Voitures autonomes : en France, des tests en conditions réelles sur des ronds-points

Faut dire qu’on est les champions
Tech 6 min
Voitures autonomes : en France, des tests en conditions réelles sur des ronds-points
Crédits : Heudiasyc UMR UTC CNRS

En France, on aime tellement les ronds-points que près de la moitié du total mondial est installée sur notre territoire. Pour les voitures autonomes, c’est un casse-tête lorsqu’il faut s’y insérer avec un trafic soutenu. Le CNRS a mené des expérimentations et a publié son algorithme.

La voiture autonome est en marche et, si certaines sont déjà capables de réaliser des opérations toutes seules, elles nécessitent encore un chauffeur. Les tests sont monnaie courante sur circuit, mais plus rares sur route au milieu du trafic avec d’autres usagers.

Cet été, des chercheurs du CNRS ont pu mener des essais en conditions réelles, à Rambouillet. « La voiture a en effet été confrontée à de nombreux véhicules aux profils bien différents comme des camions, des vélos et même un pickup tractant une voiture en panne ». De quoi faire tourner en bourrique les intelligences artificielles. Pour le Centre national pour la recherche scientifique, il existe aussi une « part d’inconnu dans les réactions des autres usagers ».

Du niveau 0 au niveau 5, vous avez les bases ?

Comme le rappelle le CNRS, cette expérimentation a notamment été rendue possible grâce au décret du 29 juin 2021 relatif au « régime de responsabilité pénale applicable en cas de circulation d'un véhicule à délégation de conduite et à ses conditions d'utilisation ». Emmanuel Macron a d'ailleurs promis un cadre de régulation à l’horizon 2022.

Pour simplifier, le Centre explique qu’il « autorise et encadre la circulation en France des véhicules automatisés jusqu'au niveau 4, supervisés et dans le cadre d’un service de transport de personnes ». La France serait, selon le CNRS, « le premier pays européen à autoriser le déploiement et la circulation de ces véhicules ».

Il existe pour rappel 5 niveaux de conduite autonome :

  • Niveau 0 :  aucune automatisation, le conducteur a un contrôle total des fonctions de la voiture.
  • Niveau 1 : assistance intégrée. « L'automatisation est présente pour certaines fonctions du véhicule, elle ne fait qu'assister le conducteur qui garde le contrôle global ». Cela peut être l’ABS ou le régulateur.
  • Niveau 2 : automatisation de fonctions combinées. « Le contrôle d'au moins deux fonctions principales du véhicule (moteur, accélérateur, direction, freins) est automatique pour remplacer le conducteur dans certaines situations ». Le régulateur de vitesse adaptatif, le centrage sur la voie et le Park assist en font partie
  • Niveau 3 : conduite autonome, mais limitée. « Le conducteur peut céder le contrôle du véhicule au système automatisé mais doit être capable de reprendre le contrôle à tout instant ». Par contre, la conduite autonome ne peut se mettre en place que « dans certaines conditions environnementales et de trafic ».
  • Niveau 4 : conduite autonome complète sous conditions. « Le véhicule est conçu pour assurer seul l'ensemble des fonctions sur un parcours et dans un domaine opérationnel donné ». De plus, si le véhicule demande au conducteur de reprendre la main mais si ce dernier ne le fait, la voiture peut se mettre toute seule en sécurité.
  • Niveau 5 : ultime niveau de conduite autonome, « sans aide du conducteur dans toutes les circonstances ».

La France et les ronds-points, une longue histoire d’amour

Du 5 au 9 juillet, les tests se concentraient sur une spécialité française : les ronds-points et carrefours giratoires. « Les voitures ordinaires n’ayant pas encore la capacité de communiquer avec la voiture autonome, les scientifiques ont installé une caméra sur le rond-point », détaille le Journal du CNRS.

Sans cet accessoire, les chercheurs sont en effet confronté à un problème, comme l’explique le directeur du laboratoire des tests Philippe Bonnifait : « Notre voiture autonome peut percevoir son environnement jusqu’à 40 mètres, au-delà elle a du mal à distinguer les obstacles. Si elle ne navigue qu’avec ses capteurs, la voiture adopte un comportement très prudent et devient lente. Elle va notamment attendre que la voie soit bien libre pour s’insérer dans un rond-point ».

C’est donc une nécessité pour que la voiture puisse mieux anticiper son insertion et éviter de créer des bouchons artificiellement. La conduite autonome promet monts et merveilles sur la question de la sécurité, mais cela ne doit pas non plus conduire à des voitures bloquées pendant de longues périodes à l’entrée des ronds-points.

Si vous vous demandez s’il est indispensable de placer des outils communicants sur les ronds-points, sachez que le CNRS à la réponse : oui, car cette question « n’est étudiée nulle part ailleurs ». La France en compterait « entre 30 000 et 40 000 » – et même largement plus selon certains – « soit près de la moitié des ronds-points comptabilisés dans le monde ».

Évidemment, chaque pays va se pencher en priorité sur les spécificités locales. Aux États-Unis par exemple, ce sont les insertions dans les croisements en forme de T et sur les autoroutes. En somme, si la France ne se penche pas sur les ronds-points, personne ne le fera à sa place. 

algorithme et méthode de perception ont été publiés

Durant les essais à Rambouillet, la voiture autonome du laboratoire Heudiasyc (créé en 1981 et associé au CNRS) « s’est insérée dans un même rond-point, particulièrement fréquenté, entre 30 et 40 fois en 2 h 30 d’expérimentation », et ce, sans attirer spécialement l’attention des autres automobilistes. Elle a donc réussi à se fondre dans le décor et imiter le comportement d’un conducteur humain, que ce soit sur le moment de s’insérer dans le giratoire ou sur la vitesse. 

« Ça a été un grand succès ! Mais si nous avions eu une semaine de plus, nous aurions créé un système qui aurait beaucoup mieux fonctionné […] L’essai a permis de valider de nombreuses approches théoriques permettant d’améliorer le fonctionnement des voitures autonomes », affirme Philippe Bonnifait. Bien évidemment, ces résultats ont été rendus possibles grâce à l'installation d'une caméra qui « a bien détecté les autres véhicules ainsi que leurs positions ».

Par contre, s’il faut déployer des caméras sur l’ensemble des ronds-points, on n’est pas sorti de l’auberge… Sans cette collaboration entre le véhicule et l’infrastructure, le résultat n’aurait certainement pas été le même, mais ce n’est pas précisé à quel point. Le CNRS ajoute que « l’algorithme d’insertion et la méthode de perception coopérative entre l’infrastructure et le véhicule ont déjà été publiés » (Nous avons réclamé le lien au CNRS, nous l’ajouterons une fois la réponse obtenue).

Heudiasyc
Crédits : Jean-Claude Moschetti / Heudiasyc / CNRS Photothèque

Quid du volant et des pédales ?

Le CNRS profite de l'occasion pour rappeler quelques points : « Il ne faut cependant pas croire que les voitures du futur seront dépourvues de volant et de pédales. Il existera sans doute toujours une coopération entre l’être humain et la machine »… n’en déplaise à Elon Musk qui souhaiterait lancer une Tesla sans volant ni pédale.

Dans tous les cas, « le véhicule aura une perception accrue de son environnement ainsi qu’une relative autonomie ». Les nouvelles fonctionnalités devraient aussi permettre de limiter les accidents. Plusieurs technologies sont en cours de développement pour faire communiquer les voitures et les infrastructures entre elles.

« Il faut continuer à faire des travaux de recherche pour voir si ces véhicules permettront à la fois d’améliorer la sécurité routière et de participer à la transition écologique. Il faudra, en tout cas, que cette technologie apporte des bénéfices notables à notre société pour qu’elle soit acceptée », conclut Philippe Bonnifait.

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