Avec la montée en puissance de la 4G et l'arrivée prochaine de la 5G, il va être de plus en plus courant de voir ces réseaux mobiles proposés pour un usage fixe. Certains FAI travaillent à des solutions mixtes via leurs prochaines box, mais il est déjà possible de cumuler plusieurs connexions internet sur un PC ou réseau local.
Sans accès à la fibre ou à d'autres solutions très haut débit (THD), votre connexion internet doit en général se contenter de l'ADSL et d'un débit de 10 Mb/s ou moins. À une période où les mises à jour d'applications se multiplient et où certains jeux nécessitent des téléchargements de 60 à 100 Go (soit 12 à 24 heures en continu), cela peut être un problème.
Malheureusement, il existe peu de solutions. Il faut en général passer par une nouvelle technologie pour votre connexion, mais elles ne sont pas toutes disponibles et n'auront pas que des avantages. Les solutions mobiles (3G, 4G) notamment ont, comme le fixe, des limites physiques qu'elles ne peuvent dépasser. Elles seront assez vite atteintes.
Le satellite affiche une latence importante et se voit imposer le plus souvent des quotas, même si certaines offres essaient de se présenter comme illimitées. Du côté de la 4G, c'est un peu la même chose : vous aurez l'assurance d'une connexion, mais pas d'un débit, surtout si vous effectuez de lourds téléchargements de manière récurrente.
Dès lors, on peut décider d'utiliser ces technologies comme un simple complément. On peut également exploiter plusieurs connexions fixes sur une même machine ou un réseau. Mais comment faire dans la pratique ? Contrairement à ce que l'on pourrait penser, des solutions existent déjà. Et elles sont souvent simples et peu coûteuses à mettre en place.
Connexions internet supplémentaires : comment faire ?
La première question qui se pose est de savoir comment avoir accès à plusieurs connexions internet. La plus simple consiste à payer pour différents abonnements, sur une même technologie (ce qui n'est pas toujours possible) ou plusieurs. On peut ainsi dans un même logement disposer de la fibre et de xDSL, d'une connexion fixe et mobile, du satellite, etc.
Dans un tel cas, vous disposerez d'autant de box ou de modems/routeurs qui pourront être reliés à une machine ou un réseau. Mais parfois, il faudra user d'un peu plus d'astuce.
Vous pouvez par exemple acheter votre propre modem 4G, des constructeurs comme TP-Link proposant une gamme assez complète de produits, de 80 à 170 euros. Huawei dispose aussi de plusieurs références dans le même ordre de prix, qui sont en général celles utilisées par les opérateurs français pour leurs offres de 4G fixe.
Autre possibilité : utiliser la connexion du voisin, avec son accord. Certains utilisent en effet assez peu leur accès internet et n'auront rien contre le fait de vous aider à accélérer le vôtre lorsque cela est nécessaire. N'hésitez donc pas à poser la question, mais évitez de l'utiliser pour récupérer illégalement des films et autres séries. Votre aimable voisin pourrait en effet se retrouver face à une lettre de la Hadopi, et vous en vouloir.
Dans une telle configuration, il faudra que vous captiez assez bien sa connexion (avec un débit Wi-Fi au moins égal), ce qui est assez simple pour de l'ADSL. Si ce n'est pas le cas, plusieurs solutions s'offrent à vous :
- Placer un émetteur Wi-Fi plus puissant chez lui, comme un point d'accès
- Placer un répéteur Wi-Fi puissant chez vous
- Les deux à la fois
Dans l'un des cas que nous avons rencontrés pour ce dossier, nous étions dans une situation particulière : le voisin était d'accord pour partager sa connexion, mais il était situé dans une maison à une dizaine de mètres de distance avec une Freebox Crystal. Nous y avons donc placé un Mi Router 3 Wi-Fi 802.11ac de Xiaomi.
Pour récupérer le signal et disposer d'une connexion filaire, nous avons opté pour un répéteur X6S de Netgear (EX8000), que l'on trouve pour un peu plus de 160 euros. Il a l'avantage d'offrir un SSID unifié et d'utiliser une structure FastLane 3 identique aux modèles Orbi de la marque... tout en fonctionnant avec n'importe quel routeur.
Des modèles un peu moins complets et véloces sont également disponibles pour ceux qui le souhaitent comme les Nighthawk X4S (EX7500) et X6 (EX7700) que l'on trouve dans les 120 euros.
Windows et ses métriques
Passons maintenant à la manière d'utiliser nos différentes connexions sur une même machine. La plus simple repose sur le fonctionnement de Windows. L'OS de Microsoft gère en effet nativement l'existence de plusieurs connexions.
Vous pouvez ainsi relier vos box à une même machine à travers plusieurs ports RJ45, connexions Wi-Fi ou un mélange de tout cela. Par défaut, chacune se verra attribuer automatiquement une métrique. Elle définit un ordre de priorité d'utilisation décidé par le système en fonction de différents critères, notamment le débit.
Microsoft détaille les valeurs couramment utilisées dans les différents cas par ici. Vous pourrez connaître les métriques attribuées à vos différentes connexions avec la commande suivante (à gauche dans la liste des interfaces) :
route print
Vous avez bien entendu la possibilité de définir manuellement ces métriques, pour indiquer par exemple au système de traiter de manière égale deux connexions différentes. Pour cela il faut se rendre dans la liste Connexions réseau du Panneau de configuration (ou exécuter ncpa.cpl
depuis le menu démarrer).
Pour chaque connexion que vous voulez modifier il faut :
- Se rendre dans ses propriétés (double-clic)
- Double-cliquer sur Protocole Internet version 4 (TCP/IPv4)
- Cliquer sur Avancé... (en bas à droite)
- Décocher Métrique automatique
- Indiquer la valeur de métrique souhaitée
- Cliquer sur OK pour fermer les différentes fenêtres
Routeurs Multi-WAN : plusieurs connexions pour tout un réseau
Cette solution a plusieurs désavantages majeurs : elle ne fonctionne que sous Windows, que sur une machine à la fois et ne permet pas d'usages avancés. On pourrait en effet imaginer utiliser une seconde connexion non pas comme complément (load balancing), mais comme solution de secours (fail-over).
Un opérateur propose cela depuis quelques années : OVH avec OverTheBox, qui exploite MPTCP. Proposé sous la forme d'un service, il est vendu entre 20 et 40 euros HT par mois selon le boîtier et le niveau de support choisi. Un tarif auquel il faut ajouter le coût d'acquisition du boîtier. Vous pouvez utiliser le vôtre ou un de ceux proposés par la société :
- IT : 4 liens, 20 Mb/s max, configuration manuelle, 150 euros HT
- Plus : 8 liens, 400 Mb/s max, configuration automatique, 250 euros HT
Des marques se sont également spécialisées dans des solutions dites Multi-WAN. Il s'agit de routeurs capables de gérer différentes connexions internet et de les combiner de différentes manières. Peplink est l'une d'entre elles avec sa gamme Balance qui s'adresse plutôt aux entreprises, son modèle de base étant proposé aux alentours de 400 euros.
On retrouve également des sociétés un peu plus connues du grand public comme D-Link et son DWR‑953 aux alentours de 150 euros promettant de cumuler connexion fixe et 4G. Citons également le LRT224 de Linksys qui embarque deux ports WAN pour un peu moins de 200 euros. Mais pour notre test du jour, nous avons opté pour un modèle TP-Link.
TL-R480T+ : un modèle rackable, peu cher et avec quatre ports WAN
Nous l'avons commandé pour un peu moins de 70 euros. La raison est simple : il est limité à des flux de 100 Mb/s, ce qui sera largement suffisant dans les cas où l'objectif est de cumuler différentes connexions internet de faible débit. Une déclinaison Gigabit existe bien (TL-ER5120) mais son tarif approche des 200 euros.
Pour ce prix, vous disposerez d'un routeur à cinq ports, dont un LAN, un WAN et trois qui peuvent être configurés dans un mode ou l'autre. On peut donc y relier des appareils qui doivent intégrer le réseau ou des connexions internet.
Ici, le load balancing peut dépendre des débits déclarés (manuellement) pour chaque connexion ou se figer sur une en particulier pour une même application, ce qui permet parfois d'éviter quelques problèmes. Ce fonctionnement peut être complété par une gestion de liens défaillants permettant d'indiquer quelle connexion doit être utilisée en cas de problème et comment un problème est détecté : automatiquement, par un ping, sur un lien ou tous, etc.
L'interface du routeur est assez austère, mais plutôt complète, surtout pour un produit de ce prix. On pourra ainsi suivre en temps réel le débit utilisé par chaque connexion ou chaque machine (via son IP) sous la forme d'un tableau. On peut configurer différents VLAN, établir des règles de routage, de filtrage par mot clé, de gestion du firewall, etc.
Les fonctionnalités de QoS permettent d'attribuer des règles par heures de la journée, par service, mais aussi par groupe de machines, avec des quotas à ne pas dépasser et des règles à appliquer lorsque c'est le cas. La page d'accès peut être personnalisée, utiliser un serveur Radius ou Onekey. Bref, il y en aura pour tous les goûts.
On regrettera par contre de ne pas avoir droit à quelques éléments légèrement simplifiés comme le fait de définir une machine prioritaire sur les autres d'un clic par exemple. Il faudra tout définir un peu finement, ce produit s'adressant à ceux qui ont déjà quelques connaissances dans le domaine du réseau plutôt qu'à des utilisateurs grand public.
Dans la pratique, ça donne quoi ?
Nous avons tenté de regrouper deux connexions à travers le TL-R480T+ et une machine sous Windows 10 équipée d'une puce Wi-Fi et d'un port réseau. Dans les deux cas, nous avons utilisé une connexion ADSL aux alentours de 8 Mb/s et un routeur 4G MR400 de TP-Link avec une connexion SFR permettant d'obtenir un débit aux alentours de 10 Mb/s.
Pensez au passage à bien utiliser des plages d'IP différentes pour chaque connexion afin d'éviter tout conflit. La première chose que l'on remarque c'est que le cumul des débits ne se fait pas de manière systématique, absence de MPTCP oblige. En effet, certaines applications ont un fonctionnement assez basique et ne récupèrent qu'un flux sans possibilité de paralléliser cette tâche. C'est par exemple le cas d'un téléchargement via un navigateur ou de Steam par exemple.
Cela peut aussi dépendre de la configuration d'un service. Regarder une vidéo sur YouTube n'utilisera qu'une des deux connexions par exemple. Pour profiter à plein de vos connexions, vous devrez donc aussi apprendre à utiliser des applications et services qui profitent de cette possibilité, comme BitTorrent ou des gestionnaires de téléchargement.
Si vous utilisez une distribution Linux gérant ses mises à jour via APT (Debian, Ubuntu, etc.) vous pourrez par exemple opter pour apt-fast qui permet d'utiliser Aria2c pour le téléchargement des paquets.
En utilisant nos deux connexions en simultanée, on peut atteindre un débit d'un peu moins de 20 Mb/s
L'avantage dans le cas d'une solution basée sur un routeur comme le TL-R480T+, c'est que la répartition des connexions peut se faire à travers différentes applications utilisées sur une même machine, mais aussi sur différents utilisateurs au sein d'un même réseau. Le tout en profitant de la possibilité d'établir des règles.
Attention tout de même dans le cas de connexions peu stables ou avec des débits qui fluctuent de manière importante, car cela peut poser problème. La répartition ne se faisant pas avec une analyse automatique du débit, vous serez redirigé par défaut vers l'une ou l'autre des connexions un peu au hasard. Et si jamais l'une d'entre elles vient à être bridée, dans le cas d'une offre 4G ou par satellite par exemple, vous devrez intervenir manuellement pour qu'elle ne soit plus utilisée.
La solution se limitant à une machine et à la gestion de Windows pourra aussi vite montrer ses limites. Le mode automatique profite parfois à l'une des deux connexions aux dépens de l'autre, obligeant l'utilisateur à les couper et à les relancer pour remettre tout à plat. On passera alors vite par la solution des métriques manuelles, mais même là c'est en général loin d'être parfait. Surtout, cela ne conviendra que pour une seule machine à la fois.
Deux connexions avec des métriques identiques, fixées manuellement, lors d'un téléchargement via BitTorrent
Au final, si l'on apprécie cette possibilité offerte par l'OS de Microsoft, la solution se reposant sur un routeur apparaît comme plus complète et surtout bien plus exploitable dans la pratique. On s'étonne d'ailleurs de ne pas voir plus de constructeurs aller sur ce terrain. On imagine que des FAI feront bientôt ce choix afin d'exploiter au mieux la convergence possible entre leurs réseaux fixes et mobiles, notamment dans les zones mal desservies par l'ADSL.
En l'absence de telles solutions, le TL-R480T+ de TP-Link offre une prestation plutôt complète et assez efficace, pour un coût des plus mesurés. Si vous cherchez une option permettant de disposer d'une migration automatique vers une ligne de secours ou pour cumuler les capacités de plusieurs connexions internet, il mérite que vous y jetiez un œil.