Lorsque l'on teste des routeurs, on a tendance à se focaliser sur des modèles haut de gamme, à plusieurs centaines d'euros. Mais certains veulent parfois simplement du Wi-Fi 802.11ac, et les fonctionnalités de base. C'est que propose le Mi Router 3 de Xiaomi que nous analysons aujourd'hui.
C'est fait : le géant chinois Xiaomi est disponible sur le territoire français, site en ligne et boutique parisienne à l'appui. L'occasion de s'intéresser aux produits de la marque qui se distinguent par leur prix (objectif de 5% de marge bénéficiaire sur les smartphones) mais aussi par une volonté d'utilisation simple et quelques choix parfois étonnants.
Pour commencer cette série, nous nous sommes attardés sur le Mi Router 3 acheté à Barcelone en début d'année. Vendu pour 24,99 euros seulement, ce modèle qui propose du Wi-Fi 802.11ac dual band (867 + 300 Mb/s) affiche une limite étonnante pour 2018 : ses ports réseaux ne fonctionnent qu'à 100 Mb/s.
Une question se pose alors : quelles performances peut-on attendre et quelles sont les fonctionnalités proposées par un routeur signé Xiaomi dont ce n'est pas vraiment le métier au départ ? C'est ce que nous avons tenté de savoir.
Un routeur format A5
Le premier point fort de ce produit, outre son prix, c'est qu'il est compact. Ses dimensions sont de 195 x 131 x 25,30 mm, pour un poids de 220 grammes (177,30 mm de haut avec les antennes). Il embarque un SoC Mediatek MT7620 accompagné de 128 Mo de mémoire DDR2 et 128 Mo de stockage flash SLC.
À l'avant un simple voyant donne le statut du routeur (bleu, jaune, rouge). À l'arrière, on retrouve les deux ports RJ45 à 100 Mb/s, un troisième pour le lien avec le modem, un ports USB 2.0 pour un disque dur, la prise d'alimentation et un bouton reset. L'ensemble est donc sans fioriture et un peu daté, ce qui explique son faible tarif.
Bon point : on trouve sous l'appareil quelques indications sur la façon de le remettre à zéro ou la signification de la couleur de la diode (en anglais). Il y a aussi l'IP ou l'URL d'accès par défaut à l'interface et un QR Code renvoyant vers l'application mobile de gestion des routeurs Xiaomi (nous en reparlerons plus loin).
Configuration : c'est assez simple
Par défaut, le Mi Router 3 se branche comme n'importe quel routeur : le port Internet à la box du FAI, les autres aux périphériques locaux, et c'est parti. Ici, la présence de deux ports limitera par contre grandement les possibilités ou forcera à se reposer sur un switch tiers.
Notez que de par sa taille et son poids assez léger, ce routeur peut facilement être transporté. Son adaptateur secteur est lui aussi compact. On regretterait presque qu'il n'utilise pas une connectique USB classique, surtout qu'il affiche une puissance de sortie de 12 watts (1 A, 12 V).
Pour la première configuration Xiaomi n'a pas décidé de se reposer sur un Wi-Fi sécurisé au mot de passe prédéfini, mais plutôt sur un réseau ouvert auquel tout le monde pourra avoir accès. Comme par la suite, il faudra se rendre sur l'URL ou l'IP par défaut du routeur pour accéder à la page de gestion :
http://192.168.31.1
http://www.miwifi.com
La première étape consiste à accepter les conditions générales. Attention, la participation au programme d'amélioration de l'expérience utilisateur, qui consiste à collecter des données statistiques anonymes, est activée par défaut (ce qui n'est pas très RGPD). Pensez à décocher cette case si vous ne voulez pas en être. Vous pourrez changer ce choix à tout moment.
On note qu'ici tout est en anglais. C'est pour le moment la seule alternative proposée au chinois dans l'interface, malgré la présence renforcée de la marque dans plusieurs pays européens. Le système utilisé est basé sur OpenWRT : MiWiFi OS.
Ensuite vient la configuration du réseau Wi-Fi. Ici il faut choisir un nom (SSID) et un mot de passe. Le mode « pénétration de mur » est activé par défaut, mais peut être désactivé. Il s'agit ici de déterminer le niveau de puissance du signal.
Notez que vous avez la possibilité d'opter pour une configuration non pas en routeur mais en répéteur, avec ou sans fil. Cela vous permet d'utiliser le Mi Router 3 comme un point d'accès Wi-Fi 802.11ac afin de déporter un réseau existant dans une pièce lointaine par exemple. Il est également possible de préciser des paramètres de connexion PPPoE.
N'attendez par contre pas de fonctionnalité de Wi-Fi unifié ou de roaming ici, cela reste la chasse gardée de produits haut de gamme comme les Orbi de Netgear et autres Velop de Linksys.
Enfin vous serez invités à préciser où se trouve le routeur (maison, travail, autre) et à choisir un mot de passe d'accès pour l'interface en ligne. Celui-ci peut être rendu identique au réseau Wi-Fi via une simple case à cocher. Une fois cette étape terminée, les réseaux Wi-Fi sont créés, et vous aurez trois éléments mis en avant :
- Le téléchargement de l'application mobile
- L'accès à internet (qui renvoie vers Baidu.com)
- L'accès à l'interface d'administration du routeur
Une interface simple et plutôt réussie
Pour la première connexion, vous n'aurez pas à taper votre mot de passe, mais il vous sera bien entendu demandé le reste du temps. Une fois arrivé dans l'interface de gestion, les éléments principaux sont mis en avant : l'accès au détail des appareils, de la connexion internet et le menu principal.
Ce dernier vous permet de changer le nom du routeur, de le mettre à jour, le redémarrer, de vous déconnecter ou de vous rendre sur la page de téléchargement de l'application mobile.
Graphiquement, l'ensemble est plutôt agréable à l'œil. Bords arrondis, fond bleu, lignes vertes, jolis logos, petits détails placés çà et là. C'est assez basique, notamment au niveau des graphiques, mais il y a juste ce qu'il faut. Surtout, c'est bien plus réussi que bon nombre d'interfaces de routeurs « classiques ».
La page principale référence les informations de base du routeur : son firmware, son adresse MAC et son numéro de série. On peut voir un graphique de l'utilisation de la bande passante en temps réel, sans historique sur une journée, une semaine ou un mois. Dommage.
La répartition sur les différents appareils est affichée sous la forme d'un camembert avec des informations sur la quantité de données que cela représente, mais c'est tout. Aucun niveau de détail supplémentaire n'est donné sur ce point.
Plus bas, deux autres graphiques permettent de suivre le niveau d'occupation du SoC et sa fréquence. Cliquer sur Detail permet d'afficher un gestionnaire des tâches simpliste proposant de lancer ou tuer celles qui sont disponibles. Il en est de même pour la mémoire, étrangement affichée dans une section Storage, un terme qui désigne l'espace de stockage.
Le premier niveau de navigation se situe au niveau des trois zones en haut de page : Appareils, Routeur, Internet. La seconde section est celle affichée par défaut. La première comporte une liste des périphériques connectés, leur adresse IP/MAC et le temps depuis lequel ils sont présents. Un petit sélecteur permet de leur couper d'un clic l'accès à internet.
Dans la dernière zone, on retrouve quelques paramètres relatifs à la connexion internet : l'IP du routeur, celle de la passerelle et du serveur DNS, le type de connexion et le débit relevé. Cette information peut être mise à jour à travers un test qui peut être effectué à tout moment ou modifiée manuellement.
Paramètres et fonctionnalités avancées
Vient ensuite le second niveau de navigation, présent tout en haut de la page. Il permet d'accéder à la gestion du stockage via le port USB 2.0, mais aussi aux paramètres du routeur et autres fonctionnalités plus avancées.
Pour la partie stockage, on regrettera que la page de téléchargement des différents clients ne soit pas disponible au moins en anglais. Ici, l'objectif est de proposer quelques fonctions de base comme le téléchargement de fichiers sur l'espace de stockage, l'accès par le réseau, une application d'accès aux photos et vidéos, la sauvegarde automatique de vos photos, etc. Mais absence de l'anglais oblige, tout cela sera presque totalement inutilisable.
Côté paramètres, ils se découpent en cinq sections : Wi-Fi, Réseau, Sécurité, LAN et Status. Dans la première, on peut activer le mode dual band qui évite d'avoir deux réseaux pour le 2,4 GHz et le 5 GHz. On peut également renforcer la sécurité (WPA/WPA2 par défaut, plutôt que WPA2), modifier le canal Wi-Fi ou le niveau de puissance du signal.
Une fonctionnalité de réseau invité est présente. On peut choisir son SSID, le type de sécurité et le mot de passe associé.
Les autres sections sont assez classiques. Elles permettent de gérer le type de connexion, les serveurs DNS, le DHCP, le mode de fonctionnement du routeur, restreindre les accès, mettre à jour le routeur, effectuer une sauvegarde de ses paramètres, changer l'heure (par défaut sur l'est asiatique), etc.
On notera quelques éléments intéressants comme la possibilité de modifier manuellement l'adresse MAC de l'appareil, de couper le Wi-Fi d'un clic ou de limiter l'accès à l'interface d'aministration à seulement certaines machines. Cela montre que, tout basique que soit ce produit, il offre tout de même quelques fonctionnalités qui ont leur intérêt.
Du côté des paramètres avancés, on fait le même constat. La QoS existe, mais elle permet seulement de gérer un niveau de priorité ou de bande passante appareil par appareil. On peut utiliser des services de VPN ou DDNS (Dynamic Domain Name Server), rediriger des ports, attribuer des IP statiques et gérer l'UPnP. Rien de plus classique.
Une application mobile qui fait le job
Comme l'interface web, l'application mobile de gestion du routeur est disponible en anglais. Elle vient d'ailleurs de passer en version 4.0 apportant une nouvelle interface et quelques nouveautés.
La création d'un compte Mi est nécessaire pour l'utiliser, le routeur devant être appairé avec ce dernier. Une fois ceci effectué, vous aurez accès à votre interface vous permettant de gérer un ou plusieurs routeurs. Vous pouvez d'ailleurs partager l'accès (aux fichiers de l'espace de stockage) à des amis.
La page principale vous permet de voir le débit de votre connexion en temps réel, ainsi que celui des différents appareils. La section stockage vous permet d'accéder à vos fichiers, alors que la Toolbox propose l'ensemble des paramètres ainsi que quelques fonctionnalités comme l'optimisation du Wi-Fi (qui permet de vérifier que le canal utilisé est le bon).
Le point intéressant est que l'on retrouve dans cette application l'ensemble des possibilités de l'interface web (qui n'est pas responsive), bien que le tout est agencé de manière assez différente. On note quelques bugs de jeunesse, comme un plantage dès que l'on veut voir le détail de l'appareil, mais globalement, cette application est plutôt pratique.
100 Mb/s maximum
Pour ce qui est des performances, nous savions que nous serions dans le bas du classement. Avec des ports 100 Mb/s il est techniquement impossible d'effectuer un transfert plus rapide depuis un appareil connecté au réseau local. Dommage pour ceux qui ont une connexion fibre dont le débit est supérieur à ce chiffre.
On se demande alors pourquoi annoncer du 802.11ac à 867 + 300 Mb/s. Tromper le consommateur qui n'ira pas forcément regarder le détail des caractéristiques techniques à l'arrière de la boîte ? Pas seulement, puisqu'il existe tout de même une possibilité d'aller au-delà des 100 Mb/s : effectuer un transfert entre deux appareils connectés en Wi-Fi. Mais avouons que ce n'est pas le cas le plus classique.
Pour nos tests, nous avons opté pour une configuration classique et utilisé l'un de nos appartements de référence (80 m²) avec le routeur placé en 4 et des points de mesure en 3 (séjour) et 1 (chambre) :
Nos essais ont été effectués avec un Dell Latitude 7390 qui a l'avantage d'utiliser une puce Wi-Fi plutôt efficace : la Wireless-AC 8265 d'Intel (MU-MIMO 2x2, 867 Mb/s). Nous avons comparé ce Mi Router 3 à deux solutions que l'on trouve assez souvent dans le grand public, afin de voir ce qu'il pouvait apporter pour un utilisateur lambda : une Freebox Révolution (802.11ac) et la nouvelle Livebox qui propose une très bonne connexion Wi-Fi (voir notre précédent test).
Le test prend la forme d'un transfert depuis un NAS Synology DS416play relié au routeur via un port RJ45 (100 Mb/s). Un fichier de 3,7 Go est copié trois fois vers le PC avec notre outil LanBench permettant de relever le temps nécessaire et donc déterminer le débit moyen qui fait office de résultat :
Comme on pouvait s'y attendre, les performances du Mi Router 3 sont limitées par la vitesse des ports réseau, à un peu moins de 100 Mb/s (soit 12,5 Mo/s). La bonne nouvelle, c'est que l'on retrouve ce résultat aussi bien en environnement proche, que dans la chambre. On voit que ce n'est pas le cas avec la Freebox Révolution par exemple.
Celle-ci offre de bons débits en 802.11ac, mais montre assez vite ses limites et de l'instabilité. Ainsi, dans la chambre impossible d'obtenir un signal 802.11ac. On repasse alors sur le 802.11n et un débit ridicule : 4 Mo/s. Ici, la Nouvelle Livebox d'Orange s'en tire sans surprise avec les honneurs, dans l'ensemble des cas.
Mi Router 3 : intéressant surtout pour multiplier les points d'accès
Au final que penser de ce produit ? Tout d'abord il ne s'adresse qu'à ceux qui veulent un appareil conçu par une entreprise chinoise au sein de leur réseau local. Un point qui peut paraître anodin, puisqu'on peut difficilement placer une confiance beaucoup plus importante dans les produits américains, mais qui comptera pour certains.
De manière assez pragmatique, cette différence s'exprimera ici par l'interface seulement proposée en anglais et les clients relatifs aux fonctionnalités de stockage qui ne sont pour le moment disponibles qu'en chinois.
Pour le reste, l'interface est graphiquement agréable, on s'y retrouve assez facilement malgré des fonctionnalités parfois un peu éparpillées, l'ensemble est plutôt complet. On retrouve des classiques du côté des paramètres et des options, mais aussi de petits détails que l'on ne s'attend pas forcément à voir dans un produit à 25 euros.
Les performances sont, de fait, limitées par la présence de ports à 100 Mb/s seulement, mais pour certains, ce sera suffisant. On constate d'ailleurs que ce débit est tenu sur la distance, c'est sans doute le principal. On imagine surtout que ce produit peut avoir un intérêt comme solution d'appoint, pour obtenir du Wi-Fi 802.11ac à moindre frais. Par exemple si vous n'avez qu'une vieille box de votre FAI à votre disposition.
Il peut également être utile pour multiplier les points d'accès dans une maison sans forcément se ruiner. Là, il faudra tout de même faire attention à l'installation. L'absence de gestion du roaming ou d'un Wi-Fi au SSID unifié pouvant demander de passer constamment d'un réseau à un autre.
Dans tous les cas, il s'agit d'une possibilité à prendre en compte. Xiaomi semble néanmoins conscient de l'importance de passer au Gigabit sur un tel produit et vient d'annoncer son Mi Router 4. Le reste de ses caractéristiques évolue peu (SoC MT7621A) et son tarif affiché est de 199 yuans, soit un peu moins de 32 euros TTC hors frais d'importation.
Il faudra voir s'il est rendu disponible en France dans les semaines ou mois qui viennent, quel sera son tarif ainsi que ses performances. Il pourrait alors bien s'afficher comme une alternative très intéressante pour un petit réseau local.