Si les constructeurs de NAS vendent à la fois une solution matérielle et logicielle, il y a un nombre croissant de clients qui pousse vers une évolution de ce modèle. Ils aimeraient en effet pouvoir utiliser ces interfaces complètes et simples à prendre en main, mais sur le matériel de leur choix. QNAP va sauter le pas.
Cela fait quelques années maintenant que Synology voit ses clients lui demander l'accès à son interface Disk Station Manager sous la forme de licence, à installer sur leurs propres machines. Il s'agit pour eux d'être plus indépendants des choix technologiques du taïwanais, surtout qu'ils sont critiqués pour leur manque d'évolution ces dernières années.
Avec la montée en puissance du « cloud hybride », on a également vu des hébergeurs comme Infomaniak proposer des NAS Synology 1U opérés à distance, à partir de 47 euros par mois. Idéal pour disposer d'une sauvegarde hors site en utilisant les fonctionnalités natives de DSM. Mais là encore, il faut se limiter aux modèles du constructeur.
Modèle économique des NAS : plus de licences, pas pour l'interface
Les marques comme Synology ont sans doute senti le vent tourner, axant de plus en plus leurs revenus sur des mécaniques de licences pour telle ou telle fonctionnalité et des services dans le « Cloud » comme C2. Mais ce n'est pas encore le cas de leurs interfaces maison, strictement réservées à leurs produits.
C'est ce qui permet à ces derniers d'être vendus à prix d'or au regard des composants embarqués, parfois avec des écarts importants qui ne seraient sans doute pas justifiables s'il s'agissait de facturer séparément la machine et son logiciel. Il n'est en effet pas inhabituel de trouver des CPU sur architecture Atom dans des produits à 500 euros.
Un lien matériel/logiciel qui sert un modèle économique ultra-rentable, mais qui commence à se fissurer. Un nombre croissant d'utilisateurs se tournent vers des NAS maison, avec des interfaces open source telles que FreeNAS ou propriétaires comme Unraid. Dans le cas de Synology, le constructeur doit également faire face à XPEnology, version « pirate » de son interface à installer sur des machines disposant de composants compatibles.
QNAP va sauter le pas, pas ses concurrents
Interrogé sur le sujet à l'occasion de l'édition 2020 de sa conférence annuelle, le constructeur nous a confirmé qu'il ne travaillait pas à une telle solution. Cela ne semble pas non plus le cas de ses différents concurrents comme Asustor, Buffalo, Netgear ou même Western Digital.
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Hier, lors d'une rencontre avec QNAP, nous avons également abordé le sujet. Et à notre grande surprise, il est prévu de proposer l'installation de l'interface maison QTS sur des appareils tiers. Cela passera par la distribution d'une image, comme celle utilisée pour la fonctionnalité vQTS, consistant à créer des NAS virtuels dans un NAS physique.
Des images ISO pourraient néanmoins être proposées à terme, permettant une installation sur n'importe quelle machine sous réserve de compatibilité CPU/SoC, surtout dans le cas d'ARM.
Première vidéo de vQTS de QNAP qui permettra d’utiliser l’interface maison sur votre propre serveur : pic.twitter.com/FKHgUSk08N
— INpact Hardware (@inpacthardware) October 10, 2019
Cette fonctionnalité doit être dévoilée d'ici la fin de l'année, sans plus de détails sur la méthode ou la tarification pour le moment. Nous avons néanmoins eu droit à une vidéo de déploiement au sein d'un service cloud comme Digital Ocean. On imagine que cela intéressera des hébergeurs s'adressant régulièrement aux PME comme OVH ou Scaleway.
Mais cela pourrait également intéresser des fournisseurs d'accès, notamment en complément de leurs offres professionnelles. On pense notamment à Free dont la Delta permet désormais d'intégrer des machines virtuelles. Mais d'autres auraient déjà montré leur intérêt sur le marché français.
Une petite révolution dans le monde des NAS
Dans tous les cas, ce sera un changement de taille, tant pour QNAP que ses concurrents. Le constructeur renforcera son image de société de services logiciels, proposant du matériel certifié et garanti, pouvant être mis en concurrence avec d'autres solutions par des revendeurs et intégrateurs. Mais il touchera alors les revenus des licences.
Et pourquoi pas créer un réseau de partenaires pour valider certains de leurs choix et produits au sein d'un programme spécifique, comme le font d'autres sociétés développant leurs logiciels à destination des professionnels ? Le constructeur n'a pas évoqué cette idée pour le moment.
Il attend sans doute de voir comment le marché va réagir à QTS Cloud et l'impact que cela aura sur ses ventes et revenus. Dans tous les cas, les NAS ne sont plus le seul centre d'intérêt de QNAP qui se développe de plus en plus dans les accessoires utilisables sur n'importe quels produits mais aussi les solutions réseau.
Au CES puis au Computex, il avait ainsi dévoilé son nouveau Guardian (QGD-1600P) à mi-chemin entre NAS et switch, avec gestion du PoE 802.3bt jusqu'à 60 watts et la possibilité de virtualiser de nombreuses fonctionnalités comme un contrôleur Wi-Fi Ubiquiti, du routage/firewall comme Pfsense, de la téléphonie PABX, etc. Un produit sur lequel nous aurons l'occasion de revenir, puisqu'il sera disponible le mois prochain pour un peu plus de 800 euros (679 euros HT).
Une ouverture de la gamme et une recherche d'innovation, misant sur la volonté d'apporter de la plus-value sur les marchés visés, qui fait du bien à voir dans un secteur qui a parfois tendance à s'endormir.