Copie privée, contrefaçon et intermédiaires, le grand ménage espagnol

Ley du tigre

Le gouvernement espagnol vient de présenter un projet de loi modifiant la loi Sinde ainsi que les règles en vigueur en matière de droit de la propriété intellectuelle. Le texte vient combler plusieurs brèches dans la législation, notamment au regard des intermédiaires techniques. Pour autant, il ne satisfait pas pleinement les ayants droit.

espagne legislation droit d'auteur  

« La loi sur le droit d'auteur, approuvé par le décret royal du 12 avril 1996 a été un outil essentiel pour la protection des droits d'auteur, mais sa capacité de s'adapter avec succès aux changements sociaux, économiques et technologies qui ont eu lieu ces dernières années est discutable » expose José Ignacio Wert, le ministre espagnol de la Culture et de l’Éducation en présentation du texte.

 

Ce projet (PDF) poursuit trois objectifs : le régime de la copie privée, le contrôle des sociétés de gestion, de collecte et de répartition et le droit pénal de la propriété intellectuelle.

Copie privée et transparence

Pour la copie privée, l’Espagne réaffirme dans le dur l’exclusion des copies professionnelles ou plutôt les achats effectués par ceux qui ne sont pas des utilisateurs privés. C'est de ce pays qu'était partie l'affaire Padawan où la CJUE a rappelé aux sociétés de collecte européennes que les entreprises n'ont pas à payer cette ponction.

 

Le projet consacre par ailleurs le fait que la copie privée soit prélevée sur le budget de l’État - une particularité locale née fin 2011. Il est prévu que le financement de cette compensation repose « dans le plein respect du principe de juste équilibre » entre son montant et l’existence d’un préjudice. Le projet espagnol prévoit maintenant que les dommages considérés comme mineurs ne fassent pas l’objet d’une indemnisation... On ne connait pas encore le futur rendement de cette aide, mais on se souvient qu'un décret loi de juin 2012 avait ramené son montant à une dotation publique annuelle de 5 millions d'euros, contre 120 millions en 2011.

 

Les ayants droit ont cependant mal vu ce texte qui redéfinit égalemement le champ de la copie privée. Ne sera en effet considéré comme légal que la copie réalisée à partir d’un original ou d’un flux de télévision, indiquent-ils dans un communiqué commun. Toutes les autres duplications seront illicites et donc hors du périmètre d’indemnisation. Un gros coup de rabot aux espoirs rémunératoires.... Les SPRD considèrent que cette restriction du champ d’application va aller à l’encontre des citoyens et profitera aux multinationales du secteur des technologies.

 

Le texte, encore au stade de projet, pourrait restreindre le climat favorable au P2P de ce côté des Pyrénées. La justice a déjà expliqué dans le passé que « les réseaux P2P, comme moyens de transmission de données entre particuliers utilisateurs d'Internet, ne violent pas les droits d'auteurs protégés par la Loi sur la Propriété intellectuelle ». Elle s’abritait alors sur l’existence de l'indemnisation de la copie privée pour appuyer cette interprétation (voir également cet article de 2006 signé The Register).

 

La future législation prévoit aussi de nouvelles règles de performances, de transparence et de contrôle dans la galaxie des sociétés de perception et de répartition des droits. Dans le passé, plusieurs cadres de la Sociedad general de gautores y editores (Sgae), l’équivalent espagnol de la SACEM, avaient été soupçonnés de détournement de fonds. Le dispositif prévoit à ce titre une armada de sanctions pénales contre les responsables de méfaits.

Impliquer les intermédiaires, condamner les résistances

Surtout, sur le terrain du droit pénal, le texte prévoit plusieurs procédures permettant d’exiger la collaboration des intermédiaires - notamment de la publicité et des paiements électroniques - afin de bloquer ou suspendre les flux vers les contenus illicites. Le mouvement rappelle un peu celui remis à jour en France par la Hadopi sous les sollicitations des ayants droit, tout en suivant le principe de subsidiarité que l'on retrouve notamment dans la LCEN.

 

Une première phase n’excédant pas 48 heures visera à inciter au retrait volontaire ou à l’échange d’information avec le responsable de ces contenus ou l’éditeur du site. À défaut d’effet concluant, les intermédiaires de courtage et de publicité seront appelés à l’aide et devront apporter leur concours pour suspendre le service. En dernier recours, le fournisseur d’accès aura l’obligation de procéder à un blocage d’accès. Si le site est fourni avec un nom de domaine .ES, l’autorité d’enregistrement pourra être amenée à bloquer ce nom pour une durée de 6 mois.

 

En cas de défaillance répétée dans le retrait, l’éditeur du site pourra être sanctionné d’une amende administrative de 30 000 à 300 000 euros selon la gravité des faits. Le texte préconise enfin des mesures pour accélérer l’identification des responsables.

 

Le texte baptisé projet de « Loi Lassalle » tire son nom de Jose-Maria Lassalle, secrétaire d’État à la Culture. L’actuelle législation espagnole, favorable au P2P, avait été l’un des critères du choix pour l’installation de The Pirate Bay en Catalogne. Ces nouvelles règles pourraient pousser TBP a reprendre la route...

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