Le gouvernement va bientôt devoir s’expliquer des pressions exercées par la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) à l’encontre d’un membre de l'association Wikimedia France, et ce afin d’obtenir la suppression d’urgence d’une entrée de la version francophone de Wikipedia. C’est en tout cas ce que réclame aujourd'hui le député Christian Paul au travers d’une question parlementaire.
Au travers de cette question écrite (pour l’instant disponible sur son blog), le député socialiste Christian Paul rappelle que « l’association Wikimedia France a fait état de pressions exercées par la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI) sur son Président, M. Rémi Mathis, pour obtenir la suppression d’un article concernant la station hertzienne militaire de Pierre-sur-Haute, publié dans la version française de l’encyclopédie collaborative Wikipédia », comme nous l’expliquions ce week-end (voir notre article).
« Cette action de la DCRI soulève plusieurs questions » fait alors valoir l’élu, en direction du ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. Sur le fond, tout d’abord, Christian Paul explique que les service de renseignement ont « demandé le retrait d’un article dont le contenu se borne à agréger des informations publiques, la principale source étant un reportage sur la station diffusé par la chaîne locale "Télévision Loire 7" , toujours disponible en ligne ». Les informations contenues dans l’article litigieux étant déjà à la portée de tous ailleurs, le député demande donc au locataire de la Place Beauvau « quelles parties de l’article de Wikipédia justifieraient la démarche de la DCRI » ?
Interrogations autour des méthodes étonnantes de la DCRI
Sur la forme, ensuite, le député de la Nièvre estime que la manière de procéder de la DCRI (à savoir en menaçant d’une garde à vue et d’une mise en examen le représentant de Wikimedia France) était « étonnante ». Le parlementaire considère en effet que « l’association Wikimedia France n’est pas l’hébergeur de l’encyclopédie Wikipedia. Son hébergeur, et seul responsable juridique, est l’association américaine "Wikimedia Foundation". M. Rémi Mathis n’est pas, par ailleurs, co-auteur de l’article incriminé ». Manuel Valls est ainsi sommé d’indiquer « sur quelles bases légales la DCRI a agi ».
Enfin, le député voit plus loin, puisqu’il dit s’inquiéter « que des procédures similaires soient engagées contre d’autres bénévoles participant à d’autres projets collaboratifs en ligne, sous le seul prétexte qu’ils en sont contributeurs ». Tout en reconnaissant « que les services de sécurité doivent disposer des moyens de lutter efficacement contre les différentes menaces pesant sur notre pays », il demande malgré tout au ministre de l’Intérieur « quelles mesures il compte prendre pour protéger nos concitoyens de ce type d’abus et, plus largement, la liberté d’expression sur Internet ».
La balle est désormais dans le camp du gouvernement.