L’idée d’une taxe Google pour alimenter la presse s’incruste un peu plus dans le paysage. Inspiré par l’Allemagne, le syndicat de la presse nationale en France réclame la création d’un nouveau droit voisin sur les contenus de presse agréés en ligne par les moteurs et portails. Il milite aussi pour la création d'une taxe sur les ordinateurs, tablettes et outils informatiques.
Un projet de loi est donc sollicité par la profession. « Ce projet de loi est simple à mettre en œuvre et il est équilibré » croit savoir Nathalie Collin, directrice du Nouvel Obs. « D'un côté, les éditeurs s'engagent à renoncer à leur droit d'interdire l'indexation de leurs contenus par les moteurs de recherche (...) En contrepartie, nous demandons la création d'un droit voisin qui permettrait de faire payer par les moteurs de recherche une juste rémunération, chaque fois qu'un de nos contenus est indexé ». Simple et équilibré !
Marc Feuillée (Le Figaro) et Francis Morel (Les Échos) et Nathalie Collin (Nouvel Obs) ont ainsi réclamé du ministère de la Culture un projet de loi pour faire payer l’indexation et donc le lien internet. « Nous travaillons sur ce projet depuis le printemps, après avoir constaté l'échec des discussions entamées depuis trois ans avec Google. Aujourd'hui, tous les éditeurs de presse quotidienne, magazine ou purement Internet sont rassemblés derrière ce projet » ont-ils expliqué à l’AFP (la dépêche, chez Google). « Il est inadmissible que Google utilise nos articles gratuitement pour ponctionner le marché publicitaire français sans rémunérer les créateurs de contenus ! ». En face, Google France - opposé à ce dispositif comme les professionnels du secteur- rappelle que les éditeurs profitent de ses services. C'est le retour de trafic porté par Google Actualité ou par le moteur. Mais les éditeurs de presse reprochent surtout à Google d’être en position quasi monopolistique sur le marché de la recherche et donc de la pub sur les liens sponsorisés.
Plus tôt, en 2010, Laurent Joffrin (depuis au Nouvel Obs) proposait de taxer Google, en fait une « part modeste » face à d’immenses bénéfices : « principal agrégateur, Google vend aux annonceurs un produit qu’il n’a pas produit, mais qu’il a seulement collecté ». En 2009, ce même Joffrin proposait déjà de taxer cette fois les abonnements internet : « Il s’agit de rectifier les flux d’argent actuels au profit des rédactions, qui sont les auxiliaires du bon fonctionnement de la démocratie. »
Des travaux au CSPLA
Fait du hasard, le CSPLA planche actuellement sur la question des moteurs de recherche. Dans une mission sur « les outils de référencement des œuvres sur l'Internet », le conseil juridique du ministère de la Culture se demande ainsi si « les opérations de référencement doivent-elles donner lieu à rémunération des ayants droit ? » ou s’il faut «identifier le manque à gagner des ayants droit et/ou le bénéfice tiré de l’opération par le « référenceur » ? » ou « comment déterminer le quantum d’une rémunération (par œuvre, par répertoire, par type d’usage réalisé par le moteur, selon la notoriété du contenu par le moteur ou inversement à cette notoriété ? ». Les travaux sont en cours. Notons que dans un entretien au Monde, Aurélie Filippetti a soutenu que désormais, « il va falloir développer une fiscalité équitable entre les acteurs du numérique et les acteurs traditionnels de la culture. Ceux qui diffusent les oeuvres de création ont intérêt à financer la création qu’ils diffusent. »
Le 8 septembre 2010, le rapport Aldo Cardoso, commandé par Bercy et la Rue de Valois, chiffrait à plus de 1 milliard d’euros le total des aides versées par l’État à la Presse : 615 millions d’euros d’aides directes et 400 millions d’aides indirectes (exonération fiscale et TVA super réduite). Le rapport demandait au gouvernement de « mettre un terme aux effets pervers de certaines aides publiques qui maintiennent la presse dans un système d'assistance respiratoire permanente ».