Après Pornhub, Xnxx, Xvidéos, Tukif et xHamster, l’Arcom s’attaque à deux autres piliers du porno en ligne. Au Journal officiel, ce matin, l’autorité indépendante a publié deux mises en demeure à l’encontre de MG Freesites Ltd, la société éditrice de YouPorn et RedTube.
L’ARCOM vient d’enclencher une nouvelle procédure de blocage avec dans le viseur, deux sites bien connus dans le secteur du X, RedTube et YouPorn.
L’un et l’autre se voient reprocher de se contenter d’une simple déclaration de majorité pour contrôler l’âge des internautes au seuil de leur page d’accueil. « Cette mesure ne permet pas de garantir que seul un public majeur est susceptible d'accéder aux contenus pornographiques disponibles » répond l’Arcom.
Le 10 février, l'autorité faisait constater par huissier que fr.redtube.com comme youporn.com se contentent d’un simple disclaimer où l’internaute certifie avoir plus de 18 ans. Un premier courrier était adressé à l’éditeur. Les observations adressées le 23 février par MG Freesites LTD n’ont pas convaincu l’autorité qui a donc décidé d’adresser cette double mise en demeure.
Les deux sites ont désormais 15 jours pour trouver une solution plus robuste que la simple déclaration d’âge. Sinon ? Le président de l’ARCOM pourra saisir la justice afin de réclamer le blocage d’accès chez les principaux fournisseurs d’accès français.
Ce blocage s’articule sur deux dispositions mises à jour par la loi contre les violences conjugales du 30 juillet 2020.
La première est prévue par l’article 227-24 du Code pénal qui interdit de diffuser le moindre contenu pornographique s'il est « susceptible d'être vu ou perçu par un mineur ». Les éditeurs risquent alors jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Le législateur a précisé en 2020 que cette infraction reste constituée lorsque la vidéo, le texte, la photo X est précédée d'une simple déclaration de majorité comme on en voit fleurir sur la plupart des sites pour adultes.
Du côté des intermédiaires, la même loi a créé une procédure de blocage spécifique entre les mains du président de l’ARCOM. Quand il constate qu’un site contrôle l’âge des internautes par un simple disclaimer, il peut lui adresser une demande d’observation suivie, comme c'est le cas échéant, par une mise en demeure de trouver une solution technique plus robuste.
En cas d'inexécution de cette injonction, en clair si le contenu porno reste accessible aux mineurs, Roch-Olivier Maistre peut saisir le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins d'ordonner le blocage d’accès chez les FAI, et même le déréférencement dans les moteurs de recherche.
Une fois la décision prise, les internautes qui tentent d’accéder aux sites bloqués sont redirigés vers une page de l'autorité « indiquant les motifs de la mesure de blocage ». C’est en tout cas ce que prévoit ce décret d’application.
Fronts judiciaires contre le porno
Cette procédure initiée contre RedTube et YouPorn vient s’ajouter à celles déjà en cours à l’encontre de Pornhub, Xnxx, Xvidéos, Tukif et xHamster.
Assignés en mars dernier, les principaux FAI français, à savoir Orange, Orange Caraïbe, Free, Free Mobile, Bouygues Télécom, Colt Technologies Services, SFR, SFR Fibre SAS, la Société réunionnaise du radiotéléphone et Outremer Télécom, ont rendez-vous à l'audience du blocage le 24 mai prochain.
Dans le document qui a été envoyé aux FAI, l’ARCOM a résumé l’économie générale des observations adressées par les sociétés éditrices des sites épinglés. Elles se limitent à « prétendre qu’elles seraient placées dans une situation d’insécurité juridique liée à l’absence de "lignes directrices" éditées par l’ARCOM concernant les modalités techniques satisfaisantes de restriction d’accès à un public mineur ».
Et pour cause, il revient à chaque éditeur de trouver « LA » solution permettant de s’assurer de l’âge de la personne derrière une adresse IP. Une mesure qui a fait sourciller la CNIL au regard de l’exploitation possible de données à caractère personnel qualifiées de « sensibles » par le RGPD : des contenus visités, il est aisé de déduire les orientations sexuelles d’un internaute.
Pour complexifier davantage la situation, cette procédure hybride, où une phase administrative devant l’ARCOM est suivie par une phase judiciaire, a été doublée par une autre procédure cette fois plus classique. Une procédure où le Parquet a été jusqu'à imaginer que les FAI vérifient l'âge à l'entrée des sites pornographiques. Notre compte rendu d'audience :
Le 19 mai, la cour d’appel de Paris rendra sa décision sur cette action initiée par e-Enfance et la Voix de l’enfant, deux associations qui réclament le blocage de plusieurs sites :
- PornHub
- mrSexe
- iciPorno
- Tukif
- Xnxx
- xHamster
- xVideos
- YouPorn
- RedTube
Dit autrement, plusieurs sites mis à l’index par l’ARCOM le sont aussi par ces deux associations. Les mises en demeure YouPorn et RedTube publiées ce matin au Journal officiel pourraient donc s’avérer inutiles si la cour d’appel décide le 19 mai prochain de donner une suite favorable aux prétentions d'e-Enfance et de la Voix de l'enfant.
Une certitude : ces multiples fronts ont ceci de particulier que seule l’accessibilité de ces contenus aux mineurs est interdite, quand le porno n’est pas illicite en lui-même. Ce blocage par IP, s’il est décidé, va toutefois rejaillir sur les majeurs, du moins ceux qui ne savent pas encore comment le contourner.