Par 209 voix « pour » et 137 voix « contre », la proposition de loi du sénateur Marini « pour une fiscalité numérique neutre et équitable » a été renvoyée hier en commission des finances. Cette option était défendue sur les bancs du Sénat par plusieurs élus de la majorité socialiste ainsi que par la ministre déléguée à l’Économie numérique, Fleur Pellerin.
Pour rappel, le sénateur UMP Philippe Marini visait tout particulièrement le GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) lorsqu’il a déposé sa proposition de loi en juillet dernier. Son texte propose notamment qu'à partir de certains seuils d’activités, les entreprises basées à l'étranger soient obligées de déclarer leur activité en France, à l'image des opérateurs de jeux d’argent. Il prévoit également que la taxe sur la publicité en ligne s'attaque aux régies, qu'elles soient en France ou à l'étranger.
« Cette proposition de loi ne voit pas assez loin ni assez large » a néanmoins jugé le sénateur David Assouline (PS). « Nous avons besoin de mesures adaptées à chaque domaine, il faut cibler pour être efficace. Tous les secteurs de la culture sont touchés, l'approche de cette proposition de loi est trop générale » a-t-il abondé. Outre le fait que Philippe Marini fasse partie de l’opposition, l’examen de son texte tombe mal, puisque le gouvernement a reçu au mois de janvier le rapport Collin et Colin sur la fiscalité de l'économie numérique, qui propose notamment une imposition des sociétés en fonction de leur exploitation des données personnelles. Fleur Pellerin avait d’ailleurs déjà déclaré il y a quelques semaines qu’elle espérait que des mesures soient inscrites dans le projet de loi de finances pour 2014 et donc présentées dès la rentrée de septembre.
La majorité préfère attendre le projet de loi de finances pour 2014
Hier, l’argument a donc été ressorti par la majorité pour enterrer le texte de Philippe Marini, d’autant plus que les conclusions de la mission Lescure - maintenant attendues pour début mai - devraient également influencer les projets du gouvernement. Le nouveau Conseil national du numérique est lui aussi en train de plancher sur le sujet, suite à sa saisine par les autorités.
Fleur Pellerin l’a néanmoins assuré, « La position du gouvernement est claire : il faut rétablir l'égalité devant l'impôt, mais sans pénaliser l'économie numérique. Nous devons veiller à assurer l'équité entre les différents acteurs, quelle que soit leur nationalité. Plusieurs pistes fiscales sont envisagées, comme une taxe au clic ou une taxe sur la bande passante ». La locataire de Bercy a insisté sur le fait qu’il lui semblait nécessaire d’attendre « que le chantier progresse » afin de « traiter efficacement » le sujet, et ce d’ici « la prochaine loi de finances ».
Même si la ministre déléguée à l’Économie numérique a tenu à remercier le sénateur Marini « pour cette proposition de loi qui a permis de faire avancer le débat », celui-ci n’a pas manqué de lui renvoyer l’ascenseur. « Je remercie M. Fortassin [sénateur socialiste, ndlr] et Mme la ministre des fleurs sous lesquelles ils ont bien voulu ensevelir cette modeste proposition de loi » a-t-il lancé, faisant ainsi un jeu de mots avec le prénom de Fleur Pellerin.
L’élu a quoi qu’il en soit affirmé que l’adoption de sa proposition de loi « ne serait certes qu'une piqûre d'épingle mineure, qui n'entamerait guère la carapace des grands groupes qui exercent une position dominante sur le Net », mais que ce serait surtout « un signal, une avancée en termes de communication ».