous avec certitude qu’elle disposera d’un écran OLED (avec un espace colorimétrique de 109 % du NTSC), pèsera moins de 420 grammes, exploitera un APU AMD et, niveau tarif, elle se placera en dessous des autres consoles du constructeur. 

Les Ayaneo ne sont pas les premiers à exploiter Windows sur une console portable. La GPD Win réussissait à réunir PC et console avec un clavier amovible. Ces produits orientés jeu vont se multiplier avec les processeurs basse consommation de plus en plus performants.  

Aya Neo Next
Aya Neo Next 

D’autres consoles en attente, un marché en devenir

On sent que la pénurie est seule responsable de la mise en suspens de ce marché, et cela ne va pas s’arranger à court terme avec les problèmes de pandémie que rencontre la Chine.

Toutefois, de nombreuses autres machines ont fuité sur le web. Parmi elles, quelques modèles d’entrée de gamme, telle que la Miyoo P60, dotée d’un écran 4 pouces IPS et animée par un processeur MediaTek Helio P60 à 2 GHz, un GPU Mali 72 et 3 Go de RAM, le tout tournant sous Android.

La Retroid Pocket 3 a déjà aussi fait l’objet de quelques fuites. Elle devrait gagner en taille d’écran ainsi qu’en puissance d’ici la fin d’année. Odin ayant ouvert la voie du milieu de gamme, Anbernic ne tardera pas à s’y engouffrer avec le modèle Win 600, animé par Windows 10 et dont les caractéristiques précises n’ont pas encore été dévoilées.

Sur le haut de gamme, OneXPlayer reste la société à surveiller. Régulièrement mises à jour, leurs consoles accueillent des processeurs Core i5, i7, Ryzen 5 ou 7 pour des tarifs oscillants entre 1000 et 1500 dollars. Il reste facile de se procurer les générations précédentes sur des sites marchands français.  

OneXPlayer Mini
OneXPlayer Mini

Il manque à ce marché un ou deux acteurs connus pour toucher un public plus large. Gageons que Lenovo avec son Legion Play ou Razer avec le G3X Gen1 infuseront le gout sucré de la tentation aux quelques joueurs amers qui répondent encore « je peux en faire autant en ajoutant une manette à mon téléphone Android ».

Ils oublient un peu vite la praticité d’une console dédiée, ergonomique, prête à l’emploi, bénéficiant d’un frontend tellement plus ludique et qui ne grignotera pas l’autonomie du téléphone. Vu le succès de la Switch, ces nomades ont assurément de l’avenir ! 

Lenovo Legion PlayRazer Gen1
Lenovo Legion Play et Razer Gen1

Est-ce bien légal ? 

Si vous n’avez ni le matériel original ni le jeu, alors non, ça ne l'est pas. Certains ne manqueront pas de se trouver des excuses comme « ce titre n’est plus commercialisé », « l’éditeur ne fait plus valoir ses droits », « j’ai la cartouche à la maison » (etc.). Tout cela n’a que peu, voire pas, de valeur juridique.

Dans les faits, nous sommes davantage sur un marché gris ne respectant pas les lois en vigueur, mais contre lequel il est difficile de lutter. Les éditeurs détournent pour certains poliment le regard, conscients que l’engouement pour leur vieux catalogue soutient la commercialisation des remakes ou remasters de jeux et la vente de matériel.

Aussi avons-nous vu arriver des Nes Mini, Super Nes Mini, Neo Geo Mini, Capcom Home Arcade, Astro City Mini auxquelles vous pouvez ajouter les « ordinosaures » du type des Commodore 64 Mini ou Amiga 500 Mini et on en passe !

En somme, tout devient mini dans notre vie de rétrogameurs. Ce marché de la nostalgie s’effectue avec plus ou moins de complaisance pour la possibilité d’ajouter des ROM. Sans surprise, Nintendo verrouille au possible ses systèmes alors qu’Amiga, par exemple, ne s’y oppose aucunement. Mais de manière générale, les hackers rappellent très vite aux éditeurs réfractaires que tous les chemins mènent à ROM !

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