Que contiennent les différents boîtiers de l'offre Freebox Pop ? Qu'est ce mystérieux connecteur RJ45 « Power » ? Pourquoi Free a-t-il fait le choix du Wi-Fi 5 ? À quoi s'attendre avec les répéteurs proposés aux clients pour constituer un réseau sans-fil maillé ? Tant de questions auxquelles nous avons tenté de répondre.
Il y a deux semaines, Xavier Niel dévoilait la Freebox Pop et sa nouvelle offre commerciale. Petite, avec un nouveau Server et un Player sous Android TV, elle cachait de nombreuses évolutions techniques plus ou moins discrètes. De la gestion des enregistrements dans « le cloud » au Wi-Fi Mesh, en passant par le 2,5 Gb/s.
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Comme souvent dans pareille situation, l'entreprise n'a communiqué que sur les grandes lignes, évitant les détails qui fâchent hors de quelques passages obligés comme le choix du Wi-Fi 5 plutôt que du Wi-Fi 6. Depuis, nous avons donc cherché à comprendre ce que cachait ce produit devant durer plusieurs années.
Voici notre compte-rendu, photos et références de SoC à l'appui.
Un Player Android TV sans surprise
Commençons par le boîtier le plus classique, pour ne pas dire banal, celui en charge du multimédia. Si Xavier Niel a insisté pendant sa conférence sur l'importance de la conception en interne de ses box, il a oublié de préciser que ce boîtier n'était qu'un produit en marque blanche, de chez SEI Robotics selon Android TV Guide.
Son design n'est ainsi pas spécifique à Free, qui l'a simplement adapté à ses besoins. Ses caractéristiques étaient d'ailleurs connues bien avant l'annonce puisqu'il est presque impossible de garder totalement secret le développement d'un produit sous Android TV.
Nous avons pu confirmer qu'il utilisait bien une base technique Amlogic : un SoC S905X2 gravé en 12 nm (4x ARM Cortex-A53, Mali G31). Il est accompagné de 2 Go de mémoire et 16 Go de stockage (Samsung KLM8G1GETF). Cela lui permet de consommer du contenu local. On apprécie d'ailleurs que VLC soit préinstallé.
Ce devait également être le cas sur la Delta, mais n'a pas été jugé pertinent en l'absence du Dolby Atmos (présent sur la Pop en passthrough). Ce problème devant bientôt être réglé – une fois que Qualcomm aura fourni le bout de code nécessaire – la version 4.x y sera disponible.
La connectique est assez classique : réseau à 1 Gb/s, HDMI 2.0 (4Kp60, HDR, 10 bits), S/PDIF et TNT (DVB-T2). Le stockage peut être complété via une carte microSD ou un HDD/SSD via un port USB 3.0 Type-A (5 Gb/s). L'alimentation est assurée non pas par un connecteur USB Type-C mais du DC classique (12V).
Le Wi-Fi 5 (2x2) est assuré par une puce Qualcomm (nous y reviendrons). L'assistance vocale Google passe par l'unique micro de la télécommande (Bluetooth 5.0 Low Energy, 2 piles AAA), activé lorsque le bouton dédié est pressé. Les dimensions du Player sont de 126 mm (diamètre) x 27 mm (hauteur). Son poids de 275 grammes.
Notez au passage que les services dans le cloud Oqee utilisent le H.265. Il est encore trop tôt pour une migration vers AV1, qui manque toujours de support matériel.
L'intérieur du Player/Server/Répéteur de la Freebox (v8) Pop - N'ouvrez pas la vôtre !
Nouveau Server, une petite révolution
En réalité, le gros des innovations de cette box est dans le Server ou lié à lui. Conçu en interne, il reprend un même design rond mais un peu plus épais : 161 mm (diamètre) x 40 mm (hauteur). Il est surtout bien plus lourd avec ses 420 grammes, et nettement plus complexe.
Cette fois, le SoC est de chez Broadcom (BCM63158), une solution tout-en-un pour modem-routeur xDSL/Fibre. Une conception plus légère que la Delta afin de réduire les coûts, qui explique notamment l'absence de fonctionnalité avancée comme le RAID pour la partie NAS ou la gestion des machines virtuelles.
Il se contente d'un port USB 3.0 (5 Gb/s) pour le stockage, absent de la fiche technique affichée par Free (et qui devrait être corrigée sous peu). L'alimentation est assurée par un port USB Type-C (15 V pour 2,4 A), standard désormais adopté par Free pour ses nouveaux boîtiers.
La liaison fibre passe par une cage SFP+ limitée pour le moment à 5 Gb/s partagés. Ce n'était d'ailleurs pas forcément le débit évoqué selon les premières rumeurs, qui était plus faible. Décision de dernière minute ou volonté de tromper l'ennemi avant le lancement ? On peut néanmoins être certain que ce choix n'est pas pour rien dans les décisions d'Orange, puis Bouygues et SFR de passer leurs offre à 2 Gb/s partagés.
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Free a néanmoins fait un choix technique absent chez ses concurrents : son Server dispose d'un port réseau à 2,5 Gb/s. Un timing parfait par rapport au reste du marché, puisque cartes mères, PC et autres accessoires s'y mettent, jusqu'aux switchs ! Il est implémenté non pas via une puce Realtek comme on aurait pu le penser.
L'équipe a plutôt opté pour une puce Marvell (Aqtion AQC112C). Pourquoi pas un modèle AQC111C à 5 Gb/s ? Parce que le SoC ne disposait pas des interfaces (SerDes) suffisantes pour une telle implémentation. Pourquoi pas de second port à 2,5 Gb/s, qui aurait par exemple permis la connexion d'un NAS et d'un PC à un tel débit ? Une question de consommation et de coût selon nos informations.
Outre le connecteur téléphonique RJ11, deux autres ports RJ45 sont présents, mais limités à 1 Gb/s. Soit un total de 4,5 Gb/s partageables en filaire. Contrairement à la Delta, le Wi-Fi 5 n'est pas tri-bande, limité à 2,1 Gb/s sur l'ensemble des bandes (2,4 GHz et 5 GHz).

PoE(+) or not PoE(+)
Lors de la présentation, nombreux sont ceux qui ont noté la présence d'une mention « Power » sur l'un des ports réseaux à 1 Gb/s, laissant penser que le Power over Ethernet (PoE) était supporté. L'équipe n'avait d'ailleurs pas donné d'autres détails sur place, nous avons donc cherché à en savoir plus.
Si ce port est bien fonctionnel comme annoncé, il ne s'agit pas de PoE au sens de la norme 802.3at/af/bt. En effet, si Free a des projets pour ce connecteur (mais refuse d'en dire plus pour le moment), il n'a vocation à être utilisé que pour ses produits. Il ne respecte donc pas le standard.
Cela sera vérifié via une signature spécifique, le courant n'étant envoyé que si elle est détectée. Sans doute une manière pour le FAI de simplifier le design (et donc les coûts), évitant d'avoir à gérer toutes les déclinaisons possibles des tensions PoE. Ici, ce sera simplement du 15 V.
Un écran et un voyant
Sur le Server de la Révolution/Mini 4K, Free avait opté pour un écran a gestion tactile, abandonné pour une version plus simple à gros caractères sur la Delta. Pour la Pop, c'est un mix des deux.
Sur la façade supérieure, un écran permet d'obtenir des informations et options détaillées, d'afficher le QR code du Wi-Fi, etc. Les actions passent par des boutons physiques plutôt que du tactile. Un choix de conception qui posera souci à ceux plaçant la box dans un meuble et qui ne verront pas cet écran.
Heureusement, on a toujours en façade un voyant indiquant le statut de la box (allumée ou non, en veille, etc.) et de la connexion de manière simple.

Une refonte du Wi-Fi pour ne pas le céder aux plateformes
Malgré toutes ces nouveautés, le gros des discussions autour de la Freebox Pop s'est concentré sur l'absence de Wi-Fi 6. On pouvait en effet s'y attendre puisque cette norme devient courante. Mais ce n'est pas le choix fait par le FAI, et il y a de très bonnes raisons à cela.
Officiellement, c'est parce que le 802.11ax (l'autre petit nom du Wi-Fi 6) n'a pas été finalisé. La norme n'est pas encore complètement aboutie au sein de la Wi-Fi Alliance, et Free veut attendre pour sauter le pas. Plus précisément, ses équipes misent déjà sur une migration vers le Wi-Fi 6E qui en aura tous les avantages, avec en plus l'accès à la bande des 6 GHz et donc bien plus de canaux.
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Elles se voyaient mal turbiner pour la gestion du Wi-Fi 6 alors que les clients et appareils capables d'en profiter sont peu nombreux, pour refaire une migration technique d'ici quelques années. Le choix a donc été fait de capitaliser sur l'existant, ce qui avait de nombreux autres avantages.
Car en réalité, Free a fait ce choix pour une raison moins audible par la presse grand public, même spécialisée, et ses lecteurs : la dernière technologie en date n'est pas toujours la meilleure stratégie.
On le voit bien avec l'annonce des dernières box concurrentes. Orange a tenté de faire croire à une évolution de son Wi-Fi 5 alors en évoquant sous des termes pompeux une mise à jour logicielle récente. SFR a intégré du Wi-Fi 6 (4x4, 4,8 Gb/s, BCM43684) sur un modem routeur qui n'a à côté de ça que deux ports RJ45 à 1 Gb/s, sans faire de même avec le boîtier Multimédia (Wi-Fi 5). Quant à Bouygues Telecom, sa nouvelle Box n'est vendue qu'à certains clients.
Car le Wi-Fi 6 n'est pas qu'une norme restant à finaliser et réclamant un effort d'implémentation pendant la conception des box, c'est surtout une norme coûteuse. On le voit avec le prix des routeurs Wi-Fi du marché qui se multiplient, mais ne sont que très rarement sous les 150/200 euros, même pour les premiers modèles.
Certes, des constructeurs chinois commencent à évoquer des références à quelques dizaines d'euros, mais avec des débits et fonctionnalités limitées. Surtout, Free voulait profiter de cette génération de boîtiers pour repenser son offre autour du sans fil, avec non pas les autres FAI à l'esprit... mais les géants américains.
Car ce sont bien eux qui menacent, avec Amazon Eero, Nest Wi-Fi et autres Orbi de Netgear. Nombreux sont ceux à expliquer que le Wi-Fi proposé par les fournisseurs d'accès est trop limité en fonctionnalités, en simplicité, en capacité de couverture. Free passe donc la seconde sur ce point.
Freebox connect : future stratégie gagnante ?
Ayant racheté une entreprise spécialisée, travaillant en marge de l'équipe Freebox habituelle, il lui a fait développer une nouvelle couche logicielle pour son Wi-Fi 5. De quoi améliorer les débits et fonctionnalités de l'ensemble des Freebox depuis la Révolution. Elles ont ainsi désormais accès à l'authentification WPA3. Si les débuts ont été un peu difficiles, cela devrait rapidement s'améliorer.
Une évolution accompagnée d'une application dédiée, Freeboxconnect. Tout ce qui touche au réseau local et au sans fil y sera désormais géré. Notamment le maillage. Car plutôt que voir ses clients acheter des produits concurrents et activer le mode bridge de sa box, ou de proposer des solutions en marque blanche, Free a développé ses propres répéteurs compatibles avec la norme 802.11s et tout ce qui s'y rattache (notamment l'Airtime Fairness).
Distribués pour 10 euros de frais de mise à disposition, ils doivent convaincre les Freenautes de ne pas aller voir ailleurs en proposant un bon débit partout dans la maison. Ils gèrent ainsi le backhaul Wi-Fi ou Ethernet (et bientôt CPL), mais uniquement en dual band (sans canal dédié pour les communications entre satellites/routeur).
Les performances seront donc sans doute limitées et des produits comme Orbi resteront de meilleurs choix (à plusieurs centaines d'euros). Free dispose cependant d'une solution maitrisée de bout-en-bout, capable de s'opposer aux kits Wi-Fi Mesh à petit prix des grandes plateformes, ce qui n'est pas le cas de ses concurrents.
Mais pour proposer une solution cohérente au sein de ses Server, Player et répéteurs à petit prix, le FAI n'avait pas le choix : il devait rester sur une solution maitrisée et peu coûteuse et donc le Wi-Fi 5. Il s'agit néanmoins de puces Wave 2, intégrant de nombreuses évolutions récentes, dont certaines font partie intégrante du Wi-Fi 6, comme la gestion des blocs de 160 MHz pour doubler le débit. Ce qui était déjà le cas de la Freebox Delta.
Le Server a droit à du MU-MIMO 4X4 (Qualcomm QCA9984) contre 2x2 pour le Player et le répéteur (QCA9888). Ce dernier repose d'ailleurs sur un SoC Amlogic A113D. Il est alimenté en 5 V pour 3 A, mais n'est pas destiné à l'être via le connecteur réseau avec alimentation électrique du Server.
Si vous avez d'autres questions concernant la Freebox Pop, n'hésitez pas à les poser en commentaires, nous tenterons d'ajouter les réponses à l'article.