Composition, technologies et fonctionnalités : on vous dit tout du disque dur moderne

SED, 4Kn et CMR : trio gagnant ?
Composition, technologies et fonctionnalités : on vous dit tout du disque dur moderne
Crédits : D-Keine/iStock

Les composants d'un PC, c'est compliqué. Et malgré les apparences, ce bon vieux disque dur (HDD pour les intimes) est l'un des plus complexes à choisir qu'il soit. Car sous son aspect monolithique se cache de nombreuses technologies lui permettant d'offrir performances et densité.

Le principe de fonctionnement d’un disque dur est assez simple, basique même, et reste le même depuis sa première apparition en 1956. C’est à cette époque que le premier modèle associé à un ordinateur fut créé, puis commercialisé l’année suivante par IBM. Nous avions d'ailleurs consacré un article à ce sujet dans notre magazine #1.

Un disque dur, c’est bien plus qu’un code couleur

En plus de 60 ans, ils ont largement évolué avec une capacité décuplée. Notamment grâce à de multiples technologies et fonctionnalités. Pourtant, en 2020, choisir un disque dur cela se résume trop souvent à regarder une capacité, un prix, parfois une vitesse de rotation ou la gamme représentée par une couleur.

Les fabricants proposent en effet des modèles optimisés pour le stockage en NAS, dans un PC de bureau, un serveur, la vidéosurveillance, etc. Parfois c'est une segmentation marketing assez arbitraire, dans d'autres cas on a droit à certaines optimisations pour le RAID dans le firmware, matériellement, la gestion de certaines commandes... mais c'est le plus souvent assez peu détaillé. Le monde du HDD est loin d'être celui de la transparence.

Et cela réserve quelques (mauvaises) surprise lorsque l'on ne fait pas attention à ce que l'on achète. Des affaires récentes (ici ou ) nous l'ont durement rappelé. Car en réalité, choisir un HDD c'est choisir tout un ensemble de technologies, de paramètres qui peuvent avoir des incidences importantes sur les performances et la fiabilité.

Pour vous permettre de bien comprendre de quoi il retourne et donc de choisir en connaissance de cause, voici notre guide de survie. Vous serez ainsi armé pour analyser et comparer les fiches techniques.

Plateaux, pistes, secteurs et tête de lecture/écriture

Un disque dur est une mémoire de masse utilisant un ou plusieurs supports magnétiques, que l’on appelle communément des plateaux. Chacun dispose de pistes circulaires concentriques (des ronds ayant le même centre), elles-mêmes découpées par des rayons (partant du centre) pour former des secteurs. 

Chaque secteur comprend un certain nombre de bits – 512 ou 4096, nous y reviendrons – et chaque bit est enregistré à l'aide d'un aimant pouvant prendre deux « orientations » : l'une correspond au 0, l'autre au 1. On obtient ainsi bien un système binaire.

On y retrouve têtes de lecture/écriture qui se déplacent pour atteindre les différentes pistes circulaires; elles sont au bout des « bras » que l'on voit en général sur les photos (voir ci-dessous). Lors de grosses sessions de lectures et/ou d’écritures on entend parfois le disque dur « gratter », un bruit venant du déplacement rapide des têtes.

Disque dur

Crédits : BrandonSeidel/iStock

Les plateaux tournent à plusieurs milliers de tours par minute, généralement entre 5 400 et 7 200 tpm mais cela peut parfois aller au-delà sur des modèles spécifiques et/ou pour serveur. Tous les secteurs d’une piste défilent ainsi sous les têtes. Il suffit alors de lire ou écrire la donnée (à l’aide d’un champ magnétique) au bon moment.

Parfois, les HDD sont remplis d'hélium. Cela nécessite des protections particulières, mais améliore l'efficacité.

CMR, LMR, PMR, SMR : ça change quoi ? 

Maintenant que les bases sont posées, passons aux différentes technologies, en commençant par celles concernant la manière d'accéder aux données. Il existe en effet plusieurs manières de stocker des bits sur un plateau : on parle de technologies xMR (Magnetic Recording). À commencer par le LMR (Longitudinal Magnetic Recording).

C'était la méthode originelle. Dans ce cas, la magnétisation de chaque bit – les 0 ou 1 – était alignée horizontalement, c’est-à-dire parallèlement au plateau qui tourne à l'intérieur du disque dur. Cela fonctionne bien, mais ce n'est pas franchement optimal pour la densité, la quantité de données que l'on stocke par plateau.

C’est alors que le PMR (Perpendicular Magnetic Recording) est arrivé. La magnétisation de chaque bit est cette fois-ci alignée verticalement par rapport au plateau, permettant ainsi de stocker plus de données sur une même surface. De quoi initier une course à densité qui ne faisait alors que commencer…

Notez que PMR et LMR sont parfois regroupés sous une même appellation CMR (Conventional Magnetic Recording).

LMRLMR

Depuis quelques années, la technologie SMR (Shingled Magnetic Recording) fait parler d’elle. Elle existe depuis longtemps dans le monde des serveurs/datacenters, mais elle a récemment été « découverte » par le grand public.

L’idée est de superposer en partie les pistes afin d'augmenter la densité des plateaux, ce qui n’est pas sans conséquence sur les performances. Car si cela ne change rien lors de la lecture des données, en écriture cette technique peut engendrer une chute de performances parfois importante.

En effet, il faut réinscrire les données des pistes se chevauchant, entrainant ainsi un phénomène d'amplification en écriture. C'est ce qui a causé le fameux « SMR Gate » quand l'on s'est aperçu que certains constructeurs utilisaient cette technologie sans le dire explicitement dans leurs fiches techniques (voir ici, ou encore ).

Synology à une manière « polie » de présenter les choses : « En raison des caractéristiques des performances des disques SMR, ce modèle est uniquement adapté aux environnements de charges de travail légères. Une dégradation des performances peut survenir dans le cadre d'opérations d'écriture continues ».

SMR SSD

Vous en voulez encore ? Voici DMSMR, HMSMR et HASMR

Le SMR nécessite une approche différente afin de prendre en charge sa particularité. Il existe trois solutions : 

  • DMSMR : Device Managed SMR
  • HMSMR : Host Managed SMR
  • HASMR : Host Aware SMR

Dans le premier cas, c‘est le disque dur qui se charge tout seul de gérer son écriture, il est « vu » comme un HDD classique par l’ordinateur. Pas de problème de compatibilité donc.

Les disques durs HMSMR nécessitent un hôte spécifique, prenant en charge le SMR. Ils ne sont donc pas compatibles avec les NAS ni avec les cartes mères grand public, mais pensés pour les serveurs.  Enfin, la troisième famille, HASMR, correspond à des disques durs SMR pouvant être gérés tout seuls ou par l’hôte suivant les cas.

Ils s’adaptent et sont donc perçus comme DMSMR ou HMSMR suivant les cas.

Le TDMR pour améliorer les performances en lecture 

Alors que la densité augmente, les opérations de lecture deviennent de plus en plus difficiles. En effet, la largeur des pistes diminue, ce qui a tendance à créer des interférences, compliquant de fait ces opérations.

C’est pour contourner cette problématique que le TDMR (Two-Dimensional Magnetic Recording) a été imaginé, avec deux « lecteurs » par tête au lieu d’un seul. Seagate était le premier à se lancer, suivi par Western Digital et Toshiba. Les disques durs de grosses capacités sont généralement concernés. 

TDMR
Crédits : Roger Wood, CC BY-SA 4.0

Il ne fait pas confondre le TDMR avec le Dual Actuator (Mach.2) de Seagate. Dans ce cas, le disque dur dispose de deux bras mécaniques indépendants, chacun avec ses propres têtes de lecture/écriture. Il est ainsi vu comme deux disques durs indépendants par le système. Cela permet de doubler les débits et les IOPS.

BPMR, HAMR et MAMR : la relève se prépare

Continuons avec le MAMR (Microwave-Assisted Magnetic Recording), développé par Western Digital. Il s’agit d’« encapsuler un oscillateur à côté de la tête d'écriture », qui fonctionne un peu comme un amplificateur pour modifier la polarité d’un grain magnétique sans toucher aux autres, avec une précision chirurgicale.

Le fabricant nous avait déjà confirmé que ces disques durs seraient utilisables dans n’importe quelle machine, même si « l'objectif premier est d'adresser le besoin des datacenters » avec de grosses capacités. 

Seagate prépare son alternative : le HAMR (Heat-assisted magnetic recording). La finalité est la même, mais pas la méthode. Le constructeur utilise la chaleur (via un faisceau laser) afin d'atteindre localement une température de plusieurs centaines de °C et ainsi polariser de manière stable un grain magnétique sur la surface du plateau. 

Nous avons déjà détaillé les principes de fonctionnement et les attentes des fabricants dans une précédente actualité. Les premiers disques durs MAMR de Western Digital sont attendus pour la fin de l’année, avec probablement 20 To pour commencer.

Par la suite, ce sera au tour du BPMR (Bit-Patterned Magnetic Recording) de débarquer. Cette fois-ci, le changement se fait aussi au niveau des plateaux grâce à un nouveau procédé lithographique.

Jusqu’à présent, chaque bit est enregistré sur un ensemble de grains. Avec les supports « bit patterned », chaque bit est isolé des autres. Une publication scientifique par les équipes de Western Digital est disponible ici. Le BPMR sera ensuite mélangé avec le HAMR et le TDMR pour donner naissance au HDMR (Heated-Dot Magnetic Recording).

Ce n’est pas pour tout de suite puisque cette technologie ne devrait pas arriver avant 2023 selon Seagate.

BPMR

Principe de fonctionnement d’un plateau BPMR. Crédits : arXiv

Taille des blocs : 4K vs 512 

Indépendamment des différentes technologies mises en place par les fabricants sur les plateaux, il existe d’autres indicateurs importants. Le premier concerne la taille des secteurs. Elle était de 512 octets au début, mais on est passé à 4096 (4K ou Advanced Format) depuis une dizaine d’années. 

En effet, « à mesure que les capacités de disque dur ont augmenté, la taille des secteurs s'est progressivement révélée un frein vis-à-vis de l'amélioration des capacités et de l'efficacité de la correction d'erreurs », explique Seagate. L’augmentation de la densité dans un format implique que les secteurs occupent une place de plus en plus réduite : « un problème dans le contexte de la correction d'erreurs et des risques de défauts de support ».

Avant d’expliquer les différences entre le 512 et le 4K, quelques précisions sur la manière dont se décompose un secteur sur un disque dur. On y trouve : 

  • Une section d'intervalle (Gap) pour séparer les secteurs entre eux
  • Une section de synchronisation (Sync) pour positionner les têtes
  • Une section de marquage d'adresse (Address Mark) pour identifier l'emplacement du secteur
  • Une section de données (Data) pour stocker les bits
  • Une section de code correcteur d'erreur (ECC ou Error Correction Code)

Dans le cas des secteurs de 512 octets, il faut ajouter 50 octets pour l’ECC et 15 octets pour les trois sections Gap, Sync et Mark. On arrive ainsi à 577 octets pour 512 octets de données utilisables, soit un « taux d’efficacité » de 88 % environ. Le passage au 4K permet d’améliorer ce score de 9 points.

En effet, avec un secteur de 4 096 octets, on stocke ainsi huit fois plus de données, mais toujours avec 15 octets seulement pour les sections Gap, Sync et Mark. L’ECC est par contre doublée pour arriver à 100 octets. Au total, un secteur occupe donc 4 211 octets (pour 4 096 octets de données utilisables), soit un taux d’efficacité de 97 %.

Secteurs HDD 4k

Crédits : Seagate

Pourquoi parle-t-on de disques durs 4Kn ou 512e ?

Il est possible de mettre en place une émulation pour qu’un disque dur avec des secteurs 4K soit reconnu comme un modèle avec des secteurs de 512 octets, pour des questions de rétrocompatibilité par exemple.

Dans cette situation, aucun changement de performances n’est généralement à déplorer en lecture, mais il peut y avoir un phénomène d’amplification en écriture. Tout est géré en interne et de manière transparente par le disque dur, via son cache. Sous Windows, la prise en charge native des secteurs 4K existe depuis le Service Pack 1 de Windows Vista. Sous Linux, il faut disposer du noyau en version 2.6.31 minimum.

Dans la pratique les disques durs sont passés aux secteurs 4K depuis longtemps et on trouve principalement trois types de produits dans le commerce : les 512n, 512e et 4Kn. Le « n » des premiers signifie natif : le disque dur à donc des secteurs physiques de 512 octets. Le « e » des seconds est pour émulé, le HDD à des secteurs physiques 4K, mais vu comme 512 par le système. Comme pour le DMSMR, c’est totalement transparent pour la machine.

Le « n » des 4Kn est pour natif : le disque dur utilise des secteurs de 4 096 octets et il est vu comme tel par le système qui doit être capable de le gérer. Les 512e restent encore majoritaires actuellement pour des raisons de rétrocompatibilité... mais les 4Kn domineront un jour le monde.

Cache : attentions aux fausses croyances

Dans les caractéristiques techniques des disques durs, on retrouve souvent une information sur la quantité de cache. On pourrait être tenté de se dire que plus il y en a et mieux c’est… mais ce n’est pas si simple.

Dans les disques durs de grosses capacités, elle peut atteindre 512 Mo. Il peut servir à plusieurs choses. La première est d’y placer des données afin d’améliorer les performances en lecture (par exemple pour celles souvent accédées). En écriture, le cache permet de faire un « tampon » pour enregistrer rapidement des données qui sont ensuite écriture sur le disque. Dans le cas des HDD pour les NAS par exemple, de petits condensateurs peuvent être présents afin de sauvegarder les données du cache en cas de coupure de courant.

Comme déjà indiqué, le cache peut aussi être utilisé sur des disques 512e afin de réaliser les opérations d’écriture nécessaire. Il peut aussi être utilisé par les HDD SMR afin qu’ils puissent remettre en ordre leurs données avant de les écrire. Western Digital intègre ainsi 256 Mo de cache dans ses disques durs RED de 2 à 6 To en SMR, contre 64 Mo pour ceux en CMR de même capacité. Choisir le modèle avec le plus de cache n’est donc pas forcément synonyme des meilleures performances. Prenez garde !

SAS vs S-ATA : en général, vous n’avez pas le choix

Sur l’interface des disques durs, deux normes sont principalement utilisées : SAS (Serial Attached SCSI) et S-ATA (Serial Advanced Technology Attachment). La première est une évolution du SCSI et se trouve généralement dans les serveurs et autres stations de travail. La seconde est utilisée dans les machines grand public.

Notez que le SAS est rétrocompatible avec le SATA : vous pouvez donc brancher un disque dur SATA sur un contrôleur SAS, mais la réciproque n’est pas vraie. Héritage du SCSI oblige, il est possible de chainer des HDD SAS, ce qui n’est pas possible en S-ATA.  Les différences ne s’arrêtent pas là et sont nombreuses.

Intel propose d’ailleurs un tableau comparatif. L’une des plus visibles est certainement le débit maximum de l’interface : jusqu’à 12 Gb/s en SAS contre 6 Gb/s en S-ATA, soit 750 Mo/s tout de même (600 Mo/s dans la pratique, comme c’est le cas sur les SSD). C’est donc largement suffisant pour une utilisation grand public puisque les HDD sont encore loin d’atteindre cette limite. 

SATA SAS

Crédits : Seagate

SED, FIPS, MTBF…

Il y a bien d’autres éléments à prendre en considération. Citons par exemple les disques durs avec autochiffrement (SED ou Self Encrypting Drive) qui intègrent nativement un module matériel pour les opérations de chiffrement et déchiffrement. Cette tâche n’est ainsi plus dévolue au processeur, permettant ainsi d’améliorer les performances.

Les données sont ainsi chiffrées par défaut sur un disque SED, avec la possibilité d’y ajouter une phrase de passe maison. C’est aussi un avantage lorsqu’il faut empêcher l'accès aux données : supprimer la clé de chiffrement suffit.

Il y a aussi les disques certifiés FIPS : ils proposent « les mêmes fonctionnalités que le disque avec autochiffrement, à ceci près que le module cryptographique est certifié par l’Institut national des normes et de la technologie des États-Unis », explique Seagate.

Sur les fiches techniques des disques durs, vous trouverez bons nombre d’autres informations. Il y a le MTBF (en heures) qui correspond au temps moyen entre deux pannes selon des tests réalisés par le fabricant. Le Taux de charge (en To/an) est la quantité maximale de données en écriture pour laquelle le disque dur est prévu. Ces informations sont à mettre en relation avec la durée de la garantie (généralement de trois à cinq ans).

Les fabricants communiquent aussi le Non-recoverable errors per bits read ou erreurs non récupérables par bits lus. Comme son nom l’indique, cela donne le nombre d’erreurs auquel s’attendre en moyenne. Il est généralement plus bas sur les disques durs pensés pour une utilisation professionnelle… mais ce n’est pas une règle d’or. Chez Western Digital par exemple, il est <1 sur 10¹⁴ bits sur les Red (Plus) contre <10 in 10¹⁴ sur les Red Pro

Pour un disque dur précis, un fabricant peut donc proposer pas moins de huit références pour une même capacité : SAS ou S-ATA, avec des secteurs de 4K natif ou 512 émulés et de l’autochiffrement ou non (voir cet exemple avec le MG08 16 To de Toshiba que nous avons testé). Mais au moins maintenant, vous avez les clés pour bien comprendre les différences et choisir en connaissance de cause.

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