Géolocalisation : focus sur le Wi-Fi RTT (802.11mc), pris en charge par Android 9 Pie

Que la traque commence
Réseau 6 min
Géolocalisation : focus sur le Wi-Fi RTT (802.11mc), pris en charge par Android 9 Pie
Crédits : shutter_m/iStock.Thinkstock

Avec Android 9, la géolocalisation en intérieur s'améliore grâce au Wi-Fi 802.11mc, alias Wi-Fi Round-Trip-Time (ou encore RTT). Cette technologie n'est pas nouvelle. Elle est déjà disponible sur des smartphones et points d'accès depuis des mois, mais désormais supportée nativement par Android.

La semaine dernière, sans crier gare, Google a dévoilé la version finale d'Android 9, connue sous le petit nom de « Pie ». D'ores et déjà disponible pour certains smartphones, elle apporte son lot d'améliorations sur de nombreux pans du système d'exploitation, avec de l'intelligence artificielle à tous les étages ou presque (c'est dans l'air du temps...).

Dans un billet de blog pour les développeurs, Dave Burke (vice-président de l'ingénierie) annonce aussi la prise en charge d'un nouveau protocole sans fil : le Wi-Fi 802.11mc, aussi connu sous le nom de Wi-Fi Round-Trip-Time (RTT) ou encore Wi-Fi Location. Il ne s'agit pas cette fois d'augmenter les débits et/ou la portée du signal, mais de géolocalisation, y compris dans les bâtiments, avec une précision de l'ordre d'un ou deux mètres.

Connaitre sa position grâce à la trilatération

Comme son nom l'indique, le Wi-Fi RTT mesure le temps mis par le signal pour effectuer un aller-retour entre le terminal mobile et un point d'accès. Une fois cette information récupérée, il est facile d'en déduire la distance entre les deux car la vitesse de propagation des ondes est connue. Vous devinez la suite ?

En multipliant les mesures avec plusieurs points d'accès, il devient possible de connaitre la position géographique d'un smartphone grâce à la trilatération, un cousin de la triangulation avec des distances à la place des angles. Trois points d'accès sont généralement suffisants selon Google et la Wi-Fi Alliance, sauf s'ils sont alignés avec le smartphone ou situés trop près les uns des autres. Dans l'image ci-dessous, le terminal se trouve à l'intersection des trois cercles (violet, bleu et vert), au centre desquels se trouvent les points d'accès. 

Cette méthode est en fait une évolution d'une autre plus ancienne utilisant la puissance du signal (Received Signal Strength Indication ou RSSI) pour estimer sa distance entre le terminal mobile et le point d'accès. Le Wi-Fi RTT donne évidemment des résultats plus fiables.

Trilatération
Principe de la trilatération, technique également utilisée par les satellites. Crédits : Maths.org

Une précision multipliée par 100 avec le Fine Timing Measurement

Pour avoir une bonne précision, il faut mesurer avec finesse le temps mis par le signal pour faire l'aller/retour. Dans ce but, le Wi-Fi 80.11mc s'appuie sur le Fine Timing Measurement (FTM), un protocole standardisé par l'IEEE802. Il s'agit d'une amélioration du Timing Measurement (TM), avec deux principales nouveautés : la précision de l'horodatage est multipliée par 100 (de 10 ns on passe à 0,1 ns) et il n'est pas nécessaire que le terminal soit connecté au(x) point(s) d'accès.

La première différence est importante puisque, en prenant 300 000 km/s comme base de calcul, une précision de 10 ns donne une incertitude de 3 mètres, contre 3 centimètres seulement avec 0,1 ns. Il ne faut par contre pas s'attendre à une précision centimétrique avec le Wi-Fi RTT : une fois l'ensemble des mesures et des calculs réalisés, elle sera d'un ou deux mètres, là encore selon la Wi-Fi Alliance et Google.

C'est du moins la théorie, à voir dans la pratique suivant la configuration des lieux.

Des points d'accès plus ou moins bavards

Pour mener à bien ces calculs, le point d'accès doit connaitre sa position précise et la transmettre au terminal mobile. Il peut envoyer cette information sous la forme d'une latitude/longitude ou d'une adresse postale, précise la Wi-Fi Alliance.

Les points d'accès peuvent aussi indiquer l'étage où ils se trouvent, ou leur hauteur par rapport au sol ; autant d'information qu'il faudra fournir avec précision au terminal mobile pour qu'il en déduise sa position. Un manque de rigueur ou une modification de l'emplacement des points d'accès sans mise à jour de ces informations entrainera des erreurs dans la géolocalisation.

La norme Wi-Fi 802.11mc propose également des fonctionnalités supplémentaires, comme la possibilité pour un point d'accès de partager l'emplacement d'autres points d'accès via un « rapport des voisins ». Il peut également soumettre au terminal l'idée d'effectuer des mesures de distances avec d'autres points d'accès aux alentours, dans l'idée d'améliorer la précision.

D'autres fonctionnalités sont intégrées au Wi-Fi RTT comme la possibilité pour un point d'accès d'envoyer une URI (Uniform Resource Identifier) ou un nom de domaine où sont disponibles des cartes géographiques, de l'assistance et/ou des informations importantes.

Wi-Fi géolocalisation bâtiment
Crédits : supparsorn/iStock

Quid de la confidentialité ?

Le point d'accès peut également demander au smartphone de lui partager sa géolocalisation précise, mais la Wi-Fi Alliance rappelle qu'un « utilisateur final peut décider de ne pas partager l'emplacement d'un périphérique en fonction de considérations liées à la confidentialité ou à la consommation d'énergie ». Il n'est pas précisé quel sera le comportement par défaut du Wi-Fi RTT, ni comment les utilisateurs seront informés du partage de leur position. Des points sur lesquels il faudra être prudent. 

Rappelons par exemple la découverte des chercheurs français Célestin Matte, Mathieu Cunche et Vincent Toubiana : même désactivée, la puce Wi-Fi de certains smartphones continue parfois d'émettre des signaux pour chercher des points d'accès (c'est possible via l'option Always allow scanning ou Recherche toujours disponible d'Android).

Des capteurs passifs peuvent donc se mettre à l'écoute des demandes des smartphones avec « une fréquence qui peut aller jusqu’à plusieurs fois par minute, toujours avec l’adresse MAC » nous expliquait un des chercheurs. Ce genre d'information permet de suivre à la trace le déplacement des utilisateurs.

Pas besoin d'identification, mais elle peut être imposée

Autre changement important du FTM : les informations sur le temps de parcours (et donc la distance) peuvent être récupérées sans que le terminal soit connecté au point d'accès : « Les paquets Fine Timing Measurement (FTM) peuvent être transmis en mode pré-association, une fois qu'une session FTM est négociée entre un périphérique mobile et un point d'accès » explique la Wi-Fi Alliance.  

Suivant les besoins et la configuration des points d'accès, la géolocalisation peut exiger une authentification préalable : « La technologie a été conçue de telle sorte qu'il incombe à l'utilisateur final de l'appareil client et au propriétaire du réseau Wi-Fi de décider s'ils souhaitent réellement s'engager » dans un tel processus indique la Wi-Fi Alliance.

Dans le cas des centres commerciaux, des hôpitaux et autres bâtiments accueillant le grand public la géolocalisation pourrait être accessible à tout le monde, tandis qu'une entreprise restreindra certainement cette fonctionnalité aux utilisateurs autorisés. 

Point d'accès et smartphones doivent être compatibles

Le Wi-Fi 802.11mc permet donc de prendre le relai de la géolocalisation par satellites (GPS, Galileo, Beidou, etc.) à l'intérieur des bâtiments. La prise en charge native par Android 9 Pie ne signifie pas qu'une mise à jour logicielle des smartphones suffit à en profiter, il faut également que la partie matérielle soit compatible avec le Wi-Fi RTT. Il en est évidemment de même pour les points d'accès Wi-Fi.

L'année dernière, la Wi-Fi Alliance avait publié une liste des premiers produits ayant reçu la certification Wi-Fi Location. On en retrouve chez tous les principaux constructeurs : Broadcom (802.11ac Acculocate Access Point), Intel (Dual Band Wireless-AC 8260), Marvell (AP-8964), Mediatek (MT663X), Qualcomm (IPQ4018, IPQ8065 et Snapdragon 820) et enfin Realtek (RTL8812BU). D'autres prennent certainement en charge le 802.11mc depuis, mais les constructeurs ne communiquent pas vraiment sur le sujet pour le moment.

Rappelons enfin que d'autres solutions existent pour la localisation en intérieur, notamment via le Bluetooth Low Energy. Cette technique n'est pas nouvelle. Elle est par exemple utilisée par Waze avec ses Beacons. Le Bluetooth LE souffre par contre d'une importante faille, comme nous l'avons récemment détaillé

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