L’annonce la plus attendue de la conférence Microsoft était finalement la plus surprenante : un ordinateur tout-en-un niant presque son statut de PC pour se présenter comme une table à dessin tactile. Le Surface Studio s’adresse très clairement aux graphistes, mais réclame en échange une somme élevée, surtout au vu de certains composants.
Le Surface Studio est le tout-en-un que les rumeurs prêtaient à Microsoft. Le descriptif ne convient cependant pas à cette machine, qui ne se retrouve pas vraiment alignée en face de l’iMac, référence du domaine. Le Studio se veut un outil de création et non spécialement bureautique, et encore moins de jeux. Il est constitué d’une base contenant tous les composants, ainsi que d’un grand écran inclinable, au point de pouvoir presque se coucher sur le bureau.
Des configurations figées, l'impasse sur les nouvelles générations
Dans la base, on trouve des composants qui, s’ils sont assez puissants dans l’absolu, ne sont pas non plus de dernière génération. Le processeur – un Core i5 ou i7 – est de génération Skylake, alors que des constructeurs comme Dell disposent déjà de puces Kaby Lake.
Même chose du côté de la carte graphique : une GeForce GTX 965M ou 980M. Non seulement Microsoft aurait pu monter jusqu'à la GTX 980 dans sa version mobile « non M » (nettement plus puissante), mais il aurait surtout pu chercher à profiter de l'arrivée des puces de la génération Pascal : les GeForce GTX 1060/70/80. Annoncées en août dernier, elles profitent d'une meilleure finesse de gravure et surtout d'une efficacité énergétique accrue.
L’ensemble est épaulé par 8, 16 ou 32 Go de mémoire vive ainsi qu'un stockage mixte (SSD et disque dur) de 1 ou 2 To... sans aucune possibilité d'avoir seulement un SSD de grande capacité. Dommage, à l'heure du M.2 et ses débits impressionnants. Il fonctionne sous Windows 10 Pro, propose quatre ports USB 3.0, un lecteur de cartes SD, un Mini DisplayPort, du Wi-Fi 802.11ac ou encore du Bluetooth 4.0. En clair, que du très classique.
Le Studio se différencie cependant sur un autre point : son écran.
Un écran plus important que les composants
C’est le cœur de la machine. La dalle de 28 pouces est d’une définition de 4 500 x 3 000, pour un ratio 3:2 donc et une résolution de 192 DPI. Microsoft assure que chaque dalle est calibrée individuellement, avec des profils Adobe sRGB, DCI-P3 et Vivid Color disponibles. La partie tactile prend en compte dix points de pression et est de type PixelSense.
Bien que l’on puisse utiliser le Studio comme un ordinateur classique, l’écran est monté sur deux bras qui lui permettent d’être pratiquement posé à plat sur le bureau. Il est alors incliné de 20° et s’utilise comme une table à dessin. Le Studio est livré avec le même stylet que la Surface Pro 4. La position change cependant la perspective de travail : l’utilisateur peut se pencher sur l’écran et s’appuyer dessus pour travailler, la gestion du tactile éliminant les pressions parasites pour ne s’intéresser qu’au stylet.
Surface Dial : un complément idéal, mais vendu séparément
Le concept va plus loin dès lors qu’on ajoute le Surface Dial, ce petit cylindre d’aluminium montré par Microsoft. Il agit comme un gros bouton de réglage de volume sur un équipement audio et permet d’influer sur divers paramètres : taille du crayon ou du pinceau, niveau de zoom, orientation du travail en cours, palette de couleurs en menu radial, etc. Le Dial peut être utilisé en même temps que le stylet, par exemple pour faire varier l’épaisseur du trait pendant que l’on dessine.
Le problème du Dial est, en fait, qu'il n'est pas fourni d'office avec le Surface Studio. Si les utilisateurs veulent l'utiliser, ils n'auront pas le choix : il faudra ajouter 99,99 dollars à une facture déjà salée. Le Dial n'est par contre pas limité au seul Studio puisqu'il est compatible avec les Surface Pro 3 et 4. Microsoft a par ailleurs indiqué que les constructeurs pourraient proposer des alternatives au Dial s'ils le souhaitaient.
Le Studio va-t-il se trouver un public ?
Mais si le concept est intéressant et devrait particulièrement ravir les dessinateurs et autres architectes, le Studio dispose-t-il réellement d’un marché ? Car il y a quand même quelques barrières, à commencer par le tarif : le Studio est cher.
Il est probable que son écran soit une importante composante du prix, mais avec un tarif d’appel à 2 999 dollars, le Studio sera hors de portée d’un grand nombre de portefeuilles. Surtout que pour ce tarif, non seulement la configuration matérielle est figée, mais elle ne commence qu’avec un Core i5, 8 Go de mémoire, 1 To de stockage et une GeForce GTX 965M.
Pour 3 499 dollars, on passe à un i7 et 16 Go de mémoire, tandis qu’il faudra débourser 4 199 dollars pour 32 Go, 2 To de stockage et une GeForce GTX 980M. Les tarifs en euros, qui devraient être bien plus élevés, ne sont toujours pas connus, la machine n'apparaissant pas dans la boutique en ligne française.
Par ailleurs, Microsoft propose forcément un produit de niche, conçu pour plaire à certaines catégories professionnelles. Or, il n’est pas le premier à proposer du matériel allant dans ce sens. On pense notamment à Wacom et à ses tablettes graphiques, qui propose déjà des écrans de grande taille ayant globalement le même objectif.
Quel est l'objectif de Microsoft ?
Il sera donc particulièrement intéressant d’attendre les premiers retours indépendants de dessinateurs et autres utilisateurs professionnels du stylet pour se faire une idée. Cependant, les tablettes Surface étant déjà populaires dans ce secteur, le concept pourrait bien intéresser ceux à la recherche de confort, surtout quand un écran Wacom aux capacités similaires débute à 1 800 euros, pour une définition inférieure et sans PC.
Le Surface Studio est dans tous les cas une machine de travail dont Microsoft assure avoir étudié le moindre détail. Mais sur le terrain du matériel haut de gamme, la société a encore tout à prouver. Cette machine ambitionne de proposer une expérience novatrice dans ces domaines. La question est de savoir maintenant si elle rencontrera son public.
Il est probable cependant que la firme ait cherché en dernier ressort à montrer non seulement ce qu’elle était capable de faire, mais également ce qu’il était possible de réaliser avec la prochaine évolution de Windows 10. Une sorte de porte-étendard qui peut servir de guide aux autres constructeurs du secteur. Charge à eux de s'en inspirer, et de proposer des modèles équivalents, et on l'espère, plus accessibles.