Des tétons, non. Des décapitations, oui. La politique de régulation de Facebook suscite une nouvelle fois l’incompréhension. Le réseau social américain a refusé dans un premier temps de retirer la vidéo d’une femme en train de se faire décapiter. Facebook a pourtant la censure facile lorsque des contenus, même artistiques, ont le malheur de dévoiler un peu trop de peau ou pire, des poils… Finalement, le réseau social fait demi-tour et va retirer ce type de contenus...
Une femme agenouillée. Un homme derrière elle, cagoulé, lui tranche la gorge à coup de couteau. Quelques dizaines de secondes. Insoutenables. Et voilà la tête de cette femme portée à bout de bras tel un trophée. Cette scène d’horreur, Facebook a refusé de la retirer.
Selon l’édition suisse de 20Minutes, le géant américain s’est expliqué en ces termes : « Notre décision de ne pas supprimer ce contenu est basée sur le fait que les gens ont le droit de décrire le monde dans lequel nous vivons, de présenter et de commenter les actions ». C’est le message porté par son agence de relations publiques allemandes. Le réseau social prétend en effet être un lieu où on peut « attirer l'attention sur les injustices en postant un contenu dramatique ou inquiétant. »
Au site The Examiner, le réseau social a ajouté que « les gens partagent cette vidéo pour la condamner. Comme les journaux TV montrent souvent des atrocités bouleversantes, les utilisateurs peuvent partager ces mêmes contenus pour sensibiliser à ces actions ou ces causes ».
La violence oui, la promotion de la violence, non
Problème, ce contenu est diffusé sans commentaire. On soupçonne Los Zetas, un cartel mexicain habitué à ces faits de violence, mais rien ne permet d’authentifier ce contenu, son lien, ni même sa date.
Un étudiant de Belfast a lui-même témoigné à la BBC qu’il avait dénoncé ce contenu à Facebook, mais le réseau social lui a répondu qu’il ne violait pas les règles internes définies sur cette page. « Nous comprenons que des contenus à fort impact visuel sont monnaie courante, mais nous devons prendre en compte les besoins d’une communauté diverse. La publication de contenu graphique pour un simple plaisir sadique est interdite » expliquent les règles internes.
Le point 3.7. des conditions générales d’utilisation commande spécialement aux utilisateurs de ne pas publier « de contenus incitant à la haine ou à la violence, menaçants, à caractère pornographique ou contenant de la nudité ou de la violence gratuite ». En clair, si Facebook interdit la promotion de la violence, il n’interdit pas l’exposition crue de cette violence. Nuance !
Des coups de pied au cul
Dans le passé, Facebook avait déjà censuré le compte d’un utilisateur français qui avait eu le malheur de reproduire le tableau de Courbet, l’Origine du Monde. En juillet 2012, le même réseau fait disparaître « Ema », une œuvre de Gerhard Richter, l’un des maîtres de la photopeinture. Une femme nue descendant un escalier, un hommage au tableau éponyme de Duchamp. Plus près de nous, Facebook a encore retiré la photo d’un enfant à moitié nu, prise par Sebastiano Tomada, deuxième prix du World Press Photo. Photo que le quotidien flamand De Morguen avait choisie pour la une d’une édition spéciale.
Père la pudeur face au poil. Aveugle face à une carotide vomissant son sang sur les écrans. C’est donc à ce curieux standard que le dogme de la liberté d’expression et celui du puritanisme à outrance parviennent lorsqu’on les met dans le même chaudron. Ressentant une petite gêne aux entournures, le réseau social a finalement indiqué à la BBC qu’il allait retirer la vidéo et revoir ses conditions générales. Un joli volte-face qui laisse non résolu cet arbitrage : quand est-ce que Facebook choisira une bonne fois pour toutes son statut juridique, éditeur ou hébergeur ?