Alors que YouTube est de plus en plus un terrain de communication pour les marques hardware, elles n'hésitent plus à organiser des « unboxing » afin de créer de l'attente auprès de leur public. De quoi relancer le débat autour du lancement des produits.
Depuis quelques années maintenant, la stratégie des constructeurs dans le domaine du hardware est au découpage à outrance des annonces, le tout à coup d'embargos. Ainsi, un CPU ou un GPU ne peut pas être lancé sans que l'on ait droit à un teasing, une annonce incomplète, parfois de multiples évènements concernant des bouts d'architecture, les tests puis enfin... une mise sur le marché.
Multipliez les NDA, vous multiplierez les articles
Si NVIDIA s'est fait une spécialité de cette procédure, AMD n'est pas en reste comme l'a montré la très longue suite de NDA (accord de non divulgation) autour de Ryzen. Les deux compères auraient tort de se priver puisque les sites ont plutôt tendance à suivre, sans trop s'en émouvoir. De quoi permettre de multiplier les articles et faire passer le temps, puisque le rythme des nouveautés ne s'est pas vraiment accéléré ces dernières années.
Mais cette problématique en cache d'autres, qui sont liées à la fois à la question des embargos et à celle des voyages de presse. Nous ne reviendrons pas ici sur la pertinence de ces pratiques, chaque journaliste devant un jour ou l'autre s'y confronter. Nos confrères de CPC Hardware ont d'ailleurs eu l'occasion de parler des NDA récemment.
L'important est ainsi les conditions dans lesquelles cela s'exerce et la transparence vis-à-vis du lecteur. Des éléments qui deviennent essentiels (nous aurons d'ailleurs l'occasion d'en reparler sous peu) alors que l'on cherche de plus en plus à comprendre la « fabrique de l'information ».
Marque échange discours marketing contre PDF
Commençons par l'accès aux informations. En effet, de plus en plus, les marques n'ont plus seulement tendance à limiter l'accès à ceux qui signent un NDA afin de respecter une date de lancement, mais également à ceux qui se rendent aux voyages de presse.
Ainsi, ceux qui refusent une invitation ou ne sont pas invités ne peuvent travailler dans des conditions similaires à leurs confrères, sur simple décision de la marque. Pourtant, l'envoi d'un PDF par email (ou un accès web) n'est pas « contraint », on peut donc le faire avec autant de journalistes qu'une marque le souhaite.
Il y a certes la volonté d'éviter les fuites (qui arrivent tout de même), mais les documents produits sont désormais taggués au nom des journalistes concernés, et distribués à travers des accès personnalisés. Autant dire qu'une telle excuse ne pourrait pas apparaître comme valable.
Bref, cette limitation est surtout une volonté de faciliter la vie des journalistes « embarqués » tout en tenant les autres à l'écart. Des pratiques qui, dans d'autres secteurs, feraient s'émouvoir une partie de la profession.
Comment @mediapart est parfois blacklisté des déjeuners avec les politiques (dans «J'irai dormir à l'Assemblée», livre signé @Bekouz). pic.twitter.com/lrqIusrxH9
— Mathieu Magnaudeix (@mathieu_m) 6 mars 2017
Vous pouvez déballer le carton, mais attendez pour parler du produit
Plus récemment, on a vu une autre tendance monter en flèche : l'organisation de séances d'« unboxing ». Pour rappel, il s'agit ici de contenus le plus souvent au format vidéo qui permettent de découvrir ce qui se trouve dans une boîte, sans pour autant évoquer les détails ou les performances d'un produit.
Un format intéressant pour les marques de l'univers hardware, puisqu'il n'est pas toujours aisé de parler de produits très techniques en vidéo. Personne ne veut entendre une analyse de l'architecture de Kaby Lake avec un face caméra de 20 minutes ou voir un CineBench single core tourner pendant cinq minutes. L'objectif n'est d'ailleurs pas tant l'information que le divertissement.
Les sociétés cherchent ici à créer de l'enthousiasme et de l'attente autour de communautés identifiées comme les joueurs. Et outre les contenus sponsorisés que certains produisent, les « unboxing » peuvent être une manière simple et peu coûteuse d'atteindre leur but.
Elles organisent donc désormais ces petites séances de découverte, là aussi sous couvert de respect d'une date d'embargo. Il n'est donc plus vraiment question de produire de tels contenus de manière spontanée, les constructeurs choisissant les quelques « élus » qui auront l'occasion de montrer une carte graphique dernière génération ou une boîte en bois à leurs fans. Les équipes locales se voient d'ailleurs de plus en plus attribuer des objectifs chiffrés liés à de telles opérations.
On l'avait vu avec Ryzen, NVIDIA vient de faire de même avec la GeForce GTX 1080 Ti. Annoncée le 1er mars, elle était mise en précommande le 2 mars. Les « unboxing » peuvent désormais être publiés, permettant ainsi de découvrir que dans une boîte de carte graphique, on retrouve... une carte graphique. Wccftech en a d'ailleurs relevé un petit florilège.
Pour rappel, l'arrivée chez les revendeurs de la GeForce GTX 1080 Ti (et donc les tests des premiers exemplaires distribués) est attendue pour le 10 mars. Peut-être aura-t-on alors droit à des micro-trottoirs permettant de connaître les réactions des premiers acheteurs.