Déréférencer directement « Mega.co.nz », le remplaçant de MegaUpload, plutôt que des pages précises du célèbre hébergeur de fichiers. Voilà ce qu'ont réclamé Warner Bros et NBC Universal à Google, qui n'a pour l'heure pas accédé à leurs requêtes.
Parmi les très nombreuses demandes de déréférencement que Google reçoit quotidiennement de la part d’ayants droit, nos confrères de TorrentFreak viennent d’en repérer deux pour le moins surprenantes. En effet, le 15 avril dernier, Warner Bros a demandé au géant de l’internet de ne plus faire apparaître « https://mega.co.nz » dans les résultats de son moteur de recherche, et ce au nom de la législation américaine sur le DMCA. Selon la célèbre société de production, cette URL porterait atteinte à ses droits d’auteur relatifs au film « Gangster Squad ». Le 24 avril, le conglomérat de médias NBC Universal a lui aussi réclamé le déréférencement de cette adresse, ici au nom de ses droits portant sur le film « Mama ».
Concrètement, si Google accédait à ces requêtes, cela signifierait qu’il ne serait plus possible pour les internautes de trouver l’adresse du nouveau site de Kim Dotcom depuis le célèbre moteur de recherche. Cette importante porte d’entrée vers Mega serait de fait condamnée. Problème : si certaines données illicites peuvent éventuellement être hébergées sur le successeur de MegaUpload, d’autres données, légitimes, s’y trouvent elles aussi. Au cas où Google viendrait à déréférencer l’ensemble du nom de domaine, tous les utilisateurs seraient donc pénalisés, y compris ceux ayant des pratiques licites.
Une notion de « site illicite » inopérante, même pour la mission Lescure
Même la mission Lescure a évoqué cette question dans son récent rapport (p. 394) : « La notion de "site illicite" n’est pas opérante : contenus licites et illicites coexistent presque toujours sur un même site, et il paraît difficile de définir un seuil à partir duquel le site dans son ensemble pourrait être considéré comme illicite ». D’après l’ancien PDG de Canal+, qui s’appuyait ici sur les conclusions de la Hadopi sur les sites de téléchargement direct, considérer l’ensemble d’un site comme étant illicite nécessiterait « une enquête approfondie susceptible d’établir avec certitude l’intention délictueuse des gérants du site, impliquant un examen détaillé de l’ensemble des contenus hébergés ainsi qu’une étude de son modèle économique ».
Pour l’heure, la firme de Mountain View n’a pas accédé selon nos constatations aux requêtes de Warner Bros et NBC Universal. Kim Dotcom a quant à lui réagi en affirmant auprès de TorrentFreak que ces demandes avaient pour but de « censurer l’ensemble de la page d’accueil » de Mega. « Ceci se situe dans la lignée du comportement exagéré de l'industrie du contenu que nous avons connu pendant des années » a ajouté le fondateur de MegaUpload, en référence au 20 % de fausses requêtes reçues selon lui chaque jour par l’ancienne plateforme.
Rappelons d’ailleurs que nous avons eu l’occasion de constater ces dernières semaines que les ayants droit ne manquaient pas d'originalité et d'inventivité en matière de demandes de déréférencement. En janvier, il a par exemple été demandé à Google de déréférencer les demandes de déréférencement qu’on lui avait transmises, telles qu’hébergées sur le site Chilling Effects. Plus récemment, des ayants droit ont obtenu de la firme de Mountain View qu’elle retire un lien vers une page sur laquelle se trouvait le dernier documentaire sur The Pirate Bay, « Away From Keyboard ». Une oeuvre sous licence Creative Commons.