Hetzner a révisé récemment les tarifs de ses services de stockage en ligne. Nous nous sommes penchés sur Storage Share qui, en plus d’un prix agressif, fournit une instance NextCloud.
Stocker ses données en ligne est un vieux sujet. Les GAFAM sont passés par là, faisant d’un service réservé à quelques-uns une facilité pratique pour de nombreuses personnes.
Et si l’on ne veut pas passer par un grand acteur américain ? Il faut opter pour un autre prestataire (OVHcloud et Scaleway en France par exemple) ou se lancer dans l’auto-hébergement.
Hetzner est l’un d'entre eux. Présente depuis des années sur ce marché, l’entreprise allemande est notamment connue pour pousser des prix serrés. Or, elle vient de réviser à la baisse deux de ses services, Storage Box et Storage Share, comme nous l’évoquions il y a peu.
Storage Share nous semblait un bon compromis entre l’utilisation de NextCloud et l’idée d’une instance pratiquement prête à l’emploi. Nous l’avons donc pris en main.
Création du compte et choix du service
Commençons par créer le compte. Hetzner est avant tout une entreprise s’adressant aux entreprises, ce qui se ressent dans l’austérité générale de l’interface. Rien de bloquant cependant.
Première étape, remplir le formulaire d’inscription. Il vous sera demandé vos prénom, nom, adresse, code postal, ville, numéro de téléphone, adresse email et la langue désirée pour l’interface. Dommage, il n’y en a que deux, allemand et anglais. Après avoir défini un mot de passe – Hetzner ne réclame qu’un minimum de six caractères, c’est bien peu –, on clique sur la croix pour accepter les conditions puis on passe à la suite.
On se retrouve alors sur l’interface d’administration, qui attend que vous commandiez un produit via le lien « New Order ». Vous ne pourrez d’ailleurs l’utiliser qu’une fois que vous aurez cliqué sur le lien de confirmation de l’adresse email, que nous avons reçu immédiatement.
Le lien ouvre la page des produits, répartis en catégorie. Ici, c’est Storage Share qui nous intéresse. Nous avons donc sélectionné l’instance NX11, avec 1 To de stockage. C’est la plus petite, facturée 4,64 euros par mois. Elle n’impose aucune limite sur le nombre d’utilisateurs ni sur la quantité de données échangées, que ce soit en téléversement ou téléchargement. Le service autorise trois sous-domaines et gère jusqu’à 50 connexions concurrentes.
Une fois le paiement effectué, on attend que l’instance soit prête. Dans notre cas, ce fut fait en quelques minutes. Un email avertit de l’opération. Après un petit F5, l’interface d’administration se charge alors, après avoir été invité à renseigner le compte admin.
Elle contient quatre onglets. Info Center permet tout d’abord d’afficher les évènements liés au compte. C’est un très bon moyen de connaître d’ailleurs les capacités du service si l’on n’a pas détaillé l’offre avant d’y souscrire. Par exemple, la ligne « New security feature for SFTP and SSH » permet d’apprendre que l’on peut utiliser des clés SSH pour se connecter plutôt que le mot de passe. On peut alors désactiver complètement ce dernier. Le prix à payer sera cependant qu’aucun autre utilisateur ne pourra se connecter au compte en FTP.
Le deuxième onglet référence simplement les produits souscrits et fournit une vue d’ensemble sur le stockage et les sous-domaines.
Administration contient pour sa part toutes les fonctions de gestion du service. On peut y changer la méthode de paiement, voir les détails du compte, le supprimer, vérifier les détails d’accès, activer l’authentification à deux facteurs (très importante), vérifier le statut de maintenance, gérer les certificats SSL ou encore les requêtes au support.
Quant au dernier onglet, New Order, il permet d’acheter de nouveaux produits. Il est suivi de trois autres boutons, pour respectivement changer la langue, l’aide et se déconnecter. En cas de fermeture du navigateur, la déconnexion est automatique.
Stockage et sécurité des données
Chez Hetzner, le stockage des données se fait en Allemagne (Nuremberg ou Falkenstein) ou en Finlande (Helsinki) selon les produits. Dans le cas de Storage Share, tous les serveurs sont allemands. Chaque fois que l’on veut commander un produit dans la page New Order, un petit drapeau indique toujours où seront entreposées les données. Il n’est pas possible d’en changer.
Hetzner vante sa compatibilité totale avec les lois allemandes et européennes, en particulier le RGPD.
Point important, il n’est pas possible dans une instance Storage Share de réaliser soi-même une sauvegarde de toutes les données. En revanche, le service en réalise plusieurs par jour automatiquement. Les sauvegardes sont toujours stockées sur un autre serveur que celui où l’instance fonctionne et ne sont pas décomptées de l'espace utilisateur.

Dans la console d'administration, on peut se balader dans les sauvegardes et restaurer celle que l'on souhaite. Si l'on s'aperçoit par exemple que les données sont corrompues depuis plusieurs jours, on pourra restaurer une version plus ancienne.
Découverte de l’espace de partage
Contrairement à l’offre Storage Box qui est un simple de stockage vide sans interface, Storage Share utilise Nextcloud et fournit toute la gestion qui va avec. Si vous ne connaissez pas Nextcloud, c’est le moment de découvrir cette solution open source pensée pour les serveurs autohébergés.
Moins d’austérité ici, avec une interface propre et fonctionnelle, que l’on peut d’ailleurs personnaliser dans une certaine mesure. L’organisation est très classique : une section en haut à gauche avec les principaux accès – dashboard, fichiers, photos et activité –, en haut à droite un accès au compte et aux réglages, puis la zone principale organisée comme un gestionnaire de fichiers.
Quelques fichiers sont fournis pour servir d’exemples. L’interface gère le glisser-déposer et on peut déplacer des fichiers ou dossiers vers un espace libre, plutôt que de passer par le bouton rond « + » situé à droite du fil d’Ariane. Le téléversement commence immédiatement. Sur une connexion fibre symétrique à 400 Mb/s, nous n’avons pas dépassé les 22 Mo/s en envoi. En téléchargement, la vitesse grimpait à 42 Mo/s. Sur une connexion plus rapide, nous avons observé une moyenne de 80 Mo/s, avec des pointes à 100 Mo/s.
L’organisation générale est simple d’approche. On s’occupe ses données comme on le ferait dans n’importe quel gestionnaire de fichiers, avec des dossiers, des sous-dossiers, etc. Il n’y a bien sûr aucun blocage sur le type de fichier que l’on envoie. Chaque élément dispose d’une case à cocher pour effectuer des actions : déplacer ou copier, télécharger, supprimer, etc.
Les fichiers supprimés sont récupérables dans la corbeille, située en bas à gauche de l’interface. Aucun nettoyage automatique, ils doivent être supprimés à la main pour disparaître définitivement, sauf dans le cas où l’espace de stockage est plein, les données les plus anciennes étant d’abord supprimées.
L’interface permet également de placer des tags sur des fichiers et dossiers, pour faciliter le tri.
Créer un accès à ses données
L’interface Nextcloud fournie par Hetzner a beau être souple et riche en possibilités, on aimerait un moyen plus simple de gérer ses données depuis son ordinateur.
Il y a plusieurs solutions pour le faire, notamment le client de connexion pour Windows, macOS et Linux. L’installation est très simple et certaines distributions Linux – notamment Debian, Fedora et Ubuntu – l’intègrent déjà.
Le client cherchera à se connecter au compte via une page web, sur laquelle l’accès devra être confirmé. Après quoi il vous sera demandé de choisir entre les fichiers virtuels et la synchronisation complète. Dans le premier cas, seuls des emplacements vides seront affichés pour représenter les fichiers, mais les données ne seront pas rapatriées. Un choix recommandé si vous avez des nombreux gigaoctets de données.
Une fois que NextCloud est installé de cette manière, la gestion des données devient aussi simple qu’un OneDrive ou Google Drive. On organise les fichiers et dossiers comme on le ferait dans n’importe quel dossier sur le système hôte. Et puisque le client pour ordinateurs fonctionne, il en va de même pour les applications mobiles.
- Client NextCloud pour ordinateurs (Windows, macOS, Linux)
- Application NextCloud pour Android
- Application NextCloud pour iOS
Notez que ces applications peuvent être remplacées par n’importe quelle autre gérant le protocole WebDAV. On peut également créer un lecteur réseau, la méthode diffère selon le système utilisé.
Sous Windows, la solution la plus simple est de se rendre dans l’Explorateur, de faire un clic droit sur « Ce PC » puis « Connecter un lecteur réseau ». Dans le champ dossier, on indique l’adresse du serveur suivie de /remote.php/dav/files/USERNAME/. La connexion demandera alors le nom d’utilisateur et le mot de passe. Après quoi, le lecteur réseau apparaîtra avec la lettre choisie dans la colonne de gauche de l’explorateur.
Sur macOS, GNOME et KDE, la méthode est similaire, seule l’adresse pouvant changer légèrement.
- macOS :
https://cloud.DOMAINE.com/remote.php/dav/files/UTILISATEUR/
- GNOME :
davs://ADRESSE/nextcloud/remote.php/dav/files/UTILISATEUR/
- KDE :
webdav://ADRESSE/nextcloud/remote.php/dav/files/UTILISATEUR/
À chaque fois, la séquence en majuscules doit être remplacée par l’élément correspondant à votre installation.
Une instance NextCloud complète, avec accès à la boutique
Même si compte Hetzner peut être protégé par une authentification à deux facteurs, il en va de même pour tous ceux créés dans l’instance Nextcloud. Il est recommandé d’activer cette protection supplémentaire pour chacun, y compris le compte utilisateur. Après tout, si l’on paye pour un espace distant, c’est que l’on souhaite y stocker des données relativement importantes. Autant les protéger au mieux. Nextcloud est compatible WebAuthn et fonctionne donc avec tous les appareils et applications le gérant, à l’instar des clés Yubiko.
Si vous ne connaissez pas Nextcloud, l’un des aspects les plus intéressants est sa polyvalence via son catalogue d’applications. L’instance fournie par Hetzner est classique en ce sens puisqu’elle vous laisse installer ce que vous voulez via une boutique, dont le lien est accessible depuis le Dasboard en cliquant sur le bouton Personnaliser.
C’est ainsi que vous pourrez récupérer Talk, développée par l’équipe de Nextcloud et qui permet la messagerie entre utilisateurs d’une instance, la visioconférence, le calendrier et plusieurs fonctions de collaboration.

Cette boutique permet de pousser loin la personnalisation et devrait couvrir la grande majorité des besoins. L’offre de Hetzner part donc certes d’une instance de partage de fichiers, mais il est possible d’en faire à peu près ce que vous voulez, dans la limite des fonctions offertes par ces applications.
Nous n’allons bien sûr pas écrire un dossier sur les capacités de Nextcloud. Sachez simplement que l’instance fournie étant complète, on retrouve de nombreuses autres fonctions importantes comme la gestion de versions, le streaming des médias stockés ou encore le chiffrement, qu’il soit au repos ou de bout en bout.
L’offre d’Hetzner face à la concurrence
Hetzner vient se positionner avec Storage Share sur un créneau spécifique : les instances NextCloud prêtes à l’emploi. La tarification est agressive, un cran nettement en dessous de ce que peut coûter un serveur dédié sur lequel on déploierait sa propre instance NextCloud, par exemple via un conteneur. En revanche, l’offre de l’Allemand ne permet aucun accès au serveur en tant que tel : tout ce que l’on a, c’est une instance NextCloud équipée de 1 To ou plus.
Il est difficile de trouver des concurrents directs à Storage Share. La plupart des hébergeurs, à l’instar d’OVHcloud ou Scaleway, proposent bien des offres centrées sur le stockage, mais il s’agit le plus souvent de serveurs dédiés loués en tant que tels, ou de services spécifiques de stockage, comme Cloud Archive chez OVHcloud pour le stockage long terme (« froid »). Il peut y avoir en outre une tarification en fonction des données échangées, ce qui n’est pas le cas chez Hetzner.
Si l’on reparle aujourd’hui d’Hetzner, ce n’est pas tant pour les services en eux-mêmes que la révision récente des tarifs, désormais très agressifs.
On aurait plus vite fait de comparer Storage Share à une offre de type Drive. Face à Google One par exemple, on est sensiblement dans les mêmes valeurs, puisque l’offre 1 To de Storage Share coûte 4,64 euros par mois, contre 9,99 euros pour 2 To chez Google. Pour ce même prix, Microsoft propose Microsoft 365 Famille, avec six comptes chacun équipé de 1 To, de la suite Office complète et de fonctions de sécurité supplémentaires. Chez Apple, comme chez Google, on retrouve 2 To pour 9,99 euros par mois.
Dans tous les cas, la quantité de stockage n’est pas le seul paramètre. Pour les clients d’un compte Google, Microsoft, Apple ou autre, l’intérêt est de lier cet espace au reste des services. Dans le cas d’Hetzner, la différence se fera sur les capacités exploitées dans NextCloud : c’est à chacun d’installer et paramétrer le type de service que l’on souhaite : messagerie, sauvegardes, calendrier, discussions, stockage simple, etc. Dernier point et pas des moindres, les données Storage Share sont hébergées dans l'Union européenne et ne sont donc pas soumises à des loi comme le Cloud Act.
En résumé, les offres Storage Share sont très intéressantes. Le tarif abordable en fait des candidates à considérer pour le stockage de données, même quand l’instance NextCloud n’est pas utile. Si vous ne vous servez pas de ses capacités, elle assurera au moins la synchronisation des données et leur accès depuis des clients et applications de bonne facture. Pour les personnes qui cherchent un monde hors des GAFAM et n’ont pas le temps ou les ressources de se lancer dans l’auto-hébergement, ces offres méritent que l’on s’y penche.