Avec le lancement de son FS3017, Synology surprend et s'attaque à un nouveau marché. Nous avons profité de notre passage à Taipei pour échanger avec le fabricant afin d'évoquer les deux axes de sa stratégie : les professionnels et le logiciel, via des licences payantes.
Au Computex, Synology est évidemment présent afin de dévoiler de nouvelles versions de ses NAS et de son routeur. La série x16 voit ainsi arriver ses derniers modèles (DS916+, DS416play, DS216+ II et DS116), en attendant les DSx17 qui ne devraient pas trop tarder.
Le constructeur ne surprend pas vraiment puisqu'il n'y a que très peu de changements d'une génération à l'autre, on ne change pas une équipe qui gagne. Quitte à parfois paraître un peu trop conservateur. Pour autant, la société a décidé de se lancer sur un nouveau marché avec son FlashStation FS3017.
Lubie passagère ou amorce d'une réorganisation plus profonde ? Nous lui avons posé la question et en avons profité pour évoquer le futur de son interface et de son modèle économique.
FS3017 : un « NAS » à près de 10 000 dollars, pour conquérir les entreprises
Nous avons déjà présenté le FS3017 dans cette actualité, mais notre passage sur le stand du fabricant nous a permis d'en apprendre un peu plus. Il s'agit donc d'un « all-flash-array », ce que l'on pourrait traduire approximativement par serveur entièrement en mémoire flash. Il est prévu pour accueillir des SSD exclusivement afin de proposer des performances de haut niveau sur les entrées/sorties (indispensable pour de grosses bases de données ou de nombreuses machines virtuelles par exemple).
Synology est conscient qu'il est difficile de s'attaquer à un marché comme celui des professionnels. Il tente donc une approche en visant « l'entrée de gamme ». Son FS3017 est en effet compatible avec les SSD S-ATA et SAS alors que la majorité de ses concurrents ne prend en charge que du SAS, nous explique la société. La différence entre les deux se joue sur les performances, mais aussi et surtout sur le prix. Là où un SSD S-ATA de 2 To se trouve à partir de 615 euros, il faut généralement le double ou le triple pour un modèle SAS.
Le tarif de son dernier bébé n'a pas été dévoilé, mais le constructeur laisse quelques pistes dans son communiqué de presse afin de l'estimer. Il indique un prix de revient de 0,52 dollar par Go. Avec des SSD Samsung de 2 To (ceux qui présentent le meilleur rapport capacité/prix dans cette gamme) à 650 dollars pièces on arrive à 15 600 dollars, contre 25 000 dollars annoncés par Synology (0,52 dollar par 48 Go). La différence (qui correspond donc au prix du NAS) est d'environ 10 000 dollars, tarif auquel Synology devrait proposer son FS3017.
La difficulté de convaincre, la nécessité d'être à la hauteur
Disposer d'une machine avec des caractéristiques techniques alléchantes sur le papier n'est pas tout, encore faut-il proposer une partie logicielle à la hauteur des attentes. Dans un premier temps, le FS3017 exploitera donc une version plus ou moins modifiée du DSM 6.0. Par la suite les deux moutures suivront chacune leur chemin en fonction des besoins des uns et des autres.
Si Synology a l'avantage de proposer une interface qui reprend un design et une ergonomie éprouvée (ce qui n'est pas toujours le cas de ses concurrents sur les all-flash-array), il devra néanmoins faire ses preuves côté fonctionnalités. Les professionnels n'ont évidemment pas les mêmes besoins que les particuliers (même ceux avec une utilisation poussée) et le moindre problème peut avoir des conséquences autrement plus fâcheuses.
Un point manquera par exemple à l'appel pour le moment sur le FS3017 : la déduplication. Cette fonctionnalité est pourtant largement utilisée car elle permet de n'enregistrer qu'une seule fois des blocs identiques de différents fichiers, ce qui diminue l'espace de stockage utilisé. Ses équipes se penchent sur la question et cela devrait arriver... un jour.
S'attaquer au lucratif marché des professionnels... et ce n'est que le début
Dans tous les cas, l'arrivée de Synology sur le segment des professionnels n'est pas anodine, le fabricant cherche à conquérir de nouveaux marchés pour assurer sa croissance maintenant qu'il a inondé les particuliers et que ces derniers ne vont pas renouveler leur machine tous les ans. Un segment qui est d'autant plus juteux, car les marges sont généralement sans commune mesure avec celles des particuliers. Et ce, même si l'on propose des prix plus abordables que la moyenne.
Le FS3017 n'est que la première pierre de la gamme FlashStation et certainement pas la dernière si le carnet de commandes se remplit. Contrairement à la gamme DSxxx, le premier groupe de chiffre ne correspond pas au nombre d'emplacements que le NAS peut gérer, mais au placement du produit dans la gamme.
« 30 » pour du milieu de gamme donc, ce qui laisse au constructeur de la marge de manœuvre pour lancer par exemple des FS1017, FS5017, etc. On attendra maintenant de voir quels seront les changements entre les différents modèles et lors de l'arrivée de nouvelles générations FS3018 ou FS3019, etc.
S'il devrait être question de processeurs plus ou moins rapides, on espère que ça ne se limitera pas à quelques variations sur la connectique, la couleur des racks, la présence de LED avec une luminosité ajustable... Ce ne serait pas la première fois puisque c'est déjà le cas sur certains DiskStation lors d'un changement de génération.
Nouveaux NAS : quand Synology se repose (trop) sur ses lauriers
Il faut dire que Synology a tendance à se reposer sur ses lauriers depuis quelques temps. Le constructeur dispose d'une part de marché très importante, et ce n'est pas Ve-Hotech qui dira le contraire, malgré un manque de prise de risque certain ces derniers temps. Les annonces de NAS s'enchainent et se ressemblent toutes plus au moins, seule l'arrivée d'une nouvelle version de DSM arrive ainsi à créer un réel enthousiasme.
Sur la connectique par exemple, Synology a mis beaucoup de temps à passer à l'USB 3.0 et ne prévoit pas de changer pour de l'USB 3.1 ou un connecteur Type-C pour le moment. Point de sortie vidéo ou de Thunderbolt non plus. S'il ne faut pas non plus aller trop loin et dans tous les sens comme QNAP avec son NAS « VR Ready », voir quelques tentatives qui sortent de l'ordinaire serait appréciable.
Certes, Synology a été rapide à proposer un NAS avec transcodage vidéo H.265 (HEVC), mais cette fonctionnalité n'est disponible que sur un seul modèle : le DS216play. Le DS416play qui vient d'être annoncé n'est pas compatible pour le moment, la faute aux pilotes d'Intel inexistants sur Linux, selon Synology. Qu'à cela ne tienne, il faut quand même lancer de nouveaux modèles, peu importe la prise en charge ou non du H.265 dans un premier temps. Dommage.

Simplification de la gamme : enfin une bonne nouvelle
Dans le même temps, Synology continue sa routine et les NAS d'anciennes générations sont régulièrement renouvelés afin d'occuper le terrain. Problème, son catalogue est relativement épais avec des NAS deux, quatre et cinq, huit et douze baies, des versions « se », « j », « + », « sx », etc.
Sur ce sujet, Synology nous indique que la tendance est désormais à la simplification en utilisant de manière plus importante ses baies d'extension. Première brique visible de ce changement de cap, le DS916+ (premier NAS de la série DS9xx). Pour résumer, il s'agit d'une mise à jour du DS415+, mais avec la possibilité de brancher un DX513 (unité d'extension avec cinq baies supplémentaire).
Via les DX213 et DX513 et des NAS avec deux et quatre baies seulement, Synology peut ainsi proposer des machines capables de gérer deux, quatre, six, sept et neuf périphériques de stockage par exemple. De quoi couvrir une large partie des besoins de chacun. Attendons maintenant de voir ce que cela donnera au cours des prochains mois.
Le logiciel prend de l'importance, les fonctionnalités payantes aussi
Si Synology a bonne presse, c'est autant pour ses NAS que pour son DSM. La version 6.0 introduit un changement important dans la stratégie du constructeur : la mise en place de fonctionnalités payantes, en complément de la baisse de certains modèles de la gamme 2016. C'est notamment le cas de Virtual DSM et de Mail Plus (voir notre analyse). Pour utiliser plus d'un certain nombre de licences (cinq par exemple pour Mail Plus), il faut passer à la caisse.
Un principe qui n'est pas nouveau puisqu'il est déjà appliqué à la Surveillance Station depuis des années, mais qui va prendre une place de plus en plus importante. La preuve avec la mise place d'un support technique prioritaire (en moins d'une heure) et payant. Cela permet également de profiter d'un SAV amélioré puisque, en cas de panne, le fabricant enverra un NAS avant d'avoir récupéré le vôtre.
Pour le moment proposé à Taiwan, il pourrait s'étendre dans d'autres pays. Bien évidemment, le support technique gratuit reste toujours accessible comme avant. Ce service ne concerne que des personnes qui souhaitent un traitement plus rapide que les autres, ce qui peut avoir un intérêt pour une PME par exemple.
Le constructeur nous explique qu'il va continuer dans cette voie. Lors du lancement de nouveaux services importants qui ont mobilisé une bonne partie de ses équipes, certaines fonctionnalités pourront être payantes.
Prochaine étape, la prise en charge du système de fichier exFAT par le DSM... qui sera facturé 4 euros aux personnes intéressées. Le fabricant nous explique que cela correspond aux royalties à payer à Microsoft pour l'utiliser. Il ne cherche pas à faire de bénéfice, mais répercute tout de même ce coût à ses clients qui souhaitent en profiter. Libre à eux d'apprécier, ou non.
Il est prévu que le prix des licences supplémentaires payantes (Surveillance Station, Mail Plus, Virtual DSM, etc.) puisse diminuer au fils des mois/années pour éventuellement être proposé à tout le monde au bout d'un certain temps. Au-delà des paroles, on attend maintenant de voir ce qui sera réellement mis en place dans la pratique.
Vers toujours plus d'outils collaboratifs
Reste un grand axe de développement de Synology sur la partie logicielle : les outils de travail collaboratif. Le Taïwanais ne s'arrêtera donc pas à ses applications de bureautique, largement inspirée de Google Docs, à son client mail et à son application Notes. Mais pour le moment, il refuse de nous en dire plus.
Il faudra donc attendre de nouvelles annonces pour avoir plus de détails. Sachez enfin que, comme l'année dernière, une conférence ouverte au public sera organisée entre septembre et octobre à Paris. Les annonces devraient être intéressantes, nous promet-on. Nous serons là pour le vérifier.