La barre des 0,2 euro par Go est désormais franchie par des SSD de moyenne capacité. On trouve ainsi des modèles de 256 Go à moins de 50 euros de manière régulière. Mais pour ce prix, à quoi avons-nous droit ? C'est ce que nous avons regardé avec un 545s d'Intel exploitant des puces NAND 3D TLC à 64 couches.
Il y a deux ans, nous avions publié une étude de l'évolution du tarif des SSD. Nous relevions alors une baisse de 20 à 30 % dans la période allant de novembre 2014 à juin 2016. Depuis, les choses se sont accentuées.
Si les tarifs de l'époque se situaient entre 0,2 et 0,4 euro du Go, on est désormais bien en dessous. Il y a quelques jours, notre équipe en charge des bons plans trouvait un modèle de 256 Go à 40 euros, soit 0,16 euro le Go. Une baisse de plus de 30 % par rapport à nos chiffres de 2016 pour une telle capacité. On le trouve désormais aux alentours de 45 euros.
Il ne s'agit pourtant pas d'un modèle d'une marque lambda, mais d'un Intel 545s (Liberty Harbor) avec garantie de cinq ans. Curieux, nous nous sommes demandé quelles performances on obtenait pour un tel tarif, et de quoi se composait un tel SSD.
Format 2,5" à l'extérieur, tout rikiki à l'intérieur
Les habitués de la marque seront marqués par plusieurs points à l'ouverture du packaging et au déballage de ce modèle. Déjà, le bundle est tout simplement inexistant : pas de câble S-ATA, d'adaptateur pour une baie de 3,5" ou encore un mini CD contenant un outil Acronis pour la migration des données. Ce dernier reste néanmoins fourni par Intel sur son site.
L'autre élément marquant concerne le SSD lui-même. Son épaisseur est de 7 mm, il est donc plus fin que de précédentes générations (9 mm), reprennant un format désormais classique. La coque est aussi bien plus cheap, et semble tenir de la fine couche d'aluminium. L'ensemble est néanmoins résistant. Le poids passe ainsi de 80 à 41 grammes.
Annoncés fin 2017, les 545s ne sont pas une gamme comme les autres. Il s'agissait en effet des premiers SSD à utiliser des puces flash 3D NAND à 64 couches. Ces dernières offrent donc une très bonne densité, renforcée par le fait qu'il s'agit de modèles TLC (Triple Level Cell), stockant trois bits par cellule, contre un pour les SLC ou quatre pour les plus récents QLC.
Ainsi, deux puces 29F01T2ANCTH2 suffisent à constituer notre modèle de 256 Go. Un point pouvant pénaliser les performances en écriture. Dès lors, on comprend mieux pourquoi Intel a privilégié le modèle de 512 Go lors de l'annonce et des premiers tests. Ces puces sont accompagnées d'un contrôleur Silicon Motion (SMI), de 128 Mo de cache (Nanya NT5CC128M16IP-DI)... et c'est tout.
L'ensemble tient sur un PCB qui n'occupe même pas la moitié du SSD, une vis de fixation intermédiaire étant visible de l'extérieur. Bref, s'ils sont vendus au format 2,5" pour des histoires de compatibilité avec le gros des machines déjà sur le marché, ces modèles sont plutôt taillés pour des solutions plus compactes comme le M.2.
Caractéristiques et machine de test
Face à des SSD plus haut de gamme comme les M.2 exploitant le protocole NVMe, notre 545s fait forcément pâle figure. Il est principalement limité par son interface S-ATA 6 Gb/s qui le condamne à rester sous la barre des 600 Mo/s.
Officiellement, Intel indique des performances « jusqu'à » 550 Mo/s et 75k IOPS en lecture contre 500 Mo/s et 85k IOPS en écriture. La latence est donnée pour 50/60 µs et la consommation de 0,5 watt au repos à 4,5 watts en pleine charge. Son endurance annoncée est de 144 TBW (TeraBytes Written). Une fois formaté, 238 Go sont disponibles.
Notez qu'un firmware LHF004C vient d'être publié pour ces SSD, améliorant et corrigeant quelques points. La mise à jour passe par la SSD Toolbox d'Intel. Nous l'avons bien entendu utilisé lors de nos tests effectué sur une carte mère MEG Z390 ACE de MSI, accompagnée d'un Core i7-8700, de 32 Go de DDR4 et de Windows 10 October 2018.
Quelles performances ?
Pour vérifier les chiffres annoncés, nous avons transféré 17,5 Go de gros fichiers au format ISO depuis un RAMDisk de 20 Go. Nous avons alors obtenu des débits de 437 Mo/s en lecture et de 294 Mo/s en écriture.
Des résultats valables lorsque le SSD est plein, ou vide. On retrouve les mêmes avec un fichier « dummy » de taille identique, capable de profiter d'une compression des données par le contrôleur. Mais ces chiffres sont bien en deçà de ce qui est annoncé par le constructeur, ce que l'on ne peut que regretter.
Pour des usages basiques ou de la pure bureautique, ils pourront apparaître comme suffisants, surtout à ce tarif. Mais ils doivent avant tout inciter à être méfiants vis-à-vis des outils couramment utilisés pour la mesure de performances. En effet, si l'on regarde du côté de CrystalDiskMark, ATTO ou AS-SSD, voici ce que l'on obtient :
Les performances relevées avec les paramètres par défaut collent aux chiffres annoncés par Intel
Si les performances sont ici principalement exprimées en Mo/s, il est assez simple de retrouver la valeur équivalente en IOPS par un simple calcul, qui répond à la formule suivante :
IOPS = Mo/s * 1 000 000 / (1024 * taille des blocs en KiB)
Ainsi, lorsque notre SSD atteint, avec 8 threads (T) et une profondeur de queue (QD) de 8, un débit de 320,5 Mo/s sur des blocs de 4 kiB, cela donne un résultat de 78 247 IOPS. Pour rappel : 1 KiB = 1 024 octets et 1 ko = 1 000 octets.
N'utilisez pas les paramètres par défaut des benchmarks pour SSD
On constate donc que les écarts relevés par un simple test pratique sont invisibles de ces trois outils. Tout du moins, avec leurs paramètres par défaut. En effet, lors de notre copie de fichier, les performances du SSD « s'effondrent » seulement après une dizaine de secondes, et donc quelques Go :
Ces applications étant réglées pour se limiter à des transferts de 256 Mo ou 1 Go selon les cas, afin d'afficher rapidement un résultat à l'utilisateur, ils ne voient pas la limite de ce 545s. Mais dès que l'on passe à 10 ou 16 Go, les résultats ne sont plus les mêmes et l'on voit bien que les performances en écritures sont largement réduites.
Elles s'approchent alors de ceux obtenus avec une simple copie de fichiers. Un comportement courant avec les SSD, mais qui ne se produit en général qu'après une période bien plus longue ou un stress via des outils comme Iometer. D'ailleurs, une fois le SSD « usé » avec l'application, cette capacité de mise en cache, déjà assez courte, n'existe presque plus.
Il faudra alors en passer par une phase de Secure Erase afin de retrouver les performances des premiers jours.
Dès que l'on active des paramètres plus exigeants, les résultats en écriture collent à nos relevés lors des tests pratiques
Les prix baissent, mais les HDD restent parfois plus intéressants
Bref, les SSD continuent d'être très abordables, mais certains constructeurs continuent d'user d'astuces pour nous cacher les performances de leurs SSD d'entrée de gamme. On aimerait un peu plus de transparence de leur part sur ce point, surtout de la part de grandes marques comme Intel, même sur l'entrée de gamme.
De tels modèles dans cet ordre de prix pourront se montrer intéressants pour des machines à tarif plancher ou dans un NAS, ne serait-ce que pour constituer un cache complémentaire à des disques durs. Ces derniers continuent en effet d'offrir des performances qui ne dépassent pas les 100 à 200 Mo/s en séquentiel, à peine quelques Mo/s en aléatoire... avec une latence bien supérieure aux SSD, de l'ordre de la dizaine de millisecondes.
Ils restent néanmoins bien plus intéressants au Go, puisqu'un modèle de 3 To coûte une centaine d'euros, soit 0,03 euro le Go. C'est encore cinq fois moins que notre SSD du jour. Un écart qui continue de se réduire d'année en année.