Le PCIe 4.0 arrive dans les SSD, avec la promesse de débits allant jusqu'à 5 Go/s pour le moment. Mais est-ce bien raisonnable alors que le réseau 10 Gb/s et Thunderbolt 3.0 peinent à se faire une place dans nos PC ? Surtout, ces SSD offrent-ils des performances intéressantes ailleurs que dans les benchmarks ?
Avec l'arrivée des Ryzen de 3e génération et du X570, AMD introduit le PCI Express 4.0 au sein de sa plateforme. Il est utilisé pour la communication entre le processeur et le chipset, mais aussi pour la connexion de composants tiers. Les Radeon RX 5700 (XT) sont les premières cartes graphiques à en profiter, mais l'intérêt est aussi du côté des SSD.
Et le Texan a plutôt bien joué son coup, s'associant à Phison et à plusieurs partenaires pour proposer des produits dès aujourd'hui. Nous avons eu l'occasion de tester des modèles M.2 Aorus de 1 et 2 To signés Gigabyte.
0,25 euro le Go
Pour le moment, tous les SSD PCIe 4.0 annoncés sont identiques. Ils utilisent le même contrôleur, les mêmes puces de flash NAND. Seul le firmware peut faire une petite différence. Côté tarif aussi il ne devrait pas y avoir de gros écarts dans les premiers temps, tant Corsair que Gigabyte ayant évoqué des tarifs de 250/500 euros pour les modèles de 1/2 To. On trouve d'ailleurs déjà le MP600 de Corsair à ce tarif.
Les modèles Gigabyte que nous avons reçus sont livrés nus dans une petite boîte. Mais le Taïwanais a eu la bonne idée de les accompagner d'un dissipateur assez massif (et lourd). Il est en cuivre, une matière préférée à l'aluminium du fait de sa meilleure conductivité thermique.
Six petites vis sont nécessaires à son installation, qui est assez simple... pour peu que vous disposiez du tournevis adapté. Une fois mis en place, le SSD mesure 80,5 x 23,5 x 11,4 mm. Les deux modèles sont annoncés avec des performances identiques : 5 000 Mo/s en lecture séquentielle, 4 400 Mo/s en écriture. Côté IOPS, on est à 750k et 700k.
Le contrôleur utilisé est le PS5016-E16 de Phison, accompagné de puces TLC 3D BiCS4 (TABHG65AWV, 96 couches) de Toshiba. 1 ou 2 Go de DDR4 SK Hynix (H5AN8G8NAFRVKC) sont intégrés comme cache. Le SSD est au format M.2 2280, avec une interface PCIe 4.0 x4, soit une bande passante théorique de 8 Go/s.
La garantie est de 5 ans ou 1 800/3 600 To écrits (TBW).
Performances : promesses tenues ?
Pour vérifier ses performances, nous avons utilisé une carte mère X570 Aorus Master de Gigabyte avec un processeur Ryzen 7 3700X (BIOS/UEFI F5e), le tout installé sous Windows 10 (May 2019 Update), à jour.
Le premier relevé effectué a bien entendu été ce bon vieux duo CrystalDiskMark, ATTO :
Comme vous pouvez le voir, c'est ici le cas idéal : des transferts de 1 Go, un SSD de 2 To vide et neuf. L'idée était simplement de vérifier que les chiffres annoncés par Gigabyte sont tenus, c'est le cas. Ces performances sont d'ailleurs supérieures à nombre de SSD PCIe 3.0, même les plus véloces.
PCIe 4.0 vs PCIe 3.0
Tout d'abord nous avons cherché à savoir quels étaient les gains par rapport à une utilisation sur une interface PCIe 3.0 x4, limitée à 4 Go/s de débit maximal théorique, et plutôt dans les 3 Go/s dans la pratique comme le montrent les SSD les plus performants. Pour cela, nous avons installé le SSD sur une carte fille exploitant cette connectique.
Nous en avons profité pour effectuer une comparaison avec un SSD Samsung 960 EVO de 500 Go, ce qui permet de voir si les meilleures performances se font aussi remarquer par rapport à un SSD classique :
Le SSD Aorus PCIe 4.0 de Gigabyte (à gauche) face à un SSD 960 EVO classique de Samsung (à droite)
Comme on peut le voir, les performances sont ici très bonnes tant en lecture qu'en écriture, ce qui pêche un peu dans l'EVO de Samsung qui est un modèle de milieu de gamme. On peut donc y voir les atouts d'un SSD visant plutôt le haut du panier. On note néanmoins une baisse de l'ensemble des chiffres de 20 à 40% en PCIe 3.0 par rapport au PCIe 4.0, même lorsque les débits ne sont pas contraints par l'interface.
Quels résultats si le SSD est plein ?
Lors de nos essais, nous avons pu confirmer que les performances étaient identiques pour le modèle de 1 To dans les mêmes conditions. Nous avons donc décidé de corser l'affaire en remplissant ce dernier et en utilisant les transferts par défaut de CrystalDiskMark et ATTO puis de 32 Go :
On voit qu'en lecture/écriture séquentielle courte, tout se passe bien. Mais si l'on passe à 32 Go, les performances en écritures baissent. On ne tombe pour autant pas très bas, puisqu'il est toujours question de 1 Go/s environ. La lecture de petits fichiers avec une file de 8 éléments et 8 threads est également en baisse, à 1,5 Go/s cette fois.
C'est plutôt une bonne chose, puisque hors des très coûteux Optane d'Intel, on constate toujours de telles baisses. Mais on est ici loin de descendre à 100 Mo/s comme on peut le voir sur certains modèles QLC. Côté température, nous avons relevé des chiffres autour de 40°C en fonctionnement en général, avec une pointe dans les 50°C, ce qui est raisonnable. Bien entendu, ce chiffre pourra évoluer selon votre propre installation.
Nous n'avons pour le moment pas effectué de tests poussés en RAID puisque nos premiers résultats ne nous permettaient pas de dépasser les 6 Go/s avec nos deux SSD. Nous tenterons d'effectuer des tests complémentaires dès que nous aurons plus de modèles à notre disposition.
Jusqu'à 5 Go/s, pour quoi faire ?
On le voit, ces SSD n'ont pas vraiment d'intérêt pour ceux qui disposent encore d'une machine en PCIe 3.0, à moins qu'ils ne visent une mise à jour à court terme. Ils y affichent de très bons chiffres, les performances même sur de petits fichiers sont bonnes, mais ne changent pas vraiment la donne par rapport à un modèle M.2/NVMe classique.
Le PCIe 4.0 apporte un gain notable, mais ne vous attendez pas à atteindre 5 Go/s au quotidien. Cela visera surtout les « concours de la plus grosse » dans les benchmarks et autres transferts entre la mémoire et le stockage en applicatif plutôt que les transferts de fichiers au quotidien.
Et pour cause, atteindre un tel débit est presque impossible, comme nous l'avons vu lors d'un transfert d'un SSD PCIe 4.0 à un autre. On ne dépasse pas les 2 Go/s avec un fichier de 106 Go, avec des fluctuations parfois assez importantes lorsque le cache intégré n'est plus capable de suivre (87 secondes au total, soit 1,21 Go/s en moyenne) :

Lors de différents tests de transferts avec des fichiers plus ou moins gros, nous avons relevé des performances allant entre 1 et 1,21 Go par seconde, seulement légèrement supérieures à celles trouvées dans un même transfert effectué depuis la même machine en PCIe 3.0 (de 0,96 Go/s à 1,21 Go/s).
C'est encore pire lorsque l'on prend en compte les connectiques externes. 5 Go/s représentent plus de 40 Gb/s, un débit que seul le Thunderbolt 3.0 est pour le moment capable d'atteindre. Il n'existe d'ailleurs presque aucune connectique grand publique capable de dépasser les 3 Go/s des meilleurs SSD M.2 PCIe 3.0 du marché.
De bons SSD haut de gamme
Ainsi, ces SSD apparaissent comme performants dans la plupart des circonstances, capable d'obtenir des chiffres que d'autres ne peuvent pour le moment pas encore atteindre, mais à quel prix ?
Car à 0,25 euro le Go ils sont plutôt dans la tranche haute des SSD M.2 actuellement proposés sur le marché. On ne peut bien entendu pas les comparer à des modèles d'entrée de gamme comme les MP300 de Corsair ou les 660p d'Intel, à moins de 0,15 euro le Go. Ils se situent plutôt au niveau de modèles TLC comme les 970 EVO Plus de Samsung et autres SN750 de Western Digital qui sont moins chers de quelques dizaines d'euros.
Faut-il craquer ? Si votre préoccupation est d'avoir un SSD rapide sans être un foudre de guerre, tournez-vous plutôt vers des modèles inférieurs, moins chers. Sinon et si le PCIe 4.0 est dans vos objectifs à court terme, vous pouvez sauter le pas sans crainte, ces SSD et leurs différents clones sont de très bonne facture.
Ils n'afficheront leurs 5 Go/s que dans les benchmarks pour le moment, mais pour certains, c'est déjà suffisant. Au-delà de ça, ils ont des performances de bon niveau dans la plupart des situations. C'est l'essentiel.