Alors qu'en France, une consultation est en cours afin de déterminer quelles aides l'État peut apporter à l'industrie vidéoludique, au Canada l'administration suit le chemin inverse. En effet, les réductions fiscales jusqu'alors en vigueur en Colombie-Britannique n'ont pas été renouvelées, tandis qu'elles sont menacées en Nouvelle-Écosse. Des dizaines de studios menacent donc de se délocaliser dans les régions voisines plus favorables.
En février 2010, le gouvernement de la province de la Colombie-Britannique au Canada annonçait la mise en place de nouveaux barèmes pour les crédits d'impôt accordés à l'industrie vidéoludique. Les réductions consenties pouvaient alors atteindre jusqu'à 33 % pour la main d'oeuvre qualifiée. De quoi se permettre d'attirer les développeurs du monde entier en leur proposant des salaires mirobolants, ou tout simplement de pouvoir embaucher à tour de bras sans se poser trop de questions. Or les accords signés en 2010 ont pris fin et quelques studios menacent de s'exiler dans des provinces plus accueillantes si les aides ne devaient pas être prolongées.
Certains studios ont basé leur modèle économique sur ces aides.
En effet, selon John Lenning, producteur exécutif dans un studio d'Halifax, interrogé par nos confrères de Develop, depuis que la Colombie-Britannique a cessé de soutenir le secteur, quelques studios sont en proie à d'importantes difficultés financières. « Avec le déclin des aides en Colombie-Britannique, les développeurs ne peuvent plus supporter leurs charges salariales de manière permanente. Par conséquent, nous verrons sûrement les studios se déplacer vers l'est », affirme-t-il.
Des délocalisations au sein d'un même pays, voilà ce qui attend l'industrie vidéoludique canadienne. Selon Jeremy Wellard, fondateur du studio HB en Nouvelle-Écosse, il n'est pas rare que des entreprises de développement basent leur modèle économique sur ces aides. Sauf que ce procédé ne peut pas être rentable à long terme, ainsi des firmes employant parfois plusieurs centaines de personnes seraient maintenues en vie grâce à ces aides.
« HB a été créée huit ans avant l'arrivée du Nova Scotian Digital Media Tax Credit (DMTC) en 2008, et nous avions alors environ 130 employés. Le succès de notre firme s'est établi bien avant que le DTMC entre en jeu, et nous avons choisi de ne pas nous baser dessus pour nos opérations, parce que ce n'est pas vraiment quelque chose de sûr. Le DTMC devait être reconduit en décembre 2012, et n'a été prolongé d'un an qu'à la dernière minute afin que le gouvernement de la province étudie ses effets. Personne ne sait s'il existera encore fin 2013 », s'inquiète le dirigeant.
Et la France dans tout ça ?
Le gouvernement français a récemment ouvert un groupe de travail sur le jeu vidéo, lequel ayant pour but de favoriser la création dans l'Hexagone. Parmi les pistes envisagées, il est question d'un volet fiscal dont nous connaitrons les détails d'ici cet été. Il s'agira vraisemblablement d'une hausse du taux du crédit d'impôt jeu vidéo. Mis en place en 2008, celui-ci consiste actuellement en un crédit d'impôt de 20 % des dépenses salariales et de fonctionnement dans la limite de 3 millions d'euros par exercice fiscal.
Il sera important de voir quelles aides seront apportées aux acteurs de l'industrie. En effet, un geste trop petit ne serait pas suffisant pour donner un déclic à la création, mais d'un autre côté, une attention trop généreuse, et la situation pourrait devenir la même qu'au Canada. Certes, le secteur serait florissant, mais seulement tant que les aides seront maintenues. La moindre réduction de celles-ci, et les délocalisations ainsi que les fermetures reviendront sur le devant de la scène.