Plan quantique en France : une plateforme de calcul hybride, deux EquipEx+ et dix projets

Plan quantique en France : une plateforme de calcul hybride, deux EquipEx+ et dix projets

Soit un total de 13, ça porte bonheur ?

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Sébastien Gavois

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Sciences et espace

11/03/2022 8 minutes
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Plan quantique en France : une plateforme de calcul hybride, deux EquipEx+ et dix projets

Un an après l’annonce d’Emmanuel Macron, le Plan quantique avance en France. Une plateforme hybride a été lancée il y a quelques semaines. Il est désormais question de dix projets et de deux « équipements d'excellence » financés par le Programme et équipement prioritaire de recherche (PEPR).

Il y a un an, le gouvernement lançait son Plan quantique avec 1,8 milliard d’euros à la clé, dont 1 milliard financé par l’État. Nous ne reviendrons pas sur ses ambitions, longuement détaillées dans un précédent dossier.

Nous avons aujourd’hui plus de détails sur le Programme et équipement prioritaire de recherche (PEPR) doté de 150 millions d’euros. Il est piloté conjointement par le CEA, le CNRS et Inria.

C’est quoi la plateforme nationale de calcul quantique hybride ?

Le rôle de ce PEPR est de soutenir « des activités de recherche au meilleur niveau mondial » et de « nourrir les actions plus aval de la Stratégie nationale quantique, telle que la Plateforme nationale de calcul quantique hybride HQI (HPC Quantum Initiative) ». Cette dernière a été lancée le 4 janvier 2022, avec un budget de 70 millions d’euros pour un objectif de 170 millions au total.

Le but de cette plateforme de calcul hybride est, comme son nom le laisse penser, d’interconnecter systèmes classiques et ordinateurs quantiques. Les contours sont encore assez flous. Cédric O expliquait par exemple qu’elle devrait « permettre à nos chercheurs et spécialistes d’accéder aux ordinateurs quantiques » et « renforcer notre écosystème de start-up quantiques ».

« Ces moyens seront mis à disposition d’une communauté internationale regroupant des laboratoires, des startups et des industriels. L’objectif est de faciliter leur accès aux capacités de calcul quantique, afin qu’ils puissent identifier, développer et tester de nouveaux cas d’usages », indiquait le Gouvernement. Cette plateforme est hébergée au Très Grand Centre de Calcul (TGCC) qui se trouve à Bruyères-le-Châtel. 

C’est finalement le secrétariat général pour l'investissement qui a donné le plus de détails :

« C’est un centre de calcul qui va accueillir plusieurs ordinateurs quantiques différents, au fur et à mesure de leur dispo, pour être l’un des seuls endroits au monde où on pourra accéder à du calcul quantique sur plusieurs architectures différentes (ça c’est le côté #plateforme).

Mieux encore, cette puissance quantique sera interfacée avec des supercalculateurs « classiques », parce que certains problèmes complexes peuvent être découpés en sous-problèmes dont certains seront résolus plus efficacement en calcul classique, et d’autres ne pourront être adressés que par le calcul quantique (ça, c’est le côté #hybride) ».

Qubits à l’état solide : PRESQUILE et RobustSuperQ 

Aujourd’hui, les centres de recherches impliqués le « Plan quantique » présentent dix grands projets autour de quatre thèmes : « développement de qubits robustes à l’état solide pour le calcul quantique », « de qubits et de capteurs à base d’atomes froids », « de codes correcteurs d’erreurs, d’algorithmes quantiques et solutions de cryptographie post-quantique » et enfin la « communication quantique, et au-delà ».

Pour Neil Abroug, l’enjeu autour de ces projets est important : « Quelques pépites issues de la recherche académique française rayonnent d'ores et déjà au niveau mondial et sont en compétition avec des industriels nord-américains tels qu'Amazon, Google ou Intel […] L'enjeu est donc d'asseoir le rayonnement de la recherche française et d'en faire le bras armé de la compétitivité des entreprises françaises », expliquait-il devant le Sénat. 

Dans le premier domaine des qubits robustes à l’état solide pour le calcul quantique, deux projets ont été retenus : PRESQUILE qui tente de « lever les verrous scientifiques et technologiques de l’intégration des qubits de spin dans les technologies CMOS bien établies » et RobustSuperQ qui veut « accélérer la R&D française sur les qubits supraconducteurs et hybrides protégés par construction contre la décohérence ».

La seconde société a de fortes ambitions et espère avoir « démontré » dans les cinq ans à venir un « processeur quantique haute-fidélité pilotable et mesurable, qui n’existe encore sur aucune plateforme (optique, atomique ou à l’état solide) ». Devant le Sénat, Philippe Chomaz (directeur scientifique du CEA), expliquait en octobre dernier que RobustSuperQ était un projet « Flagship » sur des « puces supraconductrices, avec la volonté d'équiper Grenoble et Saclay en capacité de fabrication et de travailler avec l'ensemble des acteurs de ces voies alternatives ».

Qubits à atomes froids : QubitAF et QAFCA

Passons aux qubits à atomes froids, un domaine où la France possèderait « une avance concurrentielle par rapport à ses partenaires », c’est du moins ce qu’affirmait Neil Abroug, coordinateur national de la stratégie quantique française. Deux projets ont été retenu.  

QubitAF qui « vise à améliorer les plateformes à atomes froids pour la simulation quantique, en augmentant le nombre d’atomes manipulés, en certifiant les résultats et en précisant les performances de ces plateformes ». Nous avons aussi QAFCA, qui « cherche à développer des capteurs à atomes froids compacts et transportables pour mesurer le champ de pesanteur, avec des applications dans l’analyse du changement climatique et l’anticipation des catastrophes naturelles, voire le génie civil ou le stockage du CO₂ ».

Trois projets sur la partie logicielle et la correction d’erreur…

Trois projets sont retenus pour la correction d’erreur et les algorithmes. La partie logicielle est importante pour Neil Abroug qui affirmait donc devant le Sénat qu’il « faut absolument se saisir, car cette dimension fera la cohérence des actions entreprises du côté du matériel ».

NISQ2LSQ tout d’abord pour « améliorer et développer de nouvelles stratégies de correction d’erreurs nécessaires pour mettre en œuvre des ordinateurs quantiques tolérants aux fautes ». EPiQ se concentre de son côté « sur la spécification et la compréhension des briques logicielles nécessaires au bon fonctionnement d’un processeur quantique (compilation, manipulations, optimisation, langages intermédiaires, certification, etc.) » et développe aussi de nouveaux algorithmes quantiques.

Le projet PQ-TLS se penche sur « de nouveaux schémas de chiffrement et signature, basés sur une multitude d’approches, pour faire passer la cryptographie à l’ère post quantique, c’est-à-dire pour rendre les protocoles résistants aux attaques d’un ordinateur quantique ». Si les calculateurs quantiques ne sont pas encore une « menace » pour le moment, les chercheurs se préparent déjà depuis longtemps à les contrer. 

… et trois autres sur la communication quantique

Enfin, dans la « communication quantique » on retrouve trois projets. DIQKD sur « la distribution quantique de clés de type « boîte noire », solution prometteuse, mais exigeante en termes de développements expérimentaux et théoriques, qui permet de garantir la sécurité de communications même lorsque les appareils employés ne sont que partiellement caractérisés ».

Qmemo veut « optimiser les performances des mémoires quantiques, éléments cruciaux pour déployer des réseaux quantiques sur de longues distances, car elles connectent les sous-segments divisant la distance globale, comme des répéteurs quantiques ». Enfin, QcommTestbed « veut doter la France d’une plateforme d’essais coordonnée à échelle nationale, utilisée pour des démonstrations d’applications de communication quantique ».

Du QaaS (quantique as a service) et des diamants

Côté matériel, le PEPR finance deux EquipEx+, le nouveau mot à la mode pour parler d’« équipement d'excellence ». Ces EquipEx+ n’ont pas attendu ces fonds pour se développer et existaient déjà. 

On retrouve tout d’abord aQCess (Atomic quantum computing as a service), piloté par l'université de Strasbourg. Cette plateforme « permettra d’effectuer, en exploitant les effets quantiques à l’œuvre dans des systèmes d’atomes piégés par lasers, des calculs actuellement impossibles à résoudre même sur les plus grands supercalculateurs », expliquent Guido Pupillo et Shannon Whitlock, chercheurs à l’Institut de science et d'ingénierie supramoléculaires et coordinateurs du projet. 

Il s’agit d’une « véritable installation publique dédiée à l’informatique quantique. aQCess sera un outil largement utilisé pour la recherche, l'enseignement multidisciplinaire, la formation, mais aussi par les entreprises ou les start-up investissant dans les technologies quantiques », ajoutent le CEA et le CNRS.

Le deuxième EquipEx+ est e-DIAMANT, piloté cette fois-ci par l'École normale supérieure Paris-Saclay.  Son but est de « positionner la France comme un leader mondial de la fabrication de capteurs en diamant et ainsi soutenir les grands enjeux actuels dans le domaine des technologies quantiques ».

Grâce à ses propriétés physiques, le diamant possède en effet un énorme potentiel industriel, rappelle le CNRS : « L’introduction de manière contrôlée d’impuretés dans son réseau de carbone conduit à la création de centres colorés qui ont révolutionné le domaine des technologies quantiques ». On vous passe les détails que vous pouvez retrouver sur ce site dédié, mais sachez que les débouchés sont nombreux : les communications, la santé, la sécurité et les sciences fondamentales.

Écrit par Sébastien Gavois

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

C’est quoi la plateforme nationale de calcul quantique hybride ?

Qubits à l’état solide : PRESQUILE et RobustSuperQ 

Qubits à atomes froids : QubitAF et QAFCA

Trois projets sur la partie logicielle et la correction d’erreur…

… et trois autres sur la communication quantique

Du QaaS (quantique as a service) et des diamants

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Commentaires (4)


e-DIAMANT, PQ-TLS, DIQKD, aQCess, EPiQ… Plein de drôles de noms :)


Il manque les qbits quantiques (avec des photons intriqués dans des fibres optiques). Ils ont l’avantage de fonctionner à température ambiante et d’interagir peu avec eur envronnement donc d’être très stable. On a aussi des startups prometteuses dans le domaine comme Quandela.
https://idealogeek.fr/ordinateurs-optiques-informatique-quantique/



start-up quantiques




Joli :)
Tu mets des sous dans une boite, et tu ne sais pas si la boite produit un truc avec ou pas tant que la boite n’est pas morte / ouverte. La start-up de Schrödinger :)


Magnifique !!!
J’adore cette image qui est finalement assez proche de la réalité