Le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) l'a clairement fait comprendre mardi : il ne veut pas que le collège de l'institution soit en charge de décider des amendes administratives à infliger dans le cadre du dispositif de riposte graduée, contrairement à ce que propose le rapport Lescure. Le gouvernement serait en train de revoir sa copie.
Il y a deux semaines et demi, le rapport Lescure préconisait de conférer au CSA un pouvoir de sanction, afin qu’il puisse infliger dans le cadre du dispositif de riposte graduée une amende administrative de 60 euros aux abonnés s’étant rendus coupables d’une infraction de négligence caractérisée. En effet, en faisant sauter la peine de suspension de l’accès au Net, plus besoin de passer devant le juge. Résultat : le mécanisme serait plus fluide, plus rapide... « Un peu le modèle des radars automatiques » a même estimé la ministre déléguée à l’Économie numérique, Fleur Pellerin, la semaine dernière.
Mais maintenant que les conclusions de la mission Lescure sont sur la table, les pressions vont bon train en vue d’orienter le gouvernement dans un sens ou dans un autre. Si l’exécutif a fait savoir que le « réaménagement de la réponse graduée (...) dont une partie des compétences serait transférée au Conseil supérieur de l’audiovisuel », tel que proposé par l’ancien PDG de Canal+, avait « particulièrement retenu » son attention, le CSA, lui, ne semble pas vraiment emballé.
Le CSA ne veut pas d'un pouvoir de sanction
« Je n'arriverai pas avec un képi » a prévenu avant-hier Olivier Schrameck, président du CSA, comme le rapporte Le Figaro. En clair, le régulateur de l’audiovisuel ne veut pas avoir à prononcer d’amendes administratives à l’encontre des abonnés, contrairement à ce que prône Pierre Lescure. « Je ne suis pas demandeur d'un pouvoir de sanction. Clairement, non » a bien insisté Olivier Schrameck. Régulièrement accusée de lorgner sur la régulation du Net, l’institution ne semble pas vouloir se mettre encore plus à dos les internautes en s’emparant des habits de la Hadopi, dont l’image est déjà très écornée.
Mais si ce n’est pas le collège du CSA qui va décider des sanctions dans le cadre du dispositif de riposte graduée, à qui confier ce pouvoir ? « Si cette mission doit être prévue, je préfère qu'elle soit abritée par une commission de prévention et de protection qui sera l'héritière de la commission actuelle de protection des droits » a plaidé Olivier Schrameck.
Des amendes oui, mais prononcées par le juge
Toujours selon Le Figaro, les arguments du président du CSA auraient trouvé un écho favorable auprès du gouvernement, lequel préparerait d’ailleurs un « projet alternatif ». Tout en restant dans les grandes lignes des préconisations de Pierre Lescure, l’exécutif pourrait choisir de confier l’application de la sanction au juge. Sauf que ce serait la commission de protection des droits de l’ancienne Hadopi, alors rattachée administrativement au CSA, qui transmettrait les dossiers à la justice.
Mais si le CSA ne veut pas apparaître comme le remplaçant de la Hadopi, les autres missions que le rapport Lescure propose de lui confier semblent au contraire bien à son goût. Olivier Schrameck a en effet clairement indiqué qu’en matière de labellisation des sites et de régulation, ces équipes avaient déjà effectué « un gros travail préparatoire ». Et ce dernier d’insister : « Si le gouvernement veut avancer, nous sommes prêts ». Ce qui permet de conclure que dans tous les cas, le dernier mot reviendra à la majorité.