L’affaire de la DCRI/Wikipédia continue de provoquer des remous au Parlement. Après le député Christian Paul (PS), c’est au tour de Lionel Tardy de réclamer des explications au gouvernement. L’élu considère que l’opération des services de renseignement a eu lieu « en dehors de toutes les règles légales pour le retrait de contenus en ligne ».
Au travers d’une question parlementaire publiée aujourd’hui au Journal Officiel, le député UMP Lionel Tardy vient de déplorer la « méconnaissance, de la part de la DCRI, des usages numériques et du fonctionnement de l'encyclopédie en ligne Wikipédia ». Pour mémoire, les services de renseignement ont convoqué le 4 avril dernier Rémi Mathis, président de Wikimedia France, afin d’obtenir d’urgence la suppression d’une fiche Wikipedia en français. Cette entrée concernait une installation militaire située à Pierre-sur-Haute, et reprenait des informations déjà disponibles ailleurs sur le Web, elles-mêmes souvent issues d’un précédent reportage diffusé à la télévision. Mais quand bien même l’intéressé n’était pas l’auteur du contenu en question, il fut menacé de garde à vue et de mise en examen par la DCRI, qui brandissait la peine encourue par les personnes divulguant des informations couvertes par le secret de la défense nationale : 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende. Il finit par s’exécuter.
Mais pour Lionel Tardy, l’opération de la DCRI a eu lieu « en dehors de toutes les règles légales pour le retrait de contenus en ligne ». Cette tentative a eu en outre selon lui « un effet inverse à celui qui était recherché ». L’article, qui n’avait presque eu aucune visite au cours des derniers mois, a finalement été publié une nouvelle fois et a effectivement profité d’un bel effet Streisand. Le parlementaire conclut ainsi en demandant au ministre de l'Intérieur les « leçons qu'il tire de cet incident », mais aussi « ce qu'il compte mettre en œuvre pour que de tels incidents, regrettables pour tout le monde, ne se reproduisent pas à l'avenir ».
Trois députés ont saisi le gouvernement
La députée socialiste Marie-Anne Chapdelaine a également transmis aujourd'hui une question au ministère de l’Intérieur afin de s’assurer de « la légalité des méthodes employées » par la DCRI. « Les menaces à l'encontre de l'administrateur bénévole, ainsi que la démarche des agents à l'initiative de ces pressions nécessitent une réponse claire du Gouvernement et en particulier du ministère de l'intérieur afin que soit respecté l'État de droit et la liberté d'information » estime ainsi l’élue, pour qui « rien ne semble justifier, sinon la demande de retrait de cette page, à tout le moins le procédé employé ».
Notons enfin que la question écrite du député Christian Paul a elle aussi été publiée aujourd’hui au Journal Officiel. Pour mémoire, l’élu sommait Manuel Valls de préciser quelles étaient les parties de l’article de Wikipédia justifiant la démarche des services de renseignement, mais aussi « sur quelles bases légales la DCRI [avait] agi ».