C'est le grand jour pour les APU d'AMD basés sur une architecture Ryzen et une partie graphique de la génération Vega, aka Raven Ridge. Deux modèles sont annoncés, à 99 et 159 euros : les R3 2200G et R5 2400G. Mais qu'apportent-ils de nouveau ?
En mars 2017, AMD faisait son grand retour avec les processeurs Ryzen, l'aboutissement d'un travail de plusieurs années. Malgré un lancement un peu chaotique, on découvrait une gamme plutôt réussie dans l'ensemble, qui signait le début d'un vaste plan de reconquête qui doit se dérouler jusqu'en 2020.
Les performances étaient au rendez-vous, avec un argument de poids côté tarif, puisqu'il devenait enfin abordable de se payer des modèles équipés de six ou huit cœurs. Le tout avec une unicité de fonctionnalités (excepté pour les modèles « Pro ») et surtout une plateforme AM4 prévue pour durer trois générations.
Un véritable pied de nez à Intel qui a toujours tendance à s'empêtrer dans ses sockets. Le géant de Santa Clara a d'ailleurs dû réagir, et l'a finalement fait assez rapidement. Dès la rentrée, il a commencé à annoncer ses processeurs Core de 8e génération... à sa manière. En effet, cette dénomination recouvre différentes architectures, une mise à jour des cartes mères a été imposée et certains modèles « Desktop » ont brillé par leur indisponibilité.
La véritable bonne nouvelle pour le consommateur, au final, était l'augmentation du nombre de cœurs à tarif identique. Surtout qu'AMD a adapté ses prix dans la foulée afin de rester dans la course.
Un nouvel équilibre s'est donc dessiné sur un marché où la concurrence n'était plus de mise depuis des années, chacun disposant de ses forces et de ses faiblesses. Mais il manquait tout de même une corde à l'arc d'AMD : des processeurs avec partie graphique intégrée. Un problème lorsqu'il s'agit de proposer des machines bureautiques à moindre coût.
Ces APU étaient donc très attendus. Et après une série d'annonces pour ordinateurs portables, on découvrait à l'occasion du CES de Las Vegas les Ryzen 3 2200G et Ryzen 5 2400G (Raven Ridge), promis à 99 et 169 dollars. Selon nos informations, ils sont disponibles dès aujourd'hui, à des tarifs aux alentours de 99 et 159 euros.
Ils doivent ainsi remplacer les actuels Ryzen 3 1200 et Ryzen 5 1400 au sein de la gamme du fondeur. Nous avons pu les tester afin de vérifier ce qu'il en était dans la pratique.
Notre dossier sur les APU « Desktop » Ryzen (Raven Ridge) :
- AMD Raven Ridge : ce qu'il faut retenir des APU « Desktop » avec Radeon RX Vega intégrée
- Les Ryzen 3 2200G et 5 2400G d'AMD face au Core i3 8100 d'Intel
Carte mère : socket AM4 et UEFI à jour nécessaires
Commençons par un élément vital : la carte mère. Comme évoqué précédemment, AMD a préparé le terrain avec une plateforme AM4 pensée pour durer. Ainsi, n'importe quel modèle disposant de ce socket peut exploiter l'un de ces processeurs, mais il faut disposer d'une UEFI à jour.
Si ce n'est pas le cas, la carte ne démarre pas. Un point que l'on ne peut que regretter, d'autant plus qu'AMD avait été un peu plus prévoyant avec les générations précédentes. Un petit message fourni dans le bundle prévient l'utilisateur, la marque ayant travaillé avec ses partenaires pour qu'un autocollant soit présent sur la boîte des modèles à jour. Les revendeurs pourront également l'utiliser, mais il faudra dans les premiers temps faire attention lors de votre achat.
Car en cas de problème, il faut disposer d'un processeur supporté pour mettre à jour la carte, ce qui ne sera pas forcément simple pour l'utilisateur lambda, nécessitant un retour en SAV ou passage à la boutique informatique du coin.
AMD nous a précisé que les puces Raven Ridge sont supportées depuis la version 1.0.0.7 de l'AGESA fournie aux constructeurs depuis quelques mois. Selon nos constatations les premiers modèles mis à jour l'ont été à partir de décembre, les derniers concernés ayant eu droit à leur BIOS/UEFI début février.
Chez ASUS il s'agit des version 3203/3803 pour les modèles classiques et 3008/3502 pour la gamme Republic of Gamers (ROG). Chez ASRock, la branche 4.x assure cette compatibilité, mais vous devrez le plus souvent commencer par effectuer une mise à jour avec la dernière version de la branche 3.x. Chez Gigabyte, tournez-vous vers les versions F10/20. MSI a, de son côté, opté pour une numérotation différente pour ses différents modèles.
Précisons enfin que pour profiter de la partie graphique intégrée, vous devrez bien entendu disposer de sorties vidéo sur votre carte mère, ce qui n'est pas toujours le cas, notamment sur les modèles X370.
Raven Ridge : qu'est-ce qui change côté CPU ?
Passons maintenant aux évolutions du processeur lui-même. Par rapport aux modèles sortis l'année dernière, il s'agit d'une toute nouvelle puce, intégration de la partie graphique oblige. Sa surface est de 209,78 mm² pour 4,94 milliards de transistors, le tout gravé en 14nm FinFET. Pour rappel, un Ryzen « classique » était à 4,8 milliards pour 213 mm².
L'objectif était donc de rester dans des dimensions identiques, malgré le GPU intégré. On note que le TDP, qui désigne la quantité de watts à dissiper pour assurer le bon fonctionnement de la puce, reste à 65 watts. AMD précise avoir profité de cette mise à jour pour exploiter un process de gravure amélioré de chez Global Foundries, permettant d'augmenter la densité et s'assurer un fonctionnement plus économe en énergie.
Une puce Raven Ridge se compose de quatre cœurs regroupés en un seul CCX, contrairement aux précédents Ryzen 3/5 qui reposaient sur une architecture 2+2. Ces processeurs disposaient en effet physiquement de deux groupes de quatre cœurs, chacun ayant la moitié de ses unités désactivées. Ici, ce n'est plus le cas.
Un autre effet induit de cette composition différente est la taille du cache L3 qui passe à 4 Mo « seulement », ce qui permet de gagner d'autant de place au sein de la puce. Le reste de l'architecture reste identique :
AMD en profite pour préciser que lors de ses derniers tests internes, le choix d'une architecture 2+2 ou 4+0 ne changeait rien, en moyenne, à travers une cinquantaine de jeux utilisés pour effectuer les mesures. « Nous avons conclu que certains jeux tiraient bénéfice du surplus de cache induit par une configuration à deux CCX alors que d'autres profitaient de la latence réduite avec un seul CCX » précise la marque dans l'un de ses documents techniques destinés à la presse.
Le pari d'AMD est de miser désormais plus sur la fréquence, ce qui lui avait fait défaut dans les jeux lors de la sortie de Ryzen, laissant l'avantage à Intel. Elles ont ainsi été revues à la hausse et accompagnées de l'introduction de Precision Boost 2, comme pour les APU mobiles. Pour autant, la barrière des 4 GHz n'est pour le moment pas franchie. Il faudra voir si ce sera le cas pour les Ryzen 2, gravés en 12 nm, qui doivent être mis sur le marché en avril prochain.
Le constructeur précise également avoir réduit la latence, ce qui est effectivement le cas du côté des caches L2/L3, permettant de s'approcher de la concurrence à ce niveau. Là aussi, ce travail a été effectué car il peut avoir un impact dans certains jeux, un secteur important, que ce soit pour le consommateur ou pour la communication de la marque face à son concurrent. C'est d'autant plus le cas pour des APU qui visent les joueurs.
Le tout est organisé comme au sein des APU mobiles, avec une gestion profondément revue des tensions et les parties GPU/CPU reliées entre elles par le mystérieux lien Infinity Fabric, qui permet également de les connecter aux éléments dédiés au multimédia ou au contrôleur mémoire :
Pour réduire ses coûts, AMD précise ne pas avoir travaillé que sur le design de la puce ou sa réduction en taille. Ainsi, le package du CPU a été revu, tout comme le Thermal Interface Material (TIM) qui est de type non métallique. Le ventirad fourni dans la boîte est un Wraith Stealth, qui est effectivement silencieux (mais aux vis un peu cheap).
On note enfin que la DDR4 jusqu'à 2933 MHz est désormais supportée sur deux canaux, même si dans la pratique il est bien entendu possible d'aller plus loin. Côté connectique, ces Ryzen étant pensés comme des SoC avec leurs propres E/S, on retrouve ce qui peut être nécessaire au minimum :
- 4x USB 3.1 Gen 2
- 1x USB 3.1 Gen 1
- 1x USB 2.0
- 8x PCIe 3.0, dont quatre réservées pour le chipset
- 8x PCIe 3.0, pour une carte graphique
- 2x S-ATA
Pour rappel, les chipsets apportent leur connectique dédiée, plus ou moins étoffée selon les cas. AMD précise que les huit lignes PCIe 3.0 ne devraient pas constituer une limite pour les cartes graphiques et les usages visés pour un processeur tel que ces 2200G/2400G. De plus deux ports USB 3.1 Gen 2 peuvent être utilisés en alternate mode DisplayPort afin de connecter un écran compatible, sous réserve de l'intégration d'un contrôleur Power Delivery à la carte mère.
Radeon RX Vega intégrée
La partie graphique est basée sur l'architecture Vega, mais au lieu de 56 ou 64 groupes d'unités, il est ici question de 8 ou 11, soit six à sept fois moins. 16 unités ROP sont présentes, l'ensemble annonçant une puissance de calcul FP32 de 1,126 ou 1,76 TFLOPS. C'est à peu près autant que les Xbox One (S), dont le CPU était tout de même bien moins véloce.
2 Go de mémoire peuvent être dédiés, AMD n'ayant pas fait le choix d'une intégration de HBM2 comme a pu le faire Intel pour ses Kaby Lake G. Le géant de Santa Clara a d'ailleurs également opté pour une solution bien plus performante avec 20 ou 24 groupes d'unités, mais au prix de puces qui semblent bien plus coûteuses.
La partie multimédia profite également du passage à Vega avec la gestion de la (dé)compression matérielle de nombreux formats, dont le H.265 (HEVC). Nous n'avons pour le moment pas pu avoir confirmation du nombre d'écrans gérés en simultané en HDMI/DP au maximum, deux sorties de ce type étant en général présentes sur les cartes mères.
AMD précise que Windows 10 Fall Creators Update (1709) est nécessaire pour tirer au mieux parti de ses nouveaux processeurs, et que le pilote permettant de profiter de Netflix en 4K/HDR, avec gestion du DRM PlayReady 3, sera finalement disponible dans le courant du second trimestre. Pour rappel, c'est déjà le cas pour Intel ou NVIDIA.
Precision Boost 2 : fréquences maximisées
Outre l'intégration d'une partie graphique, et la gestion différente des tensions ou de l'énergie qui va avec, c'est surtout à travers la gestion de la fréquence du CPU que les choses évoluent au sein de Raven Ridge. Un changement connu sous le petit nom de Precision Boost 2.
Ainsi, il n'y a plus différentes valeurs en fonction du nombre de cœurs actifs, mais un dispositif qui se veut plus progressif et qui doit permettre d'aller « plus loin, sur plus de cœurs, plus souvent et sur plus de charges de travail ». Il n'est donc plus question de fréquence « all-core boost » ou de XFR.
Une manière de s'adapter à des cas où de nombreux cœurs étaient actifs, mais avec une faible charge. Ainsi, la valeur utilisée n'était pas maximale alors qu'il restait un potentiel de TDP inexploité, permettant une hausse de la fréquence.
Raven Ridge est toujours capable de l'adapter par paliers de 25 MHz et 1000 fois par seconde, mais en cherchant à constamment exploiter la valeur la plus élevée possible, jusqu'à ce que le TDP ou sa fréquence maximale ne soient atteints. De quoi rendre l'impact du « Boost » encore plus important dans les performances, tout en limitant l'intérêt de l'overclocking « à la main ».
AMD en a néanmoins profité pour mettre à jour son outil d'overclocking Ryzen Master, qui passe en version 1.2 pour supporter les 2200G/2400G, ainsi que leurs spécificités au niveau de la gestion des tensions et des fréquences. Le constructeur annonce un gain potentiel important à ce niveau côté GPU, avec la possibilité de grimper entre 1,5 et 2 GHz, mais nous n'avons pour le moment pas pu le vérifier dans la pratique.
Les équipes d'AMD nous donnaient encore des informations complémentaires sur ce sujet ce dimanche. Nous reviendrons donc un peu plus tard sur cette pratique dans le détail, avec différentes cartes mères.
AMD suit son plan, lentement mais surement
Au final, ces APU basés sur l'architecture Ryzen semblent intéressants. Ils arrivent un peu tard sur le marché, mais intègrent des évolutions bienvenues de l'architecture, tant du côté de la gestion de l'énergie que de la fréquence, ainsi qu'une finesse de gravure légèrement améliorée.
Ici, AMD tient la promesse d'un plan qui se déroule sur la durée, sans se précipiter, même si les mises à jour tardives du côté des constructeurs de cartes mères ou les éléments de dernière minute concernant l'overclocking semblent indiquer que tout n'était pas près depuis des mois pour accompagner le lancement de ces puces.
On regrettera d'ailleurs le procédé de mise à jour des UEFI qui doit être effectué avec un processeur antérieur, et l'on se prépare à une confusion pour le consommateur avec l'arrivée des Ryzen 2. Ici, la dénomination 2xxxG semble indiquer qu'il s'agit d'une nouvelle génération, or ce n'est pas le cas. Il aurait sans doute été plus sage de rester sur 1xxxG. Mais AMD a sans doute préféré mettre en avant les évolutions qui prennent place dans ces puces.
Quoi qu'il en soit, on apprécie la stratégie du constructeur qui consiste à proposer mieux, pour un tarif identique à l'offre précédente, quitte à remplacer des modèles devenus obsolètes en moins d'un an. Le tarif de départ de 99 euros est plutôt bon, surtout pour des puces à quatre cœurs et devrait faire le bonheur des intégrateurs, notamment dans le secteur des machines d'entrée de gamme.
Ainsi, le Ryzen 3 2200G devrait connaître un certain succès. Il faudra voir ce qu'il en est pour le Ryzen 5 2400G, qui devrait être légèrement plus véloce, mais au prix d'un tarif presque doublé. Un point qui devrait le pénaliser même s'il reste très compétitif face à l'offre concurrente. Ses résultats lors des tests pourront peut-être faire la différence, mais il s'agira dans tous les cas d'un choix légèrement moins raisonnable.